Y a pot !
7.5 Ce qui a changé pour cette seconde salve ? Peu de choses, mais trois points importants tout de même : La direction artistique, d’abord, magistrale et une réalisation plus sobre, plus élégante, en un mot plus appropriée à l’univers dépeint, prouvent que le choix d’engager Alexis Charrier à la place d’Alexandre Courtès (qui faisait du bon boulot avant, hein) est la riche idée de cette saison mieux agencée, mieux rythmée. Puis, il y a la musique de Nicolas Godin, qui passe d’élans bossa à des saillies jazz à quelques trouées funk avec un raffinement confondant – a noter qu’écouter la bande originale seule est un plaisir pour les oreilles au moins aussi fort que de l’avoir en compagnon idéal pour (quasi) chaque séquence. Enfin, comment ne pas évoquer la présence presque systématique d’un trio fantoche, qui s’avérait déjà savoureux lors de la première saison mais qui prend du galon : Jacquart, Calot et Moulinier. « Je crois même qu’y avait Franquart, c’est pour te dire ! » On les retrouve en mission à Cuba puis en module à Moscou « C’est beau la Pologne ! » Franchement je ne me lasse pas de ce trio. Leur escale à Berlin ou leur entretien avec les indépendantistes québécois, c’est génial. Ensuite il y a plus de place aux personnages féminins, notamment (la belle) Marie-Jo qui se voit promue espionne et Irène, la femme du colonel Mercaillon, qui demande le divorce et en pleine libération sexuelle, s’en va succomber aux charmes de Moulinier. De son côté, Merlaux est pris entre une infiltration du KGB et l’éternelle interrogation sur l’identité de son père. Bref, réussite totale. Double tamponné, donc !
Publié 13 décembre 2015
dans Au service de la France et Séries
« Tamponné. Double tamponné. »
6.5 Paris, 1960. André Merlaux est recruté comme stagiaire au sein des services secrets. Destiné à devenir un espion, il doit apprendre le fonctionnement, les rouages, épaulé par trois agents suffisants, des assistantes mystérieuses, un colonel inquiétant. En bon élève, à son arrivée Merlaux répond au téléphone, première erreur. « La logique m’échappe (…) Vous n’êtes pas à la sécurité sociale Merlaux » lui dira Moïse, le directeur des opérations, un peu dégouté de devoir recevoir la délégation du Dahomey venue quémander son indépendance. Plus tard, alors qu’il semble faire seul des heures supplémentaires dans le vide, Marie-Jo s’en inquiétera : « Vous êtes encore là ? Il est pourtant presque six heures moins vingt ! » avouant aussi une autre fois qu’on finit plus tôt le jeudi afin de préparer comme il se doit le pot de vendredi. On est donc chez les feignants, pas vraiment ce à quoi nous ont habitué les films de CIA. Mais on se rapproche du climat OSS117, avec ces agents simplets, ringards et réacs, champions de la vanne sur les complets bleus, rien d’étonnant puisque Jean-François Halin en était aussi le scénariste. Ce qui a changé ici, concrètement ? L’absence de Jean Dujardin, quoique le jeune Hugo Becker s’en sorte très bien. C’est surtout une question de mise en scène. Là où Hazanavicius parvenait à insuffler un rythme énorme, avec plein de changements de ton, des répétitions savoureuses, un comique subtil de l’enchainement, Au service de la France perd sur la durée, ne parvenant pas créer un véritable élan, soit en étant trop courte (regarder un épisode n’est vraiment pas suffisant) soit en s’embourbant sur la longueur (En découvrir quatre successivement comme le proposait chaque semaine Arte crée un peu de lourdeur). Et Alexandre Courtès fait le job mais peut-être un peu trop bien le job, justement. On voudrait que ça déborde et surprenne davantage. L’épisode à Alger apporte une rupture bienvenue, A bout de souffle dans un autre fait aussi beaucoup de bien à une dynamique moscovite assez faiblarde. On en voudrait encore. Davantage. Eh bien la série va nous l’offrir. Dans le dernier tiers, chaque épisode est meilleur que le précédent, ouvrant à la fois des tiroirs scénaristiques à faire rougir n’importe quel opus de James Bond et se libérant dans une vivacité d’humour qui fait un bien fou, qu’on n’avait pas entrevu depuis Le Caire, nid d’espions. Ici, on détourne un avion vers Londres pour assister au match de Rugby France/Pays de Galles ; là on évalue le service, plongé en plein code taupe, grâce à un détecteur de mensonges. Et la série se ferme provisoirement (espérons une saison 2, bordel !) sur un stratagème archi complexe qui s’achemine vers une résolution kafkaïenne qui prend des proportions aussi fortes qu’inattendues. Bref, c’est top.