Passe en sixième d’abord.
6.5 Du Letourneur pur jus, tant ça prépare aussi bien La vie au ranch que Le marin masqué, mais dans un univers nettement plus jeune, puisqu’ici les personnages ont onze ans. Il s’agit ni plus ni moins – d’autant plus quand connait le parcours de la cinéaste à venir – de raconter le quotidien de la gamine qu’elle était. Et l’univers que ces jeunes adolescentes se façonnent, à travers leurs éveils amoureux, joutes verbales et mimétisme maladroit des grands.
Manue Bolonaise c’est donc déjà une collection d’instantanés. Mais l’écriture, le jeu, la construction y sont tout à fait inhabituels. Interprété trop haut ou trop bas, brièvement ou jusqu’à l’étirement, il y a toujours tout un tas d’imperfections, saillies spontanées si chères au cinéma de Sophie Letourneur, à l’image de ces regards caméra ou de ces dictions hasardeuses qu’elle choisit de ne pas couper. La musicalité de la parole et des situations priment.
Quant au choix de casting il résume d’emblée ce qui sera primordial dans le cinéma de la réalisatrice de La vie au ranch, cette volonté d’aller dans son sens et donc un peu à contre-courant des modes : Ne pouvant incarner le rôle de son personnage, elle a choisi de faire jouer les jeunes par des gamins du quartier d’enfance – et du collège – qu’elle fréquentait. C’est un souci de réalisme très particulier, bien à elle, qui lui permettait de retrouver les lieux, de les reconstruire tout en filmant des jeunes habitués des lieux.
C’est un cinéma protéiforme dans la mesure où il évolue aussi bien dans une rue qu’entre les quatre murs d’une chambre. Elle y filme les sorties de cours, les soirées entre copines, les booms, les réunions de potes sur des lits, les dilemmes amoureux dans un cimetière ou sur un parvis résidentiel, les premiers baisers, les danses improvisées, les groupes et leurs petits jeux à la con et deux meilleures amies sur le point de prendre des chemins différents. C’est un très beau film sur le deuil d’une enfance révolue.
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