Never disturb Hutch.
5.0 Un (sous)produit à la fois très rétro et parfaitement dans l’air du temps. On pense à True Lies ou A history of violence, dans le fond : le traditionnel sommeil du lion reconverti en agneau, ici un père de famille, terne et répétitif (la mise en scène d’une lourdeur terrible pour nous faire comprendre la morosité de son quotidien) cache une double vie passée de tueur à gages sans âme.
L’histoire est archi cousue : Celle d’un type apparemment lambda, qui vit sa petite vie monotone de père de famille dans un quartier pavillonnaire, et qui le soir d’un cambriolage chez lui, ne fera rien… Jusqu’à ce que ça le ronge et qu’on comprenne qu’il était loin d’être un type lambda dans une vie antérieure.
Ilya Nailshuller – dont c’est le deuxième long métrage en tant que réalisateur (après Hardcore Henry, que je n’ai pas vu) – n’a évidemment ni la carrure de Cronenberg ni celle de Cameron mais il leur emprunte beaucoup, aussi bien la crudité et la sécheresse de l’un que l’humour et le rythme de l’autre.
Pourtant, Nobody semble davantage opérer dans la lignée de John Wick et Breaking bad. Même scénariste que la franchise : Derek Kolstad. Même acteur que dans la série : Bob Odenkirk n’est pas choisi au hasard et l’on se dit que ce rôle (qui sied sans doute mieux à Keanu Reeves, plus monolithique) va comme un gant à celui qu’on associera toujours à celui de l’avocat véreux Jimmy McGill / Saul Goodman.
Si elles sont nettement moins flamboyantes visuellement que dans John Wick, les scènes d’action sont plutôt réussies, efficaces, superbement chorégraphiées, notamment lors de la séquence du bus : On y sent bien chaque coup, chaque plaie, de chaque côté. Car c’est aussi ça qui importe : Le personnage en prend plein la gueule aussi. Et surtout le film n’en fait pas un héros, loin de là. Plutôt un cinglé qui laisse échapper tout ce qu’il refoulait.
C’est un peu tout l’inverse d’un Taken dans la motivation, c’est sans doute ce qui me plait. Que le film ne tente pas d’interroger voire de convaincre son spectateur qu’il ferait pareil si on violait / tuait un de ses proches, mais au contraire il fait du personnage un anti-héros, badass masqué, complètement dingue. Et il le fait jusqu’au choix scénaristique : Odenkirk redevient clairement le loup quand il comprend que ses agresseurs ont pris le collier de sa fille en embarquant sa pile d’espèces disposées dans une coupelle. C’est un collier qui le fait vriller. Il me semble qu’on ne peut pas faire plus honnête pour dire qu’on va juste partir dans le cocktail de bourrinade plutôt que de nous raconter quoi que ce soit de cohérent. Et ça le film le tient plutôt bien puisqu’il se termine en apothéose dans un entrepôt piégé (façon Home Alone trash) où les personnages défoncent du russe à la pelle, enfin plutôt à la mitrailleuse, bombe tout ce que tu veux.
En résulte un Actioner correct. Un bis très chouette. Oubliable dès que le film est terminé, tant il ne recèle d’aucune inventivité, tant le scénario est prétexte, mais le plaisir instantané est là. Et Odenkirk est top.