Publié 2 octobre 2023
dans Catherine Breillat
Sous le vernis bourgeois.
6.0 Sur un canevas scénaristique un peu clichetoneux, Catherine Breillat livre un film à son image. Un film sur la bourgeoisie, mais plus vénéneux que bourgeois, quelque part entre Chabrol et Verhoeven, et pas du tout calibré choc ou sulfureux pour se donner un genre. Exemple, dans les scènes de sexe il y a surtout une volonté de filmer moins l’acte que les visages déformés par l’acte. De la même manière elle prend le temps de disséquer ces mêmes visages durant les dialogues ou les moments plus silencieux. Je suis globalement peu ému par le film mais je trouve ça impressionnant. Et si j’aime assez peu le cap pris lors de la scène pivot, le fait qu’il débouche en écho distordu sur une scène finale si belle me la rend finalement passionnante, grâce en grande partie au personnage du mari, incarné par un Rabourdin, comme à son habitude, brillant. Le dernier plan, brillant, au sens propre, est très fort.
Publié 11 novembre 2018
dans Catherine Breillat
Le livre du désir.
4.0 Au-delà de ses lourdeurs, Romance, comme les autres films de Breillat, distille une atmosphère singulière et ne ressemble à rien de ce qu’on connait. Il y a déjà un désir de filmer le sexe et de le mettre à l’intérieur d’une chronique de personnage, de filmer une émancipation, de filmer un désir d’aimer, d’être aimé, un désir de baiser. Dommage qu’il faille en passer par cette voix off omniprésente et logorrhéique, dommage que Breillat veuille à ce point jouer sur une provocation d’adolescente pour garnir le tableau. Ce n’est d’ailleurs pas tant la présence de Rocco Siffedi qui dérange, au contraire, les séquences avec lui sont assez jolies, d’autre part il ne semble pas uniquement là pour montrer son gros gourdin. C’est plutôt tous ces moments inutiles qui gênent, notamment quand on découvre que la jeune femme est institutrice et qu’on la voit faire cours à sa classe, alors que jusqu’ici on n’avait aucun repère social, disons. Je ne comprends pas bien la motivation de montrer ça, d’autant que le film ne se revendique jamais du naturalisme, sauf là et parfois ailleurs, pour dire quoi ? Qu’une instit peut avoir une émancipation sexuelle ? Merci du tuyau, Catherine. Alors dès que le film vire à l’ambiance sado-maso avec l’arrivée dans le récit de François Berléand, je trouve ça définitivement du côté de la pose, de la petite provoc de bas étage, bref de la branlette, sans mauvais jeu de mot. Reste un film à l’ambition étonnante, en marge (la réconciliation du cinéma et du sexe, peut-être ?) mais noyé sous un flux théorique franchement embarrassant.
Publié 3 février 2017
dans Catherine Breillat
Conte cruel de la jeunesse.
6.0 Franchement j’ai rarement autant ressenti la tension à la limite du soutenable devant un film, que durant ce trajet de retour qui occupe le dernier quart. Il ne faut pas grand-chose à Breillat et surtout pas des éléments superflus style musique et autre stridence. Simplement une femme et ses deux enfants, dans leur voiture, doublant les camions, se faisant doubler, parfois klaxonner, s’assoupissant, s’arrêtant sur des aires de repos. C’est tellement puissant d’avoir réussi cela que son accomplissement m’a dérangé par son extrême cruauté. Ça et le fait que je ne vois pas trop ce que l’aspect « faits divers » vient faire là, sinon qu’il n’est que parti pris cynique, ce même si cette violence, brutale, soudaine, délaisse le film dans une aura fantastique, quasi cauchemardesque, qu’il avait déjà instauré dans ces longues séquences de séduction (Dont la première nuit entre Elena & Fernando, interminable et géniale, donc) et dans cette bulle familiale, aux quatre solitudes, qui occupe le reste du film.
Je ne suis pas un habitué du cinéma de Breillat puisqu’avant celui-ci, je n’avais vu que deux films : Une vieille maitresse et Abus de faiblesse. Deux films intéressants, surtout le premier, qui ont laissé leur trace, pas une grande trace, mais la marque d’une cinéaste en marge, qui ose des choses. J’ai entendu parler de Romance ou Anatomie de l’enfer, évidemment, je sais donc que Breillat a aussi une filmo très portée sur le sexe, saisi dans toute sa crudité, puisqu’ayant recours à des actes ouvertement non simulés. A ma sœur pourrait faire office de trait d’union dans la mesure où rarement on avait pu voir de cette manière-là, ce jeu de séduction sexuel entre un homme et une femme, ni cette discussion autour de la « première fois » entre deux sœurs, que tout oppose. Le film parvient à saisir ce trouble adolescent, n’hésitant pas à passer d’une séquence hyper tendre (Des confessions nocturnes) à quelque chose de littéralement cruel (Elles s’en mettent des baffes !). Pour l’anecdote je comptais voir ce Breillat car je savais qu’il se déroulait en partie à La Palmyre, un lieu que je connais bien. Agréablement surpris d’y voir la jeune et déjà extra Roxane Mesquida. On verra ce qu’il m’en restera avec le temps, mais en l’état je vois de très belles choses là-dedans et d’autres qui me laissent un peu circonspect.
Publié 17 mars 2014
dans Catherine Breillat
3.5 Sur le papier j’étais très attiré par le nouveau Breillat. Maintenant que j’en suis sorti je suis incapable de savoir ce qui m’attirait tant. Bref, j’y suis allé pour cette attirance bizarre mais aussi et surtout parce que Breillat a réalisé un grand film il y a quelques années à mes yeux, Une vieille maîtresse. Erreur, car ce dernier est très mauvais. Il n’y a aucune idée de mise en scène ou s’il y en a (quelques unes) elles sont aussitôt tuées dans l’œuf par cette froideur calculée, cette écriture bien terne. Au début il y a des saillies fantastiques discrètes bienvenues. Puis elles disparaissent et il ne reste plus rien. La dernière demi-heure est un supplice. Et Huppert, Breillatisée à mort, est insupportable, elle en fait des tonnes.