Maman a tort.
1.0 Les promesses qui parsemaient l’inégal Hérédité et la maestria fulgurante de Midsommar avaient provoqué une considérable attente en ce troisième film. Le film-monstre promis et sa virtuosité tant vendue accouchent d’un pensum terrible, mêlant culpabilité œdipienne et misanthropie hallucinogène.
Or, le malaise, qui habitait si passionnément Midsommar, s’est évaporé dans un ennui aux relents freudiens caricaturaux. Trois heures interminables d’un cauchemar géant, véritable chemin de croix (pour Beau, pour nous aussi) de 2h58 devant lequel on ressent l’audace – Aster est un vrai faiseur d’images, un néo Kubrickien disons – mais tout est tellement lourd, mal branlé, qu’il n’en reste qu’un machin ridicule, bardé de références mal digérées, entre Kafka et Buñuel.
Aster se prend donc comme un artiste alors qu’il avait jusqu’ici troublé par son équilibre entre virtuosité et humilité. Le film manque clairement d’un producteur qui aurait eu l’intelligence / le pouvoir de dire « ici il faut couper ». Beau is afraid s’étire en permanence pour pas grand-chose, si ce n’est pour accentuer le malaise. Il faut croire qu’Aster mange dans la main d’A24, qui lui garantissent un budget confortable (cinq fois supérieur à son film précédent) et une durée libre.
J’ai eu la pénible sensation d’assister aux confessions d’un type qui placarde sur écran – avec un Joaquin Phoenix insupportable, comme d’habitude – toutes ses névroses et qui ferait mieux d’aller chez un psy plutôt que de nous faire endurer ce / son calvaire. J’ai aussi beaucoup pensé à cette daube de Charlie Kaufman, Je veux juste en finir. Moi aussi je voulais juste en finir. Bref, je suis tombé de bien haut.
J’ai par ailleurs revu Midsommar depuis (qui reste un film fort et important à mes yeux) et bien c’est comme si Beau is afraid avait un peu déteint dessus, tant je suis gêné par des choses qui ne m’avaient pas du tout dérangé la première fois, les prémisses de ce qui me gonfle prodigieusement dans Beau is afraid. Bref faut peut-être pas que je revoie de sitôt du Ari Aster…