• Accueil
  • > Archives pour février 2024

Archives pour février 2024



Un métier sérieux – Thomas Lilti – 2023

02. Un métier sérieux - Thomas Lilti - 2023Ça commence hier.

   6.0   On retrouve tout le cinéma de Lilti qui était jusqu’ici concentré au domaine de la médecine, dans Hippocrate, Médecin de campagne ou Première année. Le voilà intéressé par un autre corps social, le corps enseignant. Peut-être une nouvelle trilogie chez les profs ?

     Le film est charmant, bien interprété, parfois bien écrit, parfois moins. En fait Lilti voudrait à la fois faire un film choral mais aussi un film de potes mais aussi un récit d’apprentissage, mais aussi parler des familles éclatées. Ça fait beaucoup en une heure et demie. J’aurais tendance à penser que le récit se déploierait mieux en format série, Lilti ayant prouvé avec les deux (bientôt trois) saisons d’Hippocrate qu’il était bien plus à son aise avec ce système de narration / construction.

     Il en ressort un film avec une regard de médecin, de diagnostiqueur, pourtant Un métier sérieux tire des portraits qu’il peine à faire incarner, des situations qui auraient mérité d’être étirées. Au hasard le personnage du prof d’histoire (campé par un bon Cluzet, même en bougon) et ses rapports compliqués avec son fiston. Au hasard cette sortie surf, complètement bâclée, ratée, inutile. Au hasard l’idée centrale, archi classique, de Benjamin (Vincent Lacoste) qui joue un professeur remplaçant et nous sert de boussole. Comme c’était le cas dans Hippocrate, où il incarnait le nouvel interne. C’est encore la facilité du récit d’apprentissage.

     Mais souvent, ce qu’il effleure ou creuse un peu, est très beau. Notamment tout ce qui tourne autour du conseil de discipline d’un gamin. Ce qui m’a séduit c’est sa volonté de montrer la vie, parfois compliqué, parfois chaotique, souvent solitaire, de chacun de ses personnages. Et son désir d’en créer une petite famille, par la force des choses. Je trouve qu’il réussit bien ces moments-là, notamment ce petit débat improvisé en bouffant un fast food dans le logement de fonction de l’un d’eux. Je ne suis pas prof mais ça m’a semblé assez proche de ce que j’imagine être le quotidien précaire d’un prof, d’un groupe de profs.

     Et donc malgré ses défauts ça m’a bien plu. D’une part car j’y ressens son engagement : Le film ne cesse de montrer comment tout délaisse, déclasse, fragilise ce métier de passion, de vocation, qui semble ne plus avoir rien de sérieux pour personne, comment les professeurs même les plus passionnés peuvent être amenés à vaciller. D’autre part car c’est un beau film populaire et fédérateur, avant tout, un peu comme ce que font Toledano et Nakache, mais plus à gauche, disons.

De grandes espérances – Sylvain Desclous – 2023

12. De grandes espérances - Sylvain Desclous - 2023Trahie.

   6.0   Tout juste diplômée de Sciences Po, Madeleine prépare les oraux de l’ENA en Corse avec Antoine, son amoureux. Un matin, sur une petite route déserte, le couple se trouve impliqué dans une altercation qui tourne au drame. Leur couple et leurs ambitions en seront mis à mal. Étrange titre dickensien pour un film qui n’aura aucun rapport avec le récit du romancier britannique. Ça commence comme un très mauvais film de gauche, une scène de diner très embarrassante, caricaturale, entre jeunes idéalistes et vieux bourgeois, riches et pauvres. Et ça se termine comme un excellent film de droite, du moins un film qui dit que la seule façon de s’en sortir, en politique et en justice, c’est par le mensonge et en ayant les mains sales. Je schématise mais il y a un peu de ça : en effet le film est de plus en plus intéressant à mesure que son personnage perd son idéalisme et gagne en opportunisme. Ou plutôt quand le thriller et la peinture sociale parviennent à s’emboiter, que les personnages gagnent en complexité, au travers notamment de leurs origines sociales. C’est aussi un beau film sur la trahison, amoureuse et politique. Les acteurs sont tops, aussi bien Marder et Lavernhe que Bercot et Barbé.

L’audition (Konkurs) – Milos Forman – 1964

03. L'audition - Konkurs - Milos Forman - 1964Illusions perdues.

   6.5   Le deuxième moyen métrage, L’audition, suit une séance d’auditions de jeunes chanteuses qui cherchent à intégrer le théâtre Semafor de Prague. Une jeune femme demande un jour de congé à son patron, sous prétexte qu’elle doit se rendre au tribunal. Elle ira à cette audition où une autre demoiselle, Vera, a perdu sa voix. La jeune femme ne sera pas choisie pour autant.

