Au feu, le pompier !
3.5 Un jour il faudrait que je revienne quelques instants sur Backdraft, mon Ron Howard préféré – sans doute car je l’ai beaucoup regardé étant gosse mais aussi parce qu’il m’avait impressionné lors d’une revoyure furtive il y a quelques années – qui outre son ampleur mélodramatique, sa forte dimension fraternelle (Russell/Baldwin), son monde d’hommes aussi badass que gay friendly et ses nombreux élans héroico-pyromaniaques, offrait une vraie place au feu, comme s’il était le personnage central du film, monstre insaisissable se régénérant par-dessous les portes au moindre souffle de courant d’air, filmé avec autant sinon plus de passion que les valeureux pompiers chargés de son extinction, par son réalisateur américain.
Tout ça pour dire que j’abordais Pyromaniac avec le souvenir du film de Ron Howard. N’ayant vu que le très dispensable Pioneer, d’Erik Skjoldbjærg, je ne m’attendais pas à grand-chose. Et une nouvelle fois c’est un film pas inintéressant sur le papier mais plombé par une mise en scène neurasthénique, avec de jolis plans de la campagne norvégienne ici, quelques impressionnantes scènes de feu là, mais d’une part tout est beaucoup trop bref et d’autre part ça se regarde trop le nombril : chaque mouvement de caméra est prévisible, chaque déplacement de personnage trop écrit, chaque silence beaucoup trop silencieux.
Sans parler de ces personnages mutiques et sans envergure qui traversent ce film finalement sans intérêt qui ne déroge jamais à son petit programme qu’on a compris dès les cinq premières minutes : Nous raconter qu’un jeune pompier, fils de chef des pompiers, brillant à l’école mais depuis très mal dans sa peau, très solitaire, très arc-bouté dans son cocon familial bourgeois, va prendre habitude à bruler des forêts puis des maisons, tout en éteignant les incendies avec son père et les volontaires du village, avant que tout cela n’éveille les doutes de ses proches et qu’il soit bientôt surveillé par une enquête policière. C’est tout. Et on s’en fiche globalement, c’est le plus triste dans cette affaire, ça ne débouche sur absolument rien qui éveille en nous la moindre curiosité ou émotion.
Alors certes, Backdraft et ses ressorts hollywoodiens bien bourrins ne brillait pas par sa subtilité, mais au moins ça vibrait, ça embrasait littéralement l’écran (On n’avait eu aussi chaud devant un écran, jamais senti autant le feu depuis les quelques saillies brulantes de L’aventure du Poséidon) et c’était constamment impressionnant (La séquence finale sur les passerelles d’un bâtiment industriel, notamment), c’était parcouru de larmes, de feu et sang, c’était presque un opéra ardent. Dans Pyromaniac, c’est plus ramassé, plus discret, plus norvégien et c’est finalement l’ennui qui gagne. Et pourtant, y a presque autant de musique illustrative que dans Backdraft, c’est dire.