Le ciel, les idiots et l’amer.
7.0 Un Adam McKay inspiré qui greffe sa tonalité potache coutumière à une captation pointue des maux de notre société absurde, repliée dans un flux exponentiel d’infos et d’images, qui n’a même plus conscience de sa propre survie.
Il en produit une satire grinçante, toujours sur le fil, à l’image de ses comédiens tout en emphase, qui s’avèrent pourtant tous à leur place, d’un Leonardo DiCaprio combatif et chancelant à une Jennifer Lawrence extra-lucide et désespérée, en passant par une Meryl Streep monstrueuse qui semble condenser à elle-seule les derniers présidents américains, un Jonah Hill cynique et vulgaire, une Cate Blanchett arriviste insupportable, un Timothée Chalamet en punk à chien évangélique, un Marc Rylance tout en terreur tranquille, un Ron Perlman en guerrier débile.
Tout y est over the top. Et c’est sans doute ce qui fait tenir le film, ne le plonge pas dans une dynamique démago qui tente de se donner bonne conscience.
Kate, une étudiante astronome découvre qu’une comète fonce droit sur la Terre, confie sa découverte à son professeur référent et leurs calculs respectifs sont formels : La collision adviendra dans six mois et quelques jours. Ils joueront tous deux le rôle de lanceurs d’alerte, se heurtant à l’ignorance, la bêtise et le déni de personnages bouffons, aussi bien sur le terrain présidentiel, journalistique, technologique que dans l’opinion publique, les réseaux sociaux et le star-system.
Difficile d’effectuer une comparaison et/ou un prolongement avec ses deux films précédents (The big short, 2015 & Vice, 2018) apparemment plus sérieux, car je ne les ai pas vu. Il y a quoiqu’il en soit une volonté de prendre le pou d’une Amérique actuelle, aussi bien en traitant de la crise financière qu’en faisant un biopic politique sur Dick Cheney.
La comète tueuse de planète symbolise à elle seule le danger cataclysmique, entre crise économique et climatique, qui nous menace tous. La comète c’est peut-être aussi le Covid. Elle libère ce qui importe, à savoir notre incapacité à gérer notre propre survie au détriment de notre confort.
Don’t look up semble s’inspirer autant de Network, de Lumet que de Dr Folamour, de Kubrick. Deux films cités partout comme références, y compris par Adam McKay. Deux films que je n’aime pas. Autant dire que ça partait mal.
Mais le film dépasse la simple volonté de faire « son grand film politique » sur la fin du monde. Au contraire, on retrouve les tics de McKay, son rythme insolent, une utilisation exagérée de son casting de stars. Et des gags à la pelle, autour de répliques bien senties, voire autour d’une bouteille d’eau ou d’un paquet de chips, par exemple. C’est un ballet de questions posées et de portes qui se ferment, de personnages à la dérive, qui rient, qui gueulent, mais McKay aime trop le pic comique décalé (le pétage de plombs de Leo), annoncé (la scène pré générique) ou gratuite (la scène lourdingue post générique) pour faire une œuvre dans la lignée de celles dont il s’inspire.
C’est plutôt à Fatal (Michael Youn) ou Mars Attacks (Tim Burton) auxquels moi je pense, devant. Et c’est tout à son honneur – et en fin de compte, c’est dans la continuité de Step brothers ou Ricky Bobby, pour moi.
C’est en grande partie ce qui me séduit énormément là-dedans, cette façon de rire sérieusement disons. C’est aussi ce qui l’empêche d’être un peu émouvant, tandis qu’il place ses pions pour l’être lors de ce dîner de fin du monde.
Une plume acérée, avec des personnages hauts en couleur, sur lesquels planent les ombres de Sarah Palin, Greta Thunberg, Steve Jobs ou Donald Trump. Il y a des idées en permanence. Ce n’est jamais trop long, quand bien même il y ait des ratés ci et là. Bref c’est un vrai film méchant, jamais auto satisfait de sa virtuosité satirique tant il tente plein de trucs en permanence.