• Accueil
  • > Archives pour janvier 2022

Archives pour janvier 2022



Seize printemps – Suzanne Lindon – 2021

30. Seize printemps - Suzanne Lindon - 2021Seize apathies pour Suzanne.

   3.0   Premier film de Suzanne Lindon (fille de Sandrine Kiberlain & Vincent Lindon) vingt ans qui campe Suzanne, une fille de seize ans qui s’ennuie, au lycée, avec les ados de son âge. Elle tombe amoureuse d’un garçon qui a deux fois son âge, fait du théâtre, mange des tartes aux fraises et boit des diabolos grenadine. Note d’intention qui tenait sur seize minutes pour seize printemps, mais qu’on étire en long métrage pour pas grand-chose. Le film est à la fois mignon et consternant tant il est vide, amorphe, d’une pauvreté abyssale, dans le fond comme dans la forme. Sa seule idée ce sont ses petites touches de comédie musicale mais faut voir le résultat. C’est un petit film bourgeois sans intérêt. Car Suzanne attend « que quelque chose se passe », pour reprendre les paroles d’une chanson du film. Nous aussi. Et puis le film ne raconte rien mais il est lourd : Dans la chambre de Suzanne il y a un poster d’A nos amours, celui sur lequel est écrit en gros SUZANNE, au cas où on avait oublié le prénom de Sandrine Bonnaire dans le film de Pialat. Je sauve les petites scènes avec le père, incarné par Frédéric Pierrot, qui sont très douces, très jolies. Mais bon…

Les amours d’Anaïs – Charline Bourgeois-Tacquet – 2021

26. Les amours d'Anaïs - Charline Bourgeois-Tacquet - 2021Va, vis et deviens.

   7.0   Le programme du film se lit lors d’une scène où l’écrivaine incarnée par Valeria Bruni-Tedeshi fait un colloque dans un château en province. On lui a demandé de présenter un film sur une femme écrivain et elle décide de projeter Opening night, de Cassavetes. « C’est avant tout un superbe portrait de femme » dit-elle.

     Les amours d’Anaïs opère ce même décalage : Sous ses atours de film de triangle amoureux, c’est en réalité un portrait de femme. Celle d’une fille plus inquiète qu’il n’y parait – à la fois pour la santé de sa mère, ses histoires d’amours que pour son accomplissement personnel – qui refoule cette inquiétude par une totale désinvolture, symbolisée d’abord par cet avortement qu’elle prend avec beaucoup de légèreté ou pour son impossibilité à payer les loyers de l’appartement qu’elle habite.

     Elle se plait à glisser dans la vie, à vivre dans le présent. Jusqu’à sa rencontre avec Denis Podalydès avec qui elle a une aventure avant qu’elle ne s’intéresse à la femme d’icelui, qui incarne soudainement celle dont elle rêve d’être dans vingt ans voire se persuade qu’elle s’est accomplie en étant la même qu’elle à trente ans.

     Et c’est au contact de cette femme écrivain, qui la fascine, que la gravité va s’emparer d’Anaïs, tandis qu’elle était jusqu’alors assez détachée de ses sentiments. Et la mise en scène, qui collait à son personnage dès la toute première séquence, tournait autour d’elle, la suivait en permanence au gré de ses humeurs pleines de soubresauts, s’aère délicatement. Le film s’épure. Car son personnage s’abandonne et accepte cet abandon. Durant tout le film, Anaïs ne monte pas dans les ascenseurs qui la rendent claustrophobes. Le tout dernier plan raconte ainsi beaucoup de son abandon total.

     C’est un premier film, mais un beau, avec plein d’énergie, d’idées. Et Anais, le personnage, est un peu insupportable. Mais c’est Anais Demoustier. Et Anais Demoustier peut rendre n’importe quel personnage insupportable supportable, sinon magnifique. C’est un film pour elle, c’est écrit pour elle. C’est une belle déclaration d’amour à une actrice, un peu comme l’était Opening night.

