Archives pour la catégorie Gilles Lellouche

L’amour ouf – Gilles Lellouche – 2024

03. L'amour ouf - Gilles Lellouche - 2024Violence et passion.

   5.0   Voilà un film en surrégime permanent, comme s’il voulait me prouver que passion devait obligatoirement rimer avec vitesse. Le cadre, les plans, les dialogues sentencieux, l’avalanche de morceaux d’époque : Tout est plein. C’est du cinéma de vignettes. Un peu comme le Polisse, de Maiwenn ou Les petits mouchoirs, de Canet. L’amour fou, dedans, je le cherche encore.

     Pourtant, en sortant de la salle je voyais surtout ce qui m’avait séduit : sa première partie adolescente, le jeu des deux gamins, la nostalgie 80′s, le dynamisme de la mise en scène, quelques jolies séquences détachées (celle sur A forest, de Cure, notamment, qui laisse à penser que le film n’ira jamais ou l’on croit qu’il va). Bref j’y ai pris du plaisir. Mais le film s’est complètement évaporé. Aussi bien pendant, dès la scène pivot qu’on attendait autrement au départ (quel procédé malhonnête…) que quelques heures après la projection où le souvenir du film s’est largement fait dévoré par celui d’Anora.

     Dorénavant je vois surtout cette obsession viriliste, le fantasme de cinéma américain un peu trop placardé et ces séquences un peu ratées, à l’image des scènes en miroirs des éclipses. Et puis cet amour fou manque clairement de subversion, c’est La fureur de vivre ou Bonnie & Clyde, mais la version dans laquelle les héros finissent heureux d’être manutentionnaires et de bouffer un fast-food en se disant qu’ils s’aiment.

     Il y a quelque chose d’assez faux là-dedans pour qu’on ne le prenne pas entièrement par le prisme du fantasme (un peu sans intérêt donc) pur dès la scène pivot : Cette idée ferait d’ailleurs écho double. D’abord au fait d’agir en contrepoint du livre, qui se termine mal j’ai cru entendre. Ensuite c’est raccord avec la toute fin (avant le « je t’aime » dans le fast-food), dans le centre de manutention. Jamais personne sortirait ce monologue, calmement. Et surtout, ce petit supérieur hautain n’aurait pas ce petit silence de compréhension et de peur. Ça n’existe pas dans la vraie vie. Accepter cela de façon théorique ça passe je trouve, au premier degré c’est quand même un peu compliqué.

     Le succès populaire et la joie partagée qu’il provoque me laisse coi, mais pas si surpris : C’est un film générationnel et décomplexé dans la lignée d’un Besson ou d’un Beineix de l’époque. Bref, l’amour selon Lellouche c’est pas mal, mais pas ouf. Je préférais nettement son Grand bain.

Le grand bain – Gilles Lellouche – 2018

23. Le grand bain - Gilles Lellouche - 2018L’effet aquatique.

   6.5   C’est peu dire que je n’attendais pas grand-chose d’un type qui avait co-réalisé Narco et le film à sketchs Les infidèles. J’ai surtout voulu voir si « on » (Cannes) ne s’était pas trop emballé à son sujet. Tout en étant curieux de voir un si chouette casting réuni. Il faut déjà dire que Le grand bain est un film de Gilles Lellouche, c’est son premier film en solo. Il en a même écrit les dialogues. Il aurait pu faire partie du casting – J’ai d’ailleurs cru qu’il en faisait partie, j’avais l’impression de le voir en slip/bonnet de bain sur l’affiche : En fait ce n’était pas lui mais Jean-Hugues Anglade, c’est troublant – puisqu’il est acteur en temps normal. Mais non, il a l’humilité de ne pas jouer dans son film qui réunit plein d’acteurs. Ce n’est certes pas toujours gage de qualité – Canet n’avait pas joué dans Les petits mouchoirs, par exemple – mais c’est tout à son honneur. Bref, ce Full Monty français et aquatique est une réussite. Sans trop revenir sur ses qualités (C’est rythmé, c’est hyper drôle, Philippe Katerine, tous les acteurs de manière générale) qui sont celles que doit avoir tout feel good movie, il y a tout de même des choses un peu gênantes, qui ne m’ont d’ailleurs pas trop gêné pendant le film, mais qui se réveillent quand j’y repense : Pourquoi Alban Ivanov et Thamilchelvan Balasingham n’existent pas en tant que personnages ? On a autant envie d’en savoir un peu plus sur eux que sur les autres, alors pourquoi eux, on ne les voit jamais hors de la piscine ? C’est d’autant plus rageant que les personnages travaillés (Ceux campés par Amalric, Poelvoorde, Canet, Katerine et Anglade) sont bien écrits, Lellouche parvient à transmettre leur univers à chacun, leur mélancolie, ce qui fait qu’ils sont tous plus ou moins dépressifs, mais aussi ce qui les fait tenir et les fait encore un peu rêver. Autrement j’ai beaucoup ri, aidé par une salle pleine (le film marche super bien non, pour faire salle pleine au bout de trois semaines ?) hilare, c’est vrai, mais je suis sûr que je me marrerai en le revoyant chez moi.

Les infidèles – Emmanuelle Bercot, Fred Cavayé, Alexandre Courtes, Jean Dujardin, Michel Hazanavicius, Eric Lartigau & Gilles Lellouche – 2012

04_-les-infideles-emmanuelle-bercot-fred-cavaye-alexandre-courtes-jean-dujardin-michel-hazanavicius-eric-lartigau-et-gilles-lellouche-2012Les couilles des hommes.   

