Upside down.
3.5 Lors de sa sortie en salle, j’y étais allé fissa, avec un mélange d’excitation et de désarroi : voir un remake de l’un de ses films préférés c’est une expérience aussi étrange que d’assister à l’adaptation d’un roman auquel on tient, j’imagine. J’avais vingt ans, j’avais trouvé ça atroce. En dix-sept années, sensibilités et exigences évoluant, je me suis dit, tiens, et si je revoyais Poséidon. D’autant qu’aujourd’hui je le revois en ayant conscience qu’il s’agit d’un film de Wolfgang Petersen. À l’époque je n’en savais strictement rien, je ne m’intéressais pas encore aux auteurs. J’irais pas jusqu’à le sauver aujourd’hui sur ce simple postulat (j’ai tellement aimé revoir son Histoire sans fin, par ailleurs) mais disons que, d’une part, j’ai dépassé le stade de l’attente fébrile du remake. D’ailleurs il reprend l’original dans les grandes largeurs (le bateau à l’envers, la vague, le groupe, l’enfant, les deux figures héroïco-paternaliste…) mais c’est tout. On ne retrouve pas grand-chose du chef d’œuvre de Ronald Neame. On a donc un banal film catastrophe early 2000′s qui n’est pas plus honteux qu’un 2012 ou un San Andreas. Et d’autre part, j’ai eu le plaisir de reconnaître un peu Petersen (qui n’est pas un auteur très identifiable, si ce n’est son appétit pour la catastrophe) là-dedans, notamment dans sa maîtrise des espaces exigus, son atmosphère claustro et aquatique (la cage d’ascenseur de service, le conduit de ventilation, le remplissage du ballast : les trois meilleures scènes, de loin) qui n’est pas sans rappeler son chef d’œuvre, Das boot. Les problèmes, le film en est rempli. Ne pas le comparer à l’original, ne pas le comparer à l’original… Tant pis, pas le choix : La mise en place est ratée, quinze minutes de vide. Les personnages sont nuls, antipathiques, on ne connait rien d’eux, on tremble pour aucun d’entre eux (Rendez-nous le révérend Scott, Rogo, Suzanne, Robin, Belle, Linda…). La musique est nulle : une bouillie qui semble avoir été conçue par une IA. La scène pivot est nulle, la vague un immonde énorme machin numérique. Les effets spéciaux sont permanents donc grossiers. On n’a jamais la sensation que le bateau est retourné. Et le film sent trop l’artificiel : on ne ressent pas la chaleur, la montée des eaux, la durée, chaque lieu traversé. Rien. C’est d’une tristesse totale. Je pense que Petersen voudrait à la fois refaire L’aventure du Poseidon, La tour infernale et Titanic (le film est parsemé de clins d’œil variés) dans une version archi pyrotechnique et pachydermique qu’il n’arrive à la cheville d’aucun d’entre eux. Il y a des trucs, on se demande comment ils ont osé, à l’image de la scène d’apnée beaucoup trop LONGUE pour toute personne normalement constituée, ou cette obsession pour faire trinquer les latinos en premier, ou le chapelet utilisé pour dévisser la grille : grand moment de frisson de la honte. C’est un mauvais film catastrophe, toutefois ça ne m’a pas du tout agacé, cette fois.