Cauchemar en cuisine.
6.5 L’action de The chef a beau se dérouler intégralement dans un restaurant il s’agit moins d’un film culinaire que d’un film en immersion : Le temps d’un service, un soir, la veille de noël. Avec un procédé formel qui en impose, en effet le film est tourné en un unique plan séquence. C’est 1917, les tranchées remplacées par une cuisine : le plan ici ne triche pas, impossible de se réfugier derrière une coupe au noir tant tout y est frontal, sans ornements, à l’image de cette cuisine ouverte sur la salle.
Si l’excès de virtuosité agace au préalable, il faut lui reconnaître deux utilités essentielles. D’une part, cela permet de créer du temps réel, de comprendre le fonctionnement d’un service et de continuer de faire vivre le décor, comme si on y était, l’immersion, le réel, en permanence, donc. D’autre part, et un peu à la manière du magnifique Victoria, de Sébastien Schipper, cela crée de la fatigue, de l’épuisement, que l’on ressent chez chacun des membres de la brigade, même si le film raconte évidemment en priorité le chemin de croix de ce chef, qui dès qu’il débarque au resto, est déjà proche de la rupture.
La grande idée du film c’est de parvenir à donner du temps, un visage, une histoire à chacun des membres de la brigade, qu’ils soient commis ou second, poste viande ou plongeur, apprentis ou pâtissiers. On passe du temps avec chacun d’eux. C’est une micro-société très fragile, aux énergies différentes, qui en plus de gérer sa clientèle, se divise en deux groupes (La brigade de salle et la brigade de cuisine) ce qui accentue les tensions.
Le problème du film c’est qu’il est trop écrit, il charge continuellement la barque. Tout y est, de l’inspection sanitaire aux problèmes de commandes ; le retard de l’un, le burn-out de l’autre ; la cliente critique et l’autre allergique ; la petite nouvelle et celui qui sort d’une tentative de suicide. Tout se mélange car tout va exploser. Et on en sort aussi exténué qu’eux. C’est too much mais très impressionnant.