   3.5   C’est un film intéressant. Oui. Contre toute attente. Non que ce soit honnêtement défendable dans son ensemble, mais il y a des qualités ci et là. C’est un film a sketchs. S’en méfier comme de la peste de ce sous-genre, prolifique dans le cinéma comique italien des années 50. S’en méfier parce que le court ne se fond pas naturellement dans le long. En fin de compte c’est un projet qui pourrait relancer l’intérêt pour le court-métrage en général, malheureusement l’effet produit est inversé. Sur ce point, Les infidèles réussit et échoue. Il réussit dans l’agencement des petites histoires et dans leur contenu, par son côté désorganisé et sa faculté à ne pas constituer de construction concrète et attendue. Ainsi, les variations autour de l’infidélité masculine ne sont pas bâties identiquement, certaines pastilles, par exemple, s’immisçant entre deux courts d’une durée même pas similaire. Je n’ai pas cette impression de cahier des charges ultra respecté, ça me plait. La linéarité est aussi mise de côté, les histoires ne cherchant pas à se répondre les unes aux autres de manière chorale, on échappe donc à ce dispositif lourdingue tant adoré des Jaoui, Klapisch et consorts. Malheureusement, ce côté cancre se retourne aussi contre lui, dans la mesure où rien ne répond à rien mais où tout se ressemble plus ou moins. C’est entre-deux eaux, j’aurais préféré que le film s’affranchisse intégralement de ça, pourquoi pas espérer un Holy motors de la comédie populaire, on peut toujours rêver ; ou qu’il y ait tout de même quelques passerelles entre chaque histoire, que quelque chose se noue à travers le temps. En l’état, le film s’amuse juste avec ses personnages, mais ils n’ont jamais le même rôle.

     Le film est donc bancal d’autant que forcément, les sketchs ne sont pas réalisés par les mêmes réalisateurs. Exit les pastilles réalisées par Courtes, véritables interludes sans intérêt, aussi bien mises en scène qu’une pub trash, sortes de copie de Bref version « Bref, je me suis fait gauler ». Exit le sketch de Courtes, toujours – décidément très mauvais metteur en scène – sur les infidèles anonymes, complètement nul, excepté la présence de la magnifique Sandrine Kiberlain et de deux/trois mots lâchés par Manu Payet, plutôt inspiré. Exit aussi le prologue, réalisé par Cavayé, non que ce soit mauvais mais c’est pile poil ce à quoi je m’attends quand je lance le film, donc ça ne m’intéresse pas, pire, je pense que rétroactivement, ce sketch ne correspond pas du tout à l’esprit du film. Exit le dernier, Las Végas, réalisé par les deux compères acteurs en vogue, même si l’on fini par y voir l’un sodomiser l’autre, fallait oser. Celui-ci est d’ailleurs clairement le prolongement du prologue. Reste le Lartigau, pas mal, un peu plus grave, mais un peu court, à court d’idées surtout. Et les deux qui retiennent mon attention : La bonne conscience, de Michel Hazanavicius ; La question, d’Emmanuelle Bercot. Comme quoi, il n’y a pas de secrets, c’est en parti pour ces deux « vrais » cinéastes que je me suis penché sur Les infidèles. Je précise au passage que le film ne situe jamais, en tout cas pas avant son générique final, la provenance de ses sketchs. C’est donc une fois le film terminé que je me suis aperçu que mes deux préférés étaient fait deux réalisateurs que j’estime. Point de conditionnement de politique des auteurs ni de mauvaise foi envers les autres.

     Celui d’Hazanavicius est une sorte de Lost in translation chez Houellebecq ou de OSS 117 perdu dans Les bronzés. L’ambiance, la minutie géométrique de cette errance dans les couloirs et le ton du dialogue, on ne peut pas se tromper longtemps, on reconnaît le style. Il faut simplement accepter un ton nettement plus dépressif. Dujardin y ère dans un grand hôtel à la recherche d’une nénette avec qui passer la nuit et finira par convoité la moins attirante de toute, celle qu’il n’aurait jamais draguée ailleurs. C’est un loser terrifiant. Je le reverrai volontiers celui-ci, j’ai l’impression qu’il m’a un peu échappé. Ce qui ne fut pas le cas pour le sketch d’Emmanuelle Bercot, mention spéciale, la bonne surprise, qui m’a un peu calmé, je dois bien l’avouer. Le récit est quasi uniquement centré sur le couple Dujardin/Lamy, Lellouche y faisant son apparition aussi, mais seulement comme ami avouant honteusement ses coucheries dans le dos de sa femme, abandonnée dans la cuisine, lors d’un dîner entre amis. Ce dialogue va en engendrer un autre, plus tard, quand le couple sera de retour au bercail. Une question, la tourmente. L’aveu installe un malaise, puis la violence, puis un autre aveu. La parole se perd dans l’espace, les corps tournoient dans la maison, autour des tables, du canapé, du lit, l’ambiance est électrisée, elle devient même méchante, pleine de rage, de désespoir Cassavétien. Le fait que le couple en soit un vrai provoque une impression bizarre, comme s’ils étaient face à face, à cœur ouvert, tous deux sont excellentissimes, au passage. C’était hyper déstabilisant, hyper culotté surtout. Et ça ne fait que confirmer que ce n’est pas un film drôle et misogyne, au pire on peut le trouver un brin caricatural et moraliste. Et donc ça n’a strictement rien à voir avec les affiches matraquées sur les quais de gare au moment de sa sortie, affiches qui ont tant fait parler d’elles. Non, ce n’est pas vraiment drôle, enfin ça ne met pas la pêche, c’est drôle par-ci par-là, les moins bons moments du film d’ailleurs, mais c’est surtout sinistre et glauque, limite cafardeux. Donc ce n’est pas terrible dans l’ensemble, c’est bancal, mais tout de même je ne m’attendais pas à ça.


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silencio


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