Les infidèles.
7.0 Dix ans avant Beethoven, le Saint-Bernard était déjà à l’honneur sur les écrans de cinéma, dans l’adaptation du roman éponyme de Stephen King (Cujo, 1981), cette fois moins destinée au public familial : L’histoire d’un gentil chien, qui chope la rage suite à une morsure de chauve-souris, dévore son maître, avant de piéger une femme et son enfant, dans leur voiture.
D’un côté, le film (et probablement le livre aussi ?) nous plonge dans un quartier résidentiel de Castle Rock, dans le Colorado et brosse le portrait du couple Trenton, en crise depuis que Vic a découvert que Donna, sa femme, a une liaison. Ils ont un petit garçon de cinq ans, sujet à des terreurs nocturnes. De l’autre celui de la famille Camber, issue de la campagne environnante, abritant une ferme, un garagiste, sa femme, son enfant et un chien, le Saint-Bernard Cujo, dont on assiste progressivement à la métamorphose.
Tandis que son mari part en voyage d’affaires, Donna part avec Tad faire réparer sa voiture au garage des Camber. Ils sont d’emblée assaillis par le chien, tous crocs dehors, bave blanche dégoulinante, qui décide de ne pas les laisser sortir. Et la voiture ne démarre plus. Les heures défilent, bientôt les jours et l’on se dit que les téléphones portables c’est quand même une super invention.
Du seul point de vue de la tension, la seconde partie du film est une petite merveille, faisant grimper un crescendo lent et organique (On y ressent la chaleur et la déshydratation) magnifiquement secondé par l’interprétation assez magistrale de Dee Wallace (Qui jouait la mère, dans E.T.) et Danny Pintauro (L’une des plus impressionnantes performances de petit garçon vues sur un écran) et bien entendu de la présence démoniaque du chien monstrueux.
Bien sûr tout cela est très classique dans sa construction, puisque le film n’ose pas entièrement le huis-clos en restant dans cette voiture et préfère nous convier, dans un montage parallèle à suivre les inquiétudes du mari, sans nouvelles de sa femme et son fils, depuis son départ. Il s’agit évidemment de faire monter l’angoisse et d’espérer qu’il vienne vite à leur secours. Ces scènes sont les moins réussies. C’est vraiment quand il évolue au sein de cette habitacle irrespirable, cernés par les aboiements, que le film révèle tout son potentiel anxiogène.
Bémols : Le film délaisse complètement la famille Camber au profit des Trenton, alors qu’ils auraient mérité d’être traités équitablement, afin de renforcer l’aspect miroir de la situation : L’absence du mari d’un côté, celle de la femme de l’autre. Aussi, je ne peux m’empêcher d’y voir des velléités moralisatrices, de la part du cinéaste (car King ira apparemment plus loin là-dessus) qui semble un peu trop fasciné par l’idée de punir le personnage féminin, en plein chemin de croix, face à son reflet infidèle et destructeur.
Quoiqu’il en soit – et quand bien même la fin semble beaucoup plus passe-partout que dans le livre, plus hollywoodienne, disons – ce récit de chien fidèle et affectueux transformé en monstre sanguinaire s’avère aussi palpable que malsain couché sur écran. Toutes les scènes d’attaques sont assez puissantes. Et le film est oppressant, par instants terrifiant et surtout la photo, signée Jan de Bont, est très réussie, renforcée par cette édition blu-ray Carlotta à tomber par-terre. De la bonne série B de luxe.