Le crépuscule.
8.0 Dans un hôtel prestigieux, un vieux portier extravagant – fier d’arborer sa réussite avec son uniforme d’officier général orné de broderies et épaulettes – est respecté de tous, aussi bien sur son lieu de travail que dans l’immeuble où il crèche.
Or d’emblée, deux mondes s’opposent. Il y a les riches de passage dans ce lieu de transit de luxe, qui passent les portes tambours et s’empiffrent de caviar et il y a les prolos engoncés dans un quartier caché, qui se croisent dans l’arrière-cour et font sécher leur linge aux fenêtres. Le personnage est à la jonction de ces deux univers.
Un jour, le portier éternel et jovial se voit destitué de son poste et par la même occasion, dépouillé de son apparat princier, parce qu’il a fait son temps, substitué par son double plus jeune, mais pour sa fidélité légendaire se voit attribuer le gardiennage des sanitaires.
La suite n’est qu’errance et souffrance d’un homme humilié, entre indifférence et mépris du monde, condamné à voler et porter son ancien uniforme afin de ne pas éveiller les railleries de son voisinage. C’est un grand film sur le vieillissement et la déchéance moral d’un homme. Un film truffé de trouvailles visuelles, avec parfois des plans déformés, une image titubante afin de capter les états d’âme du personnage.
Et surtout, aucun intertitre, c’est dire si Murnau croit au cinéma, aux puissances de la mise en scène. Enfin un seul carton intercalaire, tout de même – presque un pied de nez aux studios – juste avant l’épilogue, qui annonce que tout devrait mal finir, comme dans la vie, mais qu’au cinéma on peut inventer un happy end. Sublime.