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Archives pour novembre 2020



Vivian – Bruce Conner – 1965

11. Vivian - Bruce Conner - 1965Portrait sous verre.

   4.0   A travers le portrait de l’actrice Vivian Kurz, enfermée dans une vitrine de verre, Bruce Conner déploie une satire du marché de l’art, accompagnée du Mona Lisa, de Conway Twitty. Performance filmée à l’occasion d’une exposition dans une galerie de San Francisco en 1964. C’est épileptique, hypnotique, très court, une sorte de clip grosso modo très proche de Breakaway (qu’il réalise l’année suivante) moins le fascinant dispositif renversé. Conner se fait la main, en somme.

Locomotion – Geoffrey Jones – 1975

10. Locomotion - Geoffrey Jones - 1975Different trains.

   6.0   Il s’agit du dernier des trois films (après Snow & Rail) réalisés par l’auteur britannique pour une commande du Stockton & Darlington Railway. Composé de multiples archives, 400 images fixes ou en mouvement, peintures, photos ou extraits de films, Locomotion contient l’histoire des trains et chemins de fer, vue par Geoffrey Jones, dans un essai-collage sans aucun commentaire, mais en musique : Quinze minutes qui font danser les locomotives, épousant le rythme effréné du développement de l’industrie ferroviaire.

The hole (Dòng) – Tsai Ming-liang – 1999

20. The hole - Dòng - Tsai Ming-liang - 1999Une histoire d’eau.

   6.0   Ce soir-là il pleuvait à torrent dehors. Climat idéal pour découvrir un film comme celui-là. L’eau est certes une constante chez Tsai Ming-Liang, mais rarement utilisée à ce point de vertige et de façon pas si outrancière comme peuvent l’être les inondations de Visage, ou celles du Dark water, de Nakata. Simplement il pleut en permanence dans The hole. Et si on voit peu la pluie, on la discerne par des fenêtres ou on l’entend très bien. Tout le temps. Quant aux personnages, ils passent leur temps à boire, pisser, remplir des casseroles, essuyer leur transpiration. Y a pas film plus humide que The hole. Mais c’est aussi un lieu, un immeuble : Il est rare d’apprécier autant l’architecture que chez Tsaï Ming-Liang, la verticalité est un personnage à part entière. Il y a aussi de longues plages de silences, une obsession pour le pourrissement : Ses priorités. A tel point que j’en oublie ce que le film me raconte : Une mystérieuse histoire d’épidémie, de population évacuée et une rencontre de voisinage, entre un homme et une femme confinés, qui communiquent (après quelques échanges plus répugnants) par une fissure (provoquée par une fuite) puis bientôt un trou béant entre leurs deux appartements. Le film me touche assez peu, notamment à cause de ses numéros dansants, franchement lourdingues. De mémoire, il me semble avoir eu le même problème devant La saveur de la pastèque.

Le sel des larmes – Philippe Garrel – 2020

09. Le sel des larmes - Philippe Garrel - 2020Les baisers de recours.

   5.5   J’adore Garrel, mais il ne s’est pas beaucoup foulé pour son dernier film. Disons qu’il est rachitique. Et l’épure lui va sitôt qu’elle est compensée par des trouées formelles. Il en manque dans Le sel des larmes. On sent que Garrel, plus encore que dans ses récents précédents films, souhaite filmer de belles jeunes femmes, de jolis garçons, de beaux vieux. Ils sont tous très beaux là-dedans. Beaux comme son noir et blanc doux et charbonneux. Ce qui me plait c’est que c’est malgré tout un film de Garrel. Hors du temps, hors des modes, même quand il filme une rencontre ou une danse : C’est du Garrel pur jus. Mais ça reste problématique ici et là, d’abord au détour de l’utilisation d’une voix off sans intérêt puis autour d’un dialogue sur la prostitution par exemple, ou sur cette danse, justement, parce que Téléphone. Faut vraiment qu’il arrête avec Jean-Louis Aubert, Garrel. Le film a de jolis trésors quand même, notamment au cours de sa belle première partie, simple et belle, avec Oulaya Amamra (qui irradie le film) puis Louise Chevillotte – Qu’on avait déjà vu chez Garrel, dans L’amant d’un jour. Moins dans la seconde qui s’embourbe autant que son personnage, qui nous restera énigmatique, pour ne pas dire antipathique. Les scènes avec le père (constante du cinéma garrelien) – incarné par l’excellent André Wilms – resteront les plus belles. J’adore Garrel mais c’est un cru dispensable, à mes yeux.

