Rendez-vous.
7.0 Tout est dit dans le titre à savoir qu’on ne verra de ces deux personnages, ce quadra marié (Vincent Macaigne) et cette quinqua célibataire (Sandrine Kiberlain), que ce qui touche à leur liaison, les dates de leurs rencards et les différents lieux qu’ils arpentent. C’est tout. Il y a des ellipses plus ou moins conséquentes, des rendez-vous dérobés plus ou moins étirés, aucune autre règle sinon celle de suivre Charlotte & Simon, uniquement quand ils se voient.
Un peu comme si Chronique d’une liaison passagère était le pendant léger et inversé de Nous ne vieillirons pas ensemble, qui était plutôt la chronique d’une désynchronisation conjugale. La comparaison s’arrête évidemment là, et si l’on doit rattacher le film d’Emmanuel Mouret à un cinéma ce serait peut-être celui de Woody Allen (renforcé par la séquence bergmanienne à l’Escuriale) et encore je n’en suis pas si convaincu.
Ce procédé narratif est d’autant plus probant ici qu’il génère la sensation que le film parle de la conception des films de son auteur, qui n’aura eu de cesse de répéter ses récits et motifs, de films en films, en changeant quelques notes, montant ou descendant d’un ton. Chacun aura ses préférences, mais la quasi-entièreté de sa jeune filmographie s’avère plutôt cohérente, c’est sans doute pour cette raison qu’il a maladroitement tendance à être rapproché de Rohmer.
Comme toujours chez Mouret, les mots sont rois, la légèreté côtoie la gravité, le cadre est d’une précision d’orfèvre mais jamais il avait été si précis dans ses plans et leur durée. C’est vraiment sublime de bout en bout. Souvent drôle bien sûr, avant que ça ne devienne très touchant. J’adorais déjà les premiers Mouret puis il m’avait un peu perdu, mais là il signe à mes yeux ses deux plus beaux films coup sur coup, après Les choses qu’on dit les choses qu’on fait. Deux films très différents par ailleurs, puisque l’épure de l’un répond au dispositif choral de l’autre.
Pour que le film fonctionne, et il fonctionne, surprend, par sa drôlerie et sa mélancolie, il faut aussi deux acteurs en état de grâce. On retrouve le Vincent Macaigne, qu’on adore depuis Un monde sans femmes & La fille du 14 juillet, depuis dix ans donc, mais un petit mot sur Sandrine Kiberlain, qui est toujours très bien, mais c’est la première fois qu’elle est si lumineuse, resplendissante, habitée, une vraie révélation sous la caméra de Mouret avec qui elle tourne pour la première fois.
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