Parfum de scandale.
7.0 Quelques minutes durant, j’ai bien cru que j’allais détester ça : L’emphase des postures figées, la rigidité du cadre, cette musique dissonante, cette texture clinique monochrome. J’ai pensé qu’on me faisait une mauvaise blague (Dans la lignée du THX1138, de Lucas) avec cette histoire de Prix Louis Delluc et de Césars – Il récolta les plus prestigieux : Film et réalisation. Mais assez vite, la réalisation de Christian de Challonge s’aère, mélange habilement les formes, brise crânement la construction, change le rythme – Un moment donné, il insère même un film d’animation pédagogique. Après avoir observé son licenciement froid et brutal d’une grande banque, le film accompagne Trintignant chez lui. On y découvre Deneuve, qui bien que peu présente à l’écran, tiendra ici un rôle fondamental, de déclencheur et d’accompagnant à la résistance, en somme. Sur le papier, traiter d’un scandale financier avec Deneuve, Trintignant, Berto (clairement, c’est Arlette Laguiller), Serrault et Brasseur, j’y crois moyen et pourtant ils sont tous absolument crédibles.
Évidemment, en s’appuyant sur le scandale de la Garantie foncière (1971) comme L’outsider s’appuyait sur celui de la Société Générale, L’argent des autres se parent des atouts de son utilité. Mais le fait que justement il parvienne à créer une autre histoire (qui ressemble à la vraie) avec l’ambition de mener une enquête à multiples personnages (comme autant d’entités hiérarchiques ornant une société bancaire) tout en jonglant avec l’intimité d’une victime bouc-émissaire qui ne se laisse pas faire, ainsi qu’avec une chronologie étonnante, lui fait prendre le risque de la singularité et celui du trip ouvertement kafkaïen. On trouve dans la forme autant une ressemblance avec la partie Bruno Cremer de l’ouverture de Sorcerer, qu’une plongée inextricable à la Monsieur Klein. Ça pourrait foirer mais ça tient (en partie parce que l’écriture est brillante, de bout en bout) d’autant que le film est meilleur à mesure qu’il se déploie, qu’il se dévoile.