La terre tremble.
8.0 Sous l’œil de Renoir, Marseille est une grande terre d’immigration. Terre d’espoir, qu’on foule en chantant et sur laquelle se jouent les plus grands mélodrames, sociaux et sentimentaux.
Le film s’ouvre sur l’arrivée par le train d’immigrés italiens, espagnols, africains. Il se clôt trois années plus tard, au même endroit, sur l’arrivée d’un autre groupe de travailleurs immigrés, sur le même chemin de halage, avec en décor de fond le viaduc ferroviaire de Caronte. Ce pont ouvre le récit comme s’il était la passerelle qui reliait tous les continents du monde, puis le ferme dans le tragique après un travelling mémorable.
Le film est tourné avec des acteurs et des techniciens de l’équipe Pagnol, dont on dit qu’il aurait collaboré à certains dialogues. Quoiqu’il en soit il s’agit bien d’un film de Renoir et c’est une merveille.
Une grande partie du film est tournée en extérieur dans des décors naturels. L’action se situe moins à Marseille qu’à Martigues, mais on y retrouve une respiration un peu similaire à celle de Marius, à la différence qu’ici on est en terre rurale, constamment entre pinède et carrière.
La même année où Renoir tourne son brûlot La vie est à nous, il s’intéresse aussi dans Toni à la condition ouvrière, en filmant la dureté paysanne. Mais saisir le réel n’empêche pas Renoir de plonger de plain-pied dans la fiction et une histoire d’amour impossible.
Il y a une humanité (chez tous les personnages) et une véracité des sentiments, qu’on ne trouve nulle part ailleurs que chez Renoir. En somme, Toni, le film, est un parfait précurseur du néo-réalisme. Et visuellement, c’est magnifique.