La danse dans le temps.
5.0 J’ai d’abord subi la lourdeur du dispositif : cette pièce de théâtre transformée en pièce de cinéma forcée (mouvements de caméra improbables, plans virtuoses…) où chaque interprète effectue sa petite partition hallucinée, en musique, dans ce même dancing parisien. Et peu à peu, le geste m’a semblé plus intéressant que l’idée. J’ai été séduit par ce voyage à travers les époques : le front populaire, l’occupation, la libération, la culture américaine, la guerre d’Algérie, mai 68. À travers les genres musicaux : valse, jazz, rock, disco. De Bécaud à Trenet, de Paul McCartney à Ottawan. Chaque époque succède une autre via un instantané, qui se retrouve encadré, en photo, au-dessus du bar. Les interprètes ne changent pas, les personnages oui. C’est très lourd et répétitif, renforcé par un récit sans parole campé à l’emphase par sa vingtaine d’interprètes. Pas ma came globalement mais je trouve que le film ne ressemble à aucun autre, qu’il a une respiration bien à lui.
Publié 18 septembre 2014
dans Ettore Scola

Depression cherry.
6.5 Constituant le sommet anachronique d’un âge d’or de la comédie italienne autant qu’il marque de son désenchantement permanent l’épuisement du style, les illusions déchues, La terrasse est occupée d’une multitude de trublions dépressifs, de la chair triste qui semble avoir laissé échapper ses rêves et ses idéaux. Le film dépeint en étoile chaque individualité d’un cercle d’amis travaillant ou non ensemble mais se retrouvant régulièrement sur la terrasse d’une amie, pour une grande soirée-buffet habituelle, dissertant sur la chute gauchiste (on est à l’aube des années Berlusconiennes) et son impact général sur l’art. Le film est construit en cinq chapitres reprenant l’idée des films à sketchs, débutant chacun systématiquement par cette même soirée sur cette terrasse, tout en prenant chaque fois le parti de suivre le personnage qui sera le centre du nouveau chapitre. Trintignant en scénariste en panne d’inspiration (on lui commande du comique mais il ne veut pas faire rire) en fait des caisses, pas aidé par un doublage italien pour le moins excessif. Mastroianni, journaliste en pleine crise conjugale et Reggiani en fonctionnaire de la RAI dépressif obsédé par son poids, tirent leur épingle du jeu en offrant au film ses plus beaux moments, rempli de frustrations et de désillusions. Tognazzi, Producteur de cinéma puis Gassman, député communiste, ferment le film. C’est inégal, comme souvent avec ce procédé mais j’aime la dynamique globale du film. J’aime aussi beaucoup la présence fantomatique de Marie Trintignant, qui n’accompagne aucunement son père mais semble être le symbole du relais de génération, le constat d’un monde mourant car oui c’est surtout un beau film sur le vieillissement et l’échec. Sur l’agonie, conjugale, solitaire et professionnelle.