Frissons (Shivers) – David Cronenberg – 1976

01. Frissons - Shivers - David Cronenberg - 1976Parasite.

   5.5   La découverte tardive du premier long métrage d’un auteur aussi important que Cronenberg permet en grande partie de détecter les prémisses des thématiques à venir. En ce sens, Shivers ne déçoit pas. C’est déjà du pur Cronenberg. En collaboration avec Roger Corman et Barbara Steele, ce premier long s’inscrit dans un genre peu noble, entre le cinéma érotique et bis – et distribué comme tel, dans la mouvance du « cinéma d’exploitation ». On peut associer ce mode de production au Piranhas, de Joe Dante, par exemple. Mais chez le canadien, l’obsession c’est d’emblée le corps et la technologie, virus et contamination, complot politique et environnement post-moderne. Dans Shivers, des parasites créés par un savant fou, s’infiltrent dans les corps des habitants d’une résidence de luxe ultra-moderne, et les transforment en maniaques sexuels. En plus de ressembler à un hideux sexe masculin, le virus s’agrippe, brule, détériore et s’introduit absolument partout : à l’image de cette mémorable scène dans une baignoire. De visions folles, le film en est bondé, aussi bien dans les diverses relations sexuelles qu’il crache dans quasi chaque plan que dans le suivi visible ou non (Alien s’en souviendra) du parasite. Mais il fait aussi office de pot-pourri où toutes les limites sont repoussées, où toutes les pulsions gores de son auteur sont jetées pêle-mêle dans une succession de vignettes aussi réjouissantes qu’hasardeuses et épuisantes. Et le film ira jusqu’au bout, ne cherchera pas à rétablir quoi que ce soit, glissant inexorablement vers une barbarie régressive et une allégorie visionnaire des années Sida à venir.

Don’t breathe – Fede Alvarez – 2016

Jane LevyErreur aveugle.

   7.0   Trois adolescents paumés, Rocky, Alex et Money commettent des cambriolages et revendent ce qu’ils ont volé. Quand ils apprennent qu’un ancien soldat aveugle est en possession d’une petite fortune dans sa demeure, ils décident de le braquer. Un coup apparemment facile. Ou pas.

     Deuxième film du réalisateur Fede Alvarez, après son remake du Evil Dead, de Sam Raimi, Don’t breathe est un home-invasion inversé. Il s’agit en effet de suivre les voleurs qui voient leur larcin se retourner contre eux, sous la forme d’une terreur et d’une violence sans égal : Un propriétaire ancien paramilitaire, qui n’aura guère besoin de ses yeux pour leur faire traverser l’enfer.

     Une des grandes réussites, troublante, malsaine, du film c’est d’avoir tenté de varier nos curseurs d’identification. De nous faire entrer en empathie pour Rocky ou Alex, évidemment, mais aussi avec cet aveugle qui a vécu plusieurs traumatismes. Et systématiquement de nous les retourner pleine face, au moyen de rebondissements inattendus, que le film génère à l’infini, aussi bien scénaristiques (Une étrange rencontre au sous-sol) que mise en scénique : Magnifique séquence dans la pénombre entre des étagères à outils.

     Autre belle idée : Detroit. Bien qu’on en voit peu (d’autant que les intérieurs, la maison donc, furent tournés en Hongrie) elle est un personnage essentiel, idéal représentant de la crise et véritable cause du dysfonctionnement animé par le film : La pauvreté, la violence, l’aspect mortifère en général et le désir coute-que-coute de s’en extraire notamment via le rêve californien.