     L’idée pour Forman est avant tout de filmer l’ambiance de ce cabaret, l’effervescence provoquée par la foule d’apprenties chanteuses, dans une approche éminemment documentaire tant le film fait office de faux reportage, captant la spontanéité des gestes, des visages, des regards. Et la douce cruauté du réel. Très beau.

Ah s’il n’y avait pas ces guinguettes (Kdyby ty muziky nebyly) – Milos Forman – 1964

02. Ah s'il n'y avait pas ces guinguettes - Kdyby ty muziky nebyly - Milos Forman - 1964La visite de la fanfare.

   6.0   Prévu un petit cycle Forman, me permettant de découvrir trois de ses premiers films tchèques puis de revoir trois de ses plus célèbres. Jamais été très intéressé par le cinéma de Forman, j’avoue et j’aimerais savoir pourquoi voire, je l’espère, l’appréhender autrement.

     Ah s’il n’y avait pas toutes ces guinguettes fait dorénavant partie, en tant que complément de programme introductif, de L’audition, qu’il réalise la même année. Les deux films, si on les regarde à la suite, se marient bien.

     Ici on suit deux ados ayant chacun intégré une fanfare locale, en prévision de participer au Kolin de Kmoch, un prestigieux festival. Les deux garçons décident in extremis de participer à une course de motos.

     Portrait en creux d’une jeunesse éprise de liberté, ce moyen métrage saisit la violence d’une répétition d’orchestre d’un côté et l’univers des courses de moto de l’autre, dans un registre pleinement documentaire, quand bien même il y ait ouvertement de la fabrication.

Wonka – Paul King – 2023

35. Wonka - Paul King - 2023Pas si gourmand.

   5.0   J’ai d’abord cru que ce film sur la jeunesse de Willy Wonka serait ma grande vengeance sur la boursouflure indigeste qu’en avait jadis tiré Tim Burton. Le film de Paul King est plus épuré dans ses textures, sa mise en scène, son univers, plus homogène dans son dessin musical (très comédie musicale voire spectacle de Broadway via les compositions de Neil Hannon) et ses couleurs, son esthétique d’ordre général. Les effets visuels sont discrets. On y respire. Et l’on retrouve par la même occasion le charme british qui habitaient les deux beaux volets de Paddington. Mais par manque de noirceur, la magie se fane quelque peu au fil du film. Tout se dilue, tout y est finalement assez fade, guimauve là où au préalable on y ressentait la cruauté chère à Roald Dahl. Certes c’est pour le jeune public et c’est nettement plus digeste que la ganache écœurante avec Johnny Depp. Mais à moi il manque le plaisir premier degré – j’en ai pris par l’intermédiaire des yeux de ma fille, essentiellement – que Paddington (le 2 surtout) avait trouvé. Pour finir, deux points positifs surprenants : d’une part j’étais prêt à faire de Timothée Chalamet ma nouvelle tête de turque, mais non il s’en sort bien, en grande partie car il ne dévore pas l’écran, laisse de la place à tous les autres personnages, conférant à l’adage laissé par la mère de Wonka (l’idée du partage) sa vraie valeur ; et d’autre part, Hugh Grant en Oompa Loompa, très bien. Les enfants ont aimé. Ma fille à la fin : « ça donne envie de revoir Charlie et la chocolaterie ». Ouiiii… enfin non.

Pattie et la colère de Poséidon – David Alaux – 2023

34. Pattie et la colère de Poséidon - David Alaux - 2023Comme des mythes.

   5.0   Ou l’histoire d’une petite souris, érudite et curieuse, ayant lu tous les livres de la bibliothèque de Yolcos, ville portuaire de Grèce antique, qui deviendra une grande aventurière en venant en aide à Jason et ses vieux argonautes – bien après l’histoire de la Toison d’or – dans une expédition folle visant à sauver la cité du courroux de Poséidon en lui offrant une statue digne de celle que le village offrit à Zeus. C’est rythmé, jamais agressif visuellement, ludique, doté de jolis personnages secondaires dont un super chat végan, le tout parsemé de quelques références cinéphiles pour les grands. C’est mignon comme tout.

