L’étang moderne.
5.5 La recette est familière, son efficacité prévisible : Après le plus consensuel Au revoir, là-haut, Adieu les cons renoue avec la verve anar de Dupontel : acerbe, hystérique, absurde, burlesque, virtuose. Dans la lignée tonale du dernier Délépine & Kervern (Effacer l’historique) mais en mieux – Ce n’était pas bien compliqué – et dans la lignée formelle d’un certain Jeunet, son pote, auquel on pense beaucoup, notamment Le fabuleux destin d’Amélie Poulain : On y retrouve cet attachement aux laissés pour compte, son rejet des grands bonnets du système, un appétit pour les gueules, les répliques fulgurantes, mais aussi, davantage sur le plan technique, un goût pour le trop-plein, des plans abracadabrants, des running-gags, pirouettes scénaristiques proposées par des coïncidences motrices, des flashbacks à gogo. Et une volonté de relayer des objets / lieux utiles : Un fusil, un ordinateur, un dossier, un journal intime, une lettre d’amour ; Le bureau des services d’administration, la cave des archives départementales, l’ascenseur d’une tour. C’est du cinéma bourrin, mais généreux. Et si son héritage se réclame davantage des pitreries de Gilliam (qui fait une apparition ici d’ailleurs, et le film fait aussi de nombreuses références à Brazil) que de celles de Chaplin, on peut entrevoir parfois une mécanique proche de celle du génie du muet, sans doute parce que le film, c’est sa grande qualité, respire l’enthousiasme et la sincérité. Disons qu’on comprend, devant, pourquoi Dupontel n’était pas présent à la cérémonie des Césars où il rafla tout, tant le film ne cesse de chier sur « les institutions » de manière générale. Rollercoaster effréné, Adieu les cons ne lésine sur rien, mais peut-être que sur ce coup-là cette quête du fils, avec un duo insolite (Effira/Dupontel, ça fonctionne super bien) entre une femme qui va mourir et un homme qui veut mourir, tous deux associés à un archiviste aveugle extra-lucide (Nicolas Marié, pitre désopilant) trouve une forme d’aboutissement comique sous la caméra de Dupontel. Il me semble qu’il y donne tout, cette fois, avec ses limites comprises : Sa mécanique burlesque désuète (des policiers débiles, un aveugle qui se cogne, un médecin illisible), sa non-subtilité pour brosser des caractères secondaires (flics, patrons mais aussi ceux qu’il défend, amoureux transi, vieil amnésique) et son nihilisme compassé, certes le film est un peu anar-vieillot dans son fond mais il est toujours en mouvement, plein de trouvailles, d’instants très drôles. Qu’importe, j’y allais le couteau entre les dents – euphémisme – mais j’ai trouvé ça très réussi, pour du Dupontel.