     Et évidemment le cœur de Don’t breathe, c’est la maison. La promesse de thriller labyrinthique est on ne peut plus tenue. Quel plaisir de voir un cinéaste (de genre) s’éclater à filmer une maison, la filmer sous tous les angles, dans chacun de ses pièces, recoins : couloirs, cage d’escalier, fenêtres, conduits d’aérations, penderie, dessous-de-lit, cave etc. C’est vraiment Le personnage central du film.

     Bref, c’est une réussite totale. Y a évidemment quelques tics de réalisation ci et là dont on aurait pu se passer, mais globalement quelle claque. J’étais pas bien du début (enfin, dès l’instant qu’on entre dans la maison) à la fin. Et c’est hyper bien écrit, pensé, il y a des idées et des correspondances partout, un vrai jeu de pistes (cloche, marteau, flingue, chien, coccinelle…) c’est passionnant. Et il n’abuse de rien, ainsi ses pics de violence, ses jumps scares et autres passages obligés arrivent toujours pile quand il faut.

Furie – Olivier Abbou – 2019

25. Furie - Olivier Abbou - 2019Home sweet home.

   6.0   Avant de voir – le même soir, pour Halloween – le superbe home invasion inversé que constitue Don’t breathe, de Fede Alvarez, je me suis laissé prendre au jeu (inégal mais intéressant) d’un autre home invasion inversé (une autre variation du moins), à la française cette fois : Furie, d’Olivier Abbou, au sein duquel les propriétaires, cette fois, sont enfermés dehors : Leurs locataires estivaux ayant eu l’idée ingénieuse de changer les serrures, modifier la ligne téléphonique, payer les factures et de bénéficier d’un vice contractuel.

     Si l’on dit « Furie » on pense forcément Fritz Lang ou Brian de Palma. Pourtant, le film d’Olivier Abbou évoque tout un tas d’autres films, qu’on ne va pas citer, mais c’est assez flagrant. C’est un puits de références, toutes plus ou moins bien digérées, certes, mais l’ambition générale réjouit. Car inégal, Furie l’est assurément – problème de rythme, ventre-mou, interprétation pas toujours adéquate, dialogues trop écrit – mais certains de ses parti pris fascinent.

     Il y a d’abord le fait d’ancrer Furie dans le réel du labyrinthe administratif et judiciaire. Mais pas seulement : Il interroge aussi les névroses masculines françaises à travers la crise d’identité, de virilité, de statut de fils d’immigré, de produit du système qui fabrique des victimes, de la peur du déclassement social. Ça devient vite très angoissant, pour nous autant que pour son couple de personnages impuissants. Alors, quand on ne l’attend plus, le film libère de purs trouées formelles et hypnotiques, d’abord lors de cette longue soirée de boite de nuit, ensuite lors d’un final explosif, sanglant, malsain.

     Fort et surprenant, qui plus est au sein du cinéma de genre à la française, tant la production s’avère très peu concluante si l’on excepte, ces cinq dernières années, des films comme Grave, de Julia Ducournau, Revenge de Coralie Fargeat ou La nuit a dévoré le monde, de Dominique Rocher. Furie a ce petit quelque chose de passionnant, non pas qu’il s’inspire d’une histoire vraie, mais qu’il s’avère tout à fait français, dans ses problématiques, sa topographie, sa dramaturgie. Il ne cherche jamais à imiter le modèle américain. Bonne surprise.

