Fenêtre sur salon.
5.5 À l’origine il y a un roman graphique – que je rêve de lire – du même nom, signé Richard McGuire. L’idée c’est d’abord un lieu. Plus inédit, l’autre idée c’est un angle inchangé. Ainsi, les cases (chez McGuire) et les plans (chez Zemeckis) sont observés d’un point de vue identique et immobile. Il s’agit donc du récit d’un lieu, à des époques variées, selon un ordre non chronologique. Idée géniale qui semblait bien casse gueule à l’écran, surtout venant de Zemeckis, qui n’est pas un spécialiste du plan fixe.
C’est un film courageux et hybride en ce sens qu’il tente d’être expérimental et populaire à la fois. Malheureusement la mayonnaise prend difficilement. Le problème majeur pour moi c’est qu’il n’y a pas de durée, jamais. Une vignette en supplante toujours une autre. J’ai l’impression que chaque morceau est uniformisé, semblable au précédent et paradoxalement il me semble que Zemeckis s’intéresse pas vraiment à l’histoire du peuple indien ni à sa famille d’afro-américains.
Celle qui le drive c’est celle qui s’étire sur trois générations, avec Tom Hanks et Robin Wright, le couple de Forrrest Gump. Les retrouver ne produit absolument rien sur moi, sans doute car, aussi bien fait soit-il, le de-aging me gêne constamment. Je suis toujours en train de me dire à quel point c’est bien fichu et bizarre à la fois. Ça me tient continuellement à distance. Les petites fenêtres qui s’ouvrent systématiquement dans les plans pour ouvrir sur une autre temporalité m’empêchent aussi de me plonger dans une époque ou une autre, je n’ai jamais le temps. Tout me paraît beaucoup trop écrit et fabriqué.
Et pourtant le film a fini par m’émouvoir d’une part lors de la scène du gâteau d’anniversaire, puis dans l’avant-dernier plan, qui surprend et qui donne les clés du projet : filmer la mémoire d’un lieu. Il y a aussi une scène formidable avec un miroir. Et une fenêtre qui apparaît dans le miroir. Il y a l’idée géniale que cette femme n’a jamais vraiment voulu vivre ici, qu’elle a fini par avoir ce lieu en horreur. Il y a plein d’idées, tout le temps, Zemeckis est un super cinéaste. Et je resterais toujours curieux de voir son prochain projet.