Les gardiens de la franchise.
3.5 Un sixième volet qui fait illusion – de plein de manières – mais qui s’avère in fine pas si différent, si on observe attentivement, de L’empire des fourmis géantes, de Bert Gordon.
Sa première illusion, assez évidente, c’est qu’il a des sous, donc ses dinosaures, en numérique ou en animatronique, sont assez beaux. Ils ne sont pas bien mis en valeur, mais c’est un problème de mise en scène, c’est autre chose.
Sa deuxième illusion c’est d’être une suite : Si on a grandi avec Jurassic Park, on a envie de voir un troisième Jurassic world, d’autant que le précédent (signé Bayona) était plutôt réussi, très visuel. Quand on grandi avec Jurassic Park, les dinosaures au cinéma c’est sacré : même quand ils sont sous employés, dans Toy Story ou dans le King Kong, de Peter Jackson.
Troisième illusion et pas des moindres : Il m’a permis une sortie en famille, en pleine fête du cinéma, avec mon fils qui connait le Spielberg par cœur et qui adore aussi les suites. Difficile de bouder ce plaisir.
Quand bien même ce plaisir se soit souvent effondré durant une séance interminable (2h26, sérieusement ?) et un film archi mal branlé, et cela dès les premières minutes de cette bouillie de spot TV immonde, qui résume maladroitement la situation, qui reprend la suite de ce que promettait le volet précédent.
J’avais mal à mon Spielberg. D’autant que le film s’assume pleinement dans l’ère du temps : cumuler le fait d’être une suite, un remake voire un reboot. Il y a aura du Jurassic park partout. Il me semble que Bayona s’en sortait plus subtilement, dans le précédent, lui. Là c’est souvent grossier (la bombe de mousse à raser, le plan de découverte des sauterelles (des sauterelles !!) où Ellie Sattler ôte ses lunettes, la scène finale dans l’hélicoptère etc…) quand c’est copié sur Jurassic park.
Mais le film ne s’en tient pas là et cumule les références variées, arpentant aussi les terres de James Bond, d’Indiana Jones, de Jason Bourne, de Mission Impossible : La scène à Malte (très chouette en passant) qu’est-ce que ça vient foutre là, franchement ? Ou pire, ces films ont tendance à s’inspirer des daubes super-héroïques actuelles, ainsi il ne sera pas surprenant de voir un avion se crasher dans un lac gelé et de voir en sortir Chris Pratt & Bryce Dallas Howard, sans une once d’égratignures. Les gardiens de la galaxie, en somme.
J’aurais aimé y voir davantage d’idées (du niveau d’un verre d’eau qui tremble, je sais pas) et davantage de contrastes : J’ai l’impression qu’il y fait nuit en permanence, comme dans les films DC ou Marvel, c’est insupportable. C’est vraiment un cache-misère, la nuit. Mais tout le monde n’a pas le talent pour faire un Blade runner.
Autre chose : Que le film soit invraisemblable, ok, ça ne me dérange pas, les films de la franchise le sont rarement, vraisemblable, après tout on parle de faire cohabiter humains et dinosaures. Mais pourquoi les personnages sont-ils devenus si antipathiques ? Si débiles ? Mon cœur saigne quand je retrouve Ellie Sattler, le professeur Grant & Ian Malcolm. Plutôt les ersatz de leurs personnages, inchangés en trente ans, mais aseptisés, leurs mauvaises copies, comme s’ils avaient été remplacés façon L’invasion des profanateurs de sépultures.
Je garde le meilleur pour la fin : L’anthropomorphisme. Pourquoi les dinosaures ressemblent de plus en plus à des clébards ou des humains ? Je pense qu’il y avait déjà ça chez Spielberg, c’est difficile d’y échapper, surtout venant de créatures dont il est difficile de savoir leurs vrais comportements. Mais il y trouvait le bon dosage, une étrangeté, une surprise. Ici on peut les dresser en leur tendant la main façon salon nazi. Pire encore, ils peuvent faire semblant de mourir. Dans Fallen kingdom, l’indoraptor faisait semblant de dormir, déjà, mais c’était une création hybride, guerrière, pourquoi pas. Là c’est le Tyrannosaure, celui du film de Spielberg, qui reprend in extremis son statut de « roi de la jungle » qui feint d’être mort sous les coups d’un Giganotosaure. Manquait plus qu’un clin d’œil. Et un hug avec son nouveau copain, le Therizinosaure. Tranquilou bilou. Un nanar à 165 millions, quand même.
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