Les marines – François Reichenbach – 1957

22. Les marines - François Reichenbach - 1957Chef, oui chef !

   6.0   Paris Island, île de Caroline du Sud, 1957. François Reichenbach filme l’arrivée des volontaires de la marine américaine, leur initiation quotidienne rythmée par l’entrainement sportif, l’apprentissage d’infanterie et les défilés. Formation montrant la transformation physique et morale de jeunes recrues ayant décidées de s’engager dans les Marines pour des raisons diverses et variées. En témoin fasciné et distant, Reichenbach observe ces volontaires insouciants sur le point de devenir des machines de guerre. La voix off du narrateur est celle de Gérard Oury, la musique signée George Delerue. Ça dure vingt-deux minutes et c’est très beau.

La clôture (Haçla) – Tariq Teguia – 2002

21. La clôture - Haçla - Tariq Teguia - 2002Ici on broie les algériens.

   5.5   En trois magnifiques longs métrages, Tariq Teguia a dessiné une carte, aussi limpide que labyrinthique, silencieuse que logorrhéique, de son pays : L’Algérie. Or, avant Rome plutôt que vous (2008), Inland (2009) & Révolution Zendj (2015) il a fait ses armes dans le domaine du court-métrage, dont celui-ci, au sein duquel nous croiserons de nombreux visages que l’on retrouvera ultérieurement dans ses films suivants.

     Si les moyens et les idées sont encore relativement modestes, rudimentaires, il y a déjà tout Teguia là-dedans. Notamment parce qu’il s’agit de filmer Alger et ses environs, de s’accaparer l’espace, ici plutôt la ville et l’ambiance de la ville, de filmer la parole et d’y capter l’impuissance, le désespoir, la colère et/ou le renoncement, de jeunes algériens déambulant dans cette prison à ciel ouvert.

     Cette parole est leur dernier rempart de liberté face à une société écrasante, qui ne produit que de l’ennui, de l’enfermement, ne propose aucun débouché, pas de travail ni de promesses. Le film alterne ces monologues face caméra et des plans « volés » de la ville, en voiture notamment. C’est le film brouillon et radical, sombre et court, d’un cinéaste qui avance le poing levé.

La plateforme (El hoyo) – Galder Gaztelu-Urrutia – 2020

23. La plateforme - El hoyo - Galder Gaztelu-Urrutia - 2020Tour infernale et panna cotta.

   4.0   L’action d’El hoyo se déroule intégralement dans une prison verticale abritant une infinité d’étages, chacun renfermant une seule cellule « habitée par deux prisonniers ». Chaque jour, une sorte de monolithe noir qui fait office de plateforme centrale, expose un nombre considérable de menus – dont on apprendra bientôt qu’ils forment les plats préférés de chacun des détenus. Il y a deux particularités de taille : Primo, chaque mois les détenus se réveillent à un niveau différent. Secundo, cette plateforme de nourriture n’est pas réapprovisionnée lors de sa descente quotidienne, autant dire que si l’on se gave en haut, il ne reste rien pour ceux d’en bas. Ceci offre la possibilité de voir des étages où l’on piétine grassement la bouffe et des étages où les prisonniers s’entretuent et cèdent au cannibalisme. Goreng, le nouveau, servira de personnage d’initiation et cherchera vite un moyen de s’ériger contre le système. Postulat de lutte des classes, conceptuel, dystopique et métaphorique plutôt excitant qui évoque de loin le Snowpiercer, de Bong Joon-Ho ou le Metropolis, de Fritz Lang. La comparaison s’arrête là. El hoyo est un premier film et ça se voit. Surtout il ne cesse de vouloir séduire tous les publics : Spectateurs de festivals, abonnés Netflix et déviants. La réalisation tente beaucoup de choses mais épuise plus qu’elle ne fascine, dans la lignée d’un Alex de la Iglesia, autre cinéaste espagnol de cinéma de genre. On sent la volonté de faire choc, de jouer sur classique du crescendo, de faire politique et sanglant. Au final ça ressemble davantage à un épisode de série anthologique (type Black Mirror ou La quatrième dimension) qu’à une vraie expérience de cinéma. C’est un peu gratuit, souvent bourrin, parfois insoutenable. Et ça s’oublie aussitôt le générique terminé.

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silencio


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