La vérité.
7.0 En 1386, dans le royaume de France, le chevalier Jean de Carrouges, de retour d’un voyage à Paris, retrouve son épouse, Marguerite de Thibouville. Celle-ci accuse l’écuyer Jacques Le Gris, vieil ami du chevalier, de l’avoir violée. Le roi Charles VI doit décider s’il y aura un « procès par le combat », selon le souhait du chevalier. Ce duel doit servir à déterminer la vérité. Si le mari perd le duel, la femme sera également brûlée vive pour fausse accusation. La justice s’en remet à dieu, dit-on.
Il y a quelque chose d’assez touchant de voir Ridley Scott revenir à ses premières amours. En effet, si le réalisateur de Gladiator a beaucoup investi la matière épique, il ne faut pas oublier que son tout premier film, Les duellistes (1977) était déjà l’histoire d’un duel, adapté d’une nouvelle de Conrad.
Mais Le dernier duel est moins l’histoire d’un duel qu’un film sur le pouvoir des hommes et sur la vérité propre de chacun. C’est toute la particularité du film qui a la manière de Rashomon (ou de la série The Affair, plus récemment) se contentera de conter des faits suivant la perspective du personnage choisi. Donner à observer leurs vérités : d’abord celle de Jean de Carrouges (Matt Damon, impeccable) puis celle de Jacques Le Gris (Adam Driver, tout aussi à l’aise).
Deux chapitres ? Non : Trois. C’est la grande idée du film, finalement très féminin, que d’offrir aussi et surtout le point de vue de Marguerite de Thibouville (Jodie Comer, révélation). Chapitre que Ridley Scott intitulera de ses sobres sabots : « La vérité ». Car heureusement, le film ne laisse aucun doute quant au fait essentiel autour duquel le récit se déploie. Fallait-il pour autant faire clignoter le sous-titre ?
Qu’importe, le film se déroule en trois mouvements, inégaux certes, un peu longs parfois, puisque répétitifs, mais il converge d’une part vers un miroir médiéval de notre époque Metoo, et vers ce duel attendu qui ne démérite pas, loin de là. Jusqu’à ce très bel épilogue, lumineux et troublant.
C’est un film passionnant, au récit bien plus riche, retors et ambigu qu’il n’en a l’air en apparence. Dans le rapport à la subjectivité bien sûr tant chacun ne s’étend pas du tout sur les mêmes faits, comme si certains éléments importaient pour l’un et non pour l’autre. Et le film prend une dimension assez imparable dans son dernier tiers et dans sa partie procédurière. Le meilleur film de Ridley Scott depuis trente ans.
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