Va, vis et deviens.
7.0 Le programme du film se lit lors d’une scène où l’écrivaine incarnée par Valeria Bruni-Tedeshi fait un colloque dans un château en province. On lui a demandé de présenter un film sur une femme écrivain et elle décide de projeter Opening night, de Cassavetes. « C’est avant tout un superbe portrait de femme » dit-elle.
Les amours d’Anaïs opère ce même décalage : Sous ses atours de film de triangle amoureux, c’est en réalité un portrait de femme. Celle d’une fille plus inquiète qu’il n’y parait – à la fois pour la santé de sa mère, ses histoires d’amours que pour son accomplissement personnel – qui refoule cette inquiétude par une totale désinvolture, symbolisée d’abord par cet avortement qu’elle prend avec beaucoup de légèreté ou pour son impossibilité à payer les loyers de l’appartement qu’elle habite.
Elle se plait à glisser dans la vie, à vivre dans le présent. Jusqu’à sa rencontre avec Denis Podalydès avec qui elle a une aventure avant qu’elle ne s’intéresse à la femme d’icelui, qui incarne soudainement celle dont elle rêve d’être dans vingt ans voire se persuade qu’elle s’est accomplie en étant la même qu’elle à trente ans.
Et c’est au contact de cette femme écrivain, qui la fascine, que la gravité va s’emparer d’Anaïs, tandis qu’elle était jusqu’alors assez détachée de ses sentiments. Et la mise en scène, qui collait à son personnage dès la toute première séquence, tournait autour d’elle, la suivait en permanence au gré de ses humeurs pleines de soubresauts, s’aère délicatement. Le film s’épure. Car son personnage s’abandonne et accepte cet abandon. Durant tout le film, Anaïs ne monte pas dans les ascenseurs qui la rendent claustrophobes. Le tout dernier plan raconte ainsi beaucoup de son abandon total.
C’est un premier film, mais un beau, avec plein d’énergie, d’idées. Et Anais, le personnage, est un peu insupportable. Mais c’est Anais Demoustier. Et Anais Demoustier peut rendre n’importe quel personnage insupportable supportable, sinon magnifique. C’est un film pour elle, c’est écrit pour elle. C’est une belle déclaration d’amour à une actrice, un peu comme l’était Opening night.