Encanto – Charise Castro Smith, Byron Howard & Jared Bush – 2021

20. Encanto - Charise Castro Smith, Byron Howard & Jared Bush - 2021La vie est un miracle.

    6.5   C’est un beau film sur le poids de la famille. Il est rare chez Disney de voir un antagoniste aussi invisible, ici il est représenté par la grand-mère, mais c’est plutôt le dit-miracle qui l’incarne : L’histoire d’une famille, les Madrigal, vivant dans une maison enchantée au sein des montagnes colombiennes. Maison offrant à chaque enfant un pouvoir surnaturel, tant vanté, tant espéré qu’on le fête comme une bar/bat mitzvah. Ici il ne s’agit pas de célébrer une majorité religieuse mais d’ouvrir une porte et de faire la rencontre avec son pouvoir magique : une force herculéenne, une faculté de guérison, la possibilité de dialoguer avec les animaux ou encore un don de métamorphose, un don de voyance.

     Mirabel est la seule qui n’a rien reçu. Sans explication, la porte est restée fermée. Et c’est ce personnage, héroïne du film, qui va troubler le rituel et bousculer le quotidien de cette cour des miracles. Par jalousie (notamment envers sa grande sœur, qui fait apparaître des fleurs) et frustration de constater que son petit frère reçoit aussi un don, confirmant qu’elle n’est qu’un maillon oublié. « C’est un pouvoir qui sera à ton image » ne cesse de leur répéter à tous cette matriarche qui les enferme dans une bulle – jusqu’aux mariages arrangés – que Mirabel ne peut supporter puisqu’elle n’a hérité de rien. Elle n’est rien, sans pouvoir.

     La belle idée du film, une fois que la casita commence à se craqueler de partout et que le récit s’emballe, est de libérer les personnages de leurs chaînes, tant chacun éprouve sans le dire, son pouvoir magique comme une malédiction. La réapparition d’un membre disparu redistribue les cartes. Et le film libère bientôt, grâce à Mirabel, le poids de cette histoire familiale et d’un enchantement qui ne peut renaître qu’en étant détruit et relancé sur des fondations plus saines. Avec des pics très émouvants. Larmes aux yeux lors de la scène au bord de la rivière, qui m’a rappelé « la plus belle scène au bord de la rivière ever » dans Pat Garrett & Billy the kid.

     On peut certes regretter que le film ne dessine pas plus loin que cette famille, cette maison. C’est d’autant plus flagrant que la petite communauté (le village) dans laquelle évolue cette petite communauté (La famille) n’est jamais traitée. C’est une toile de fond. Reste qu’au sein de la famille, il y a de beaux personnages, qui sont empêchés aussi car c’est le sujet, de les faire exister uniquement au travers des désirs de la matriarche. Voilà pourquoi Bruno est si beau. De très loin mon personnage préféré.

     Encanto est très beau visuellement, notamment tout le design de cette maison magique, l’animation est fluide, pleine de détails. Le point faible c’est le même que pour Vaiana à mes yeux, les musiques de Lin-Manuel Miranda, qui sont franchement lourdingues. Quant à Coco, son cousin de chez Pixar auquel on pense beaucoup, il est bien au-dessus, évidemment. Reste que ce fut pour moi un enchantement total de voir ça en salle avec mes deux petits gremlins qui ont tous deux adoré.

The Matrix resurrections – Lana Wachowski – 2021

24. The Matrix resurrections - Lana Wachowski - 2021L’amour en fuite.

   4.0   On sent que Lana Wachowski n’a pas du tout envie de refaire un épisode de Matrix. Qu’elle en est contrainte par les studios : Toute la dimension méta du premier tiers, surlignée jusqu’à la nausée, appuie constamment là-dessus. Et si elle accepte de s’y replonger, c’est uniquement pour ses personnages, qu’elle adore, pour cette histoire d’amour entre Neo & Trinity, semble t-elle dire. Mais l’on sent qu’au fond ce qui lui manque c’est moins Matrix que l’ambiance de Sense8.