Une affaire privée – Guillaume Nicloux – 2002

31. Une affaire privée - Guillaume Nicloux - 2002Désenchantés.

   4.0   Guillaume Nicloux, pour moi, c’est un peu comme Fabrice du Welz, j’aime beaucoup les entendre parler de cinéma, je ressens la passion, mais leurs films me semblent tous plus ratés les uns que les autres quand j’y songe. Et pourtant je les suis, je continue de voir ou rattraper leurs films, je ne désespère pas car une fois encore, j’aime leur sincérité à l’ouvrage. Une affaire privée est sans doute le meilleur Nicloux vu à ce jour (mais il faut vraiment que je voie toute sa première partie de carrière) et pourtant je trouve le film assez raté dans l’ensemble. S’il fait illusion, je crois, c’est que le genre convient parfaitement à l’ambiance et l’écriture très flottante de son auteur. Évidemment il est loin d’Altman mais son histoire de privé a quelque chose de vénéneux, d’assez intriguant. Lhermitte est super dans le rôle de ce privé désabusé, anti-glamour. C’est pas toujours le cas de tout le monde dans le film, c’est déjà un problème – et pourtant y a du beau monde : Cotillard, Cornillac, Clément, Balibar, Le Bihan, Daroussin, Diefenthal, Todescini, Nahon, j’en oublie. L’autre souci, plus problématique, c’est la mise en scène de Nicloux, jamais cohérente, un peu trop instinctive, remplie de mouvements de caméra sans intérêt. Le film ne respire jamais. C’est sans doute voulu mais je trouve ça contre-productif dans le genre, qui requiert qu’on croie en ces lieux, ces personnages, afin qu’on y glisse nous aussi, au diapason du personnage.

Laissons Lucie faire ! – Emmanuel Mouret – 2000

33. Laissons Lucie faire ! - Emmanuel Mouret - 2000Plus frêle la vie.

   4.5   Lucie vend des maillots de bain sur la plage. Lucien, son compagnon, qui devait au préalable être gendarme a choisi lui de « profiter de la vie » c’est du moins ce qu’il raconte en guise de couverture puisqu’il se retrouve agent secret sous le nom de code IlFaitBeau. Il faut évidemment s’imaginer Mouret à la barre d’un projet aussi farfelu, léger, pur vaudeville, solaire, complètement sans conséquences. On reconnaîtra davantage l’influence de Rohmer dans son très beau film suivant (Vénus et Fleur) même si l’on peut déjà ici entrevoir les restes de Conte de printemps ou L’ami de mon amie. Les personnages et situations sont tout de même très niais et traités par-dessus la jambe. Premier long métrage de Mouret (le seul qui me manquait), on sent qu’il se cherche. Il se trouvera bientôt. Heureusement, il y a Marie Gillain, qui illumine chaque scène (dans lesquelles elle apparaît) d’un film, à mon humble avis, aussi paresseux narrativement que visuellement.

Snobs ! – Jean-Pierre Mocky – 1962

32. Snobs ! - Jean-Pierre Mocky - 1962Les quatre cavaliers de l’apocalypse.

   4.0   Dans l’une des nombreuses brèves scènes du film, un moment donné, au cours d’un match de boxe, quelqu’un dit « leurs uppercuts sont un peu mous ». Eu la sensation que cette réplique d’apparence anodine définissait le film pour ne pas dire tous les films (ou presque) de Mocky. Oui c’est punk, irrévérencieux mais tellement brouillon et inachevé, tout de même.

     Le directeur d’une laiterie s’est noyé dans une cuve de lait. Dufaut, Tousseur, Lainé et Courtin (« J’crois même qu’y avait Franquart, c’est pour te dire! »), candidats postulants à son remplacement, vont se manipuler les uns les autres, pour obtenir le poste.

     Troisième film de Mocky, cette comédie méchante en forme de lutte pour le pouvoir, fait le portrait d’une société du profit : récit choral parsemé de personnages picaresques, individualistes, adoptant des stratégies toujours plus sournoises. De chouettes idées visuelles évidemment. Volontiers absurdes comme il faut. Et du texte. Mais ça manque d’une ligne claire, qui ferait moins passer l’ensemble pour un défilé de saynètes incongrues à peine liées entre elles.

L’œil qui traîne – Stéphane Brizé – 1996

30. L'œil qui traîne - Stéphane Brizé - 1996Seul contre tous.

   6.0   Le drame social et le monde du travail étaient déjà au cœur de ce second court métrage signé Stéphane Brizé. C’est surtout le portrait d’un homme de 28 ans, aigri, perdu, qui vit encore chez ses parents mais s’arrange pour ne pas les croiser, qui est amoureux d’une femme qui ne veut plus de lui depuis longtemps et qui cumule les petits boulots et s’échappe de cet enfer sociétal lorsqu’il joue du trash grunge sur une scène sans public. Si on entre dans le film sans en avoir eu la preuve concrète, on le sent habité d’une révolte sourde, une grande colère qu’il manifeste au détour de dialogues avec son ex-fiancée, avec son employeur, avec la clientèle du fast food qui l’emploi, avec un buraliste, avec un policier. Comme toujours chez Brizé c’est pas des plus subtil, mais cette plongée dans une spirale de l’échec, frontale, s’avère assez passionnante et terrifiante. Frédéric Pellegeay en impose.

123

Catégories

Archives

février 2024
L Ma Me J V S D
« jan   mar »
 1234
567891011
12131415161718
19202122232425
26272829  

Auteur:

silencio


shaolin13 |
Silyvor Movie |
PHILIPPE PINSON - ... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Playboy Communiste
| STREAMINGRATOX
| lemysteredelamaisonblanche