L’attente des femmes.
7.5 Au départ, on pense comme d’habitude à cette impossibilité de mettre en images un texte de Marguerite Duras. On réalise pourtant vite que Emmanuel Finkiel s’en tire pas trop mal dans son style, nettement mieux que Rithy Pann quand il s’attaque au Barrage contre le pacifique, par exemple. Il capte quelque chose dans la non linéarité digressive, la plongée dans le souvenir, quelque chose qu’on voit peu au cinéma, quelque chose qui tient probablement beaucoup à Duras mais qu’il parvient à brillamment incarner à l’écran. On se dit qu’il reste un problème, à savoir les acteurs, enfin le fait qu’il y ait des acteurs, une Mélanie Thierry, Un Benoit Magimel : Quand Lazslo Nemes réalise Le fils de Saul, il choisit des inconnus et ça fonctionne. Duras en images ça devrait être comme chez Bresson, habité par des modèles. En revanche, une fois qu’on a fait ce deuil-là, accepté que Duras est inadaptable, réalisé que les acteurs sont hallucinants, absolument tous, le film est passionnant, toujours à la bonne distance, peu parasité par les ornements, c’est un film qui tient sa ligne de conduite, ne l’enfreint jamais. Homogénéité totale, dans ses plans, sa reconstitution, l’utilisation impeccable de la voix off. Si un jour je m’y replonge, je suis certain que je ne verrai plus ses menus défauts qui sont probablement moins de réels défauts qu’ils ne font partie intégrante de mes préjugés. J’avais tellement peur de ce truc. Adapter Duras, quoi. Et en fait j’ai pris une claque. Réalisation hallucinante, que des bons choix, beaucoup de longue focale pour masquer le manque de budget, et tellement bien utilisée comme j’avais rarement vu une longue focale si bien utilisée. Mélanie Thierry incandescente à tel point que c’en est flippant. Elle est Duras. Enfin voilà j’ai envie de le revoir tellement ça m’a semblé absolument parfait à tout point de vue.