     Lana Wachowski veut donc refaire Sense8. On y retrouve un geste similaire, plus léger, foutraque, plus queer aussi, et bien entendu des acteurs de la série. Mais cette troupe de personnages ne parvient jamais à exister puisqu’elle est dévorée par Neo et Trinity. Je ne sais pas si Sense8 est ce que les Wacho ont fait de mieux, mais c’est de très loin, selon moi, ce qu’elles ont fait de plus stimulant, romantique et émouvant, car ses huit personnages (et ceux qui gravitent parfois autour) sont superbes. Le problème ici c’est qu’il n’y a rien de stimulant, romantique et émouvant. On sent que Resurrections vise ceci bien plus que d’être à la fois un film d’action nouveau ou un Matrix en rupture. Mais ça ne fonctionne jamais.

     C’est un très mauvais film d’action, déjà. Qui fait illusion par ses promesses, à la fois initiales dans son apparence nostalgique (rejouer l’ouverture du premier Matrix en changeant le point de vue ou plutôt en créant un programme dans un programme) que dans son installation dans le cadre : La scène de combat avec les Exilés, excitante sur le papier, est tuée dans l’œuf très vite tant elle est illisible. Mais il suffirait d’évoquer la scène du train pour s’en convaincre : C’est laid, incompréhensible, ni fait ni à faire. Quant au déluge final, c’est simple, il lance la promesse – avec cette pluie de corps se défenestrant en meute – mais ne parvient jamais, au hasard, au centième de la cheville de la scène de l’autoroute dans Reloaded.

     Autre souci majeur : Le film est parcouru de blagues ou d’un ton potache qu’on a plutôt l’habitude de voir chez Marvel, à l’image de ce moment où Neo ne parvient pas à voler ou de ces machines « cools » – car il y a cette fois collaboration entre les hommes et des machines rebelles – qui s’extasient d’une réussite : C’est niveau Thor ou Les gardiens de la galaxie. Je n’ai fondamentalement rien contre ces films-là, j’en aime certains, mais au sein d’une saga comme Matrix c’est très gênant.

     Tout semble un peu raté. Aussi bien la version hystérique du nouveau Morpheus – Difficile de passer après Laurence Fishburne, ceci dit – que le personnage de l’analyste, censé être le nouvel architecte (mais on voit surtout Barnay de HIMYM) ou le nouveau Smith, qu’on adore dans Mindhunter mais qui s’avère un peu à côté ici. C’est un film constamment moqueur, d’Hollywood, des fans, du monde contemporain, de façon grossière. Sa dernière scène, post-générique, absolument scandaleuse, clôt le débat : Le cinéma est mort, l’art est mort, on n’a plus qu’à faire des vidéos de chats, des catrix. Ok super. Moi j’ai vu plein de films géniaux cette année donc je vous laisse vous palucher sur votre discours méta-gogol de geek aigri et cynique qui crache grossièrement sur son spectateur formaté à renfort d’une avalanche de pilules bleues.  

     Mais le plus triste est ailleurs : Si Lilly (qui avait déjà quitté le navire Sense8 en cours) semble avoir flairé la fausse bonne idée, Lana s’y vautre, mais plutôt que de vouloir tout briser – Un peu ce que faisait chacun des trois épisodes de la saga – elle recycle. C’est beaucoup de recyclage, Resurrections. De plans recyclés : Un peu à l’image de celui des douilles qui tombent de l’hélicoptère. Ou pire : Une rafale de flashs très illustratifs, reprenant des séquences des trois films précédents.

     In fine, Matrix Resurrections est à Lana Wachowski et la trilogie Matrix ce que L’amour en fuite est à François Truffaut et sa trilogie Doinel. Alors ça aurait sans doute pu être pire si ça avait été fait par quelqu’un d’autre, un peu comme Terminator, Dark fate. Mais à l’instar de ce dernier, qui scandait lui aussi son envie de réécrire ses propres règles, il s’agirait de le faire avant de le scander.

12

Catégories

Archives

janvier 2022
L Ma Me J V S D
« déc   fév »
 12
3456789
10111213141516
17181920212223
24252627282930
31  

Auteur:

silencio


shaolin13 |
Silyvor Movie |
PHILIPPE PINSON - ... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Playboy Communiste
| STREAMINGRATOX
| lemysteredelamaisonblanche