Publié 8 avril 2021
dans Sean Durkin
Métro, boulot, rideau.
6.0 Pas exempt d’une certaine lourdeur opératique (le cheval, la fête, le dîner, le taxi), le film est super beau formellement et parvient à capter la désagrégation du couple, d’une famille par le prisme d’un lieu (un manoir dans la banlieue londonienne) de manière assez vertigineuse. Ça m’aurait bien plu que The nest tente de vraies incursions fantastiques, là je sens qu’il n’est pas loin mais qu’il n’ose pas trop le mystère. Mais j’ai beaucoup aimé, malgré tout. Carrie Coon (quel bonheur de la revoir n’empêche) & Jude Law y sont excellents. Je n’avais pas trop aimé Martha Marcy May Marlene (l’autre film de Sean Durkin) quand c’est sorti, mais je retenterais bien, du coup.
Publié 8 avril 2021
dans Kim Farrant
L’échange ?
4.5 Soit le remake américain de L’empreinte de l’ange (2008) signé Safy Nebbou. Noomi Rapace reprend le rôle de Catherine Frot, Yvonne Strahovski (The handmaid’s tale) celui de Sandrine Bonnaire. Le film n’est donc pas très original ni inventif, d’autant qu’il ressemble beaucoup à ces thriller domestique sulfureux qui se faisaient à la pelle durant les années 90, type La main sur le berceau ou Fenêtre sur Pacifique, la fascination pour le lieu, la maison, en nettement moins bien. Mais ça se regarde. Reste qu’une fois la résolution éventée, il perd forcément beaucoup de son intérêt.
Publié 5 avril 2021
dans Steven Spielberg
Il faut sauver le juriste Steven.
5.0 Pas simple de trouver où se cache Spielberg là-dedans. Il y a bien entendu un grand sujet d’Histoire dont il est et sera coutumier (La couleur pourpre, La liste de Schindler, Il faut sauver le soldat Ryan, Munich, Lincoln…) qu’il traite avec un certain savoir-faire, opératique et didactique. Il y a aussi l’enfant, incarné par la Reine d’Espagne, mais le film l’effleure, s’y refuse. Il faut dire qu’Amistad vient après The Lost world. Et avant Ryan. On sent qu’il est un peu paumé, tonton Steven à ce moment-là. C’est aussi la première fois qu’il travaille avec Dreamworks. Bref il cherche un second souffle. On sent aussi qu’il est passionné par la question juridique. Et à l’image de son gigantesque et éreintant procès, son sujet l’écrase. C’est un long tunnel bavard sans idées de mise en scène, comme si Spielberg (ou le studio) refusait sa flamboyance habituelle. Reste quelques relatives fulgurances comme son ouverture sur la mutinerie, mais bon.
Publié 4 avril 2021
dans Mervyn LeRoy
Voix haute, ville basse.
8.0 Un film une fois encore passionnant signé Mervyn Leroy, qui emprunte ici les voies du procès, de l’injustice, du pouvoir de la foule, des médias et des hommes de loi, des rapports houleux entre le Nord et le Sud, dans le sillage évident du chef d’œuvre de Fritz Lang : Furie.
Dans une petite ville sudiste des États-Unis, le jour du Confederate Memorial Day, une jeune fille est retrouvée assassinée. Ici, bien aidé par l’arrivisme d’un procureur ambitieux et hâtif, le coupable ne fait aucun doute aux yeux de tous, il s’agit soit du concierge noir, soit de l’instituteur nordiste.
Le film s’inspire d’un fait divers qui vit un enseignant accusé du meurtre d’une de ses élèves, déclaré coupable, condamné à être exécuté avant d’être gracié par le gouverneur puis de se faire lyncher à mort par la foule.
Satire virulente du système judiciaire dans le deep south américain, La ville gronde est un grand film sur les pressions exercées sur les masses, qui n’existent plus qu’au travers de leurs libertés bafouées par la peur : un barbier et un concierge qui craignent de revenir sur leurs témoignages respectifs imposés, un juré sceptique qui préfère se plier à l’avis du groupe. Film brillant, glaçant, révoltant.
Publié 3 avril 2021
dans Rémi Chayé
La reine des canyons.
7.0 Ce n’est aucunement le récit autobiographique de Calamity Jane mais bien celui d’une émancipation (Martha devient Calamity) tout droit sortie de l’imagination de Rémi Chayé, qui s’inspire de l’enfance de la pionnière de l’Ouest. Ça évoque de beaux souvenirs cinéphiles ces traversées étatsuniennes en carrioles. On pense beaucoup aux westerns de John Ford, évidemment, mais aussi à La dernière piste, de Kelly Reichardt, rien d’étonnant tant le regard y est féminin. Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary, se jouera toutefois à hauteur d’enfant, un peu comme dans un Miyazaki. Une histoire de conquête de l’ouest et de ruée vers l’or, dans laquelle il s’agit de suivre un convoi de pionniers qui fait route vers l’Oregon, mais surtout de partager le quotidien de Martha Jane, adolescente intrépide et frondeuse, qui préfère les pantalons aux jupes, lancer le lasso plutôt que d’aller remplir les seaux à la rivière. Ses aventures – notamment dès qu’elle s’extraie du convoi – pleines de rythme, de rebondissements et dialogues décapants, n’ont rien à envier à certains blockbusters proposés par l’écurie Disney. Au contraire, il fait bon de voir une animation si délicate et riche, tout en couleurs et profondeurs, cousue avec passion sur un récit aussi ancestral que d’actualité. Et pour les enfants c’est une mine d’or, car on y entend la plus belle des insultes « Tête de bouse », qu’un cheval s’y prénomme Jambon et qu’en en sort en chantant fièrement « CALAAAAA… MITY JANE ». Très beau.