3.0 Je ne me souviendrais que d’une chose : cet épisode du dauphin/baleine, tué pour avoir été pris pour un requin ou que sais-je d’autre de plus terrifiant, échoué sur la plage, avant qu’il ne réapparaisse au réveil de Caviezel, sous ses yeux, bien loin de cette plage où il était laissé pour mort, créature témoin d’une nature qui n’a pas fini de se déchaîner. C’est maigre. Cette séquence pourrait être l’un des trucs les plus terrifiants dans le surréalisme qu’elle suggère, mais elle est affreusement mise en scène.
Le problème majeur de ce film c’est qu’il laisse peu de place à une interprétation libre. L’abstraction provoquée par cette rébellion de la nature en complot est imaginée d’entrée, le film ne laisse jamais entrer la possibilité que le danger soit autre. Et s’il le fait, il y va de ses gros sabots – la rapide escale dans le bar de la station essence où les autochtones ont l’air bien trop bête pour être envisagés comme de possibles assaillants – ce qui provoque l’abandon de cette piste inquiétante qui pouvait être envisagée. Long weekend se dévoile bien trop vite. La nature est filmée autrement : de nombreux gros plans sur la faune, des macros sur la flore, un danger en permanence provoqué par les éléments. Qu’il s’agisse d’une ombre dans l’océan, d’une minuscule araignée sur une toile de tante, d’un serpent sous un saladier, d’un orage menaçant et j’en passe. L’immense forêt dans laquelle s’est échoué le couple abrite même un chemin sans fin, circulaire, véritable labyrinthe dont il sera impossible de s’évader. L’idée me plait mais elle est marquée à gros traits et surtout il n’est jamais question de faire de cet espace une peur cinématographique. J’entends moins les bruits de l’environnement naturel que cette musique ronflante ou trépidante sans intérêt sinon celui de créer un rythme à elle toute seule.
Long weekend est un film de Jamie Blanks, réalisateur du médiocre Urban Legend qui n’arrivait jamais à s’extirper de son influence Scream. Long weekend pourrait surfer sur cette nouvelle vague de films anglais qui jalonnent le genre depuis quelques années, ressembler à Eden Lake auquel on peut penser une minute en début de film, à la différence que celui-ci est déjà terriblement daté et mise trop sur le principe de remplissage pour espérer parvenir à la cheville du film de James Watkins. Ce film là n’ose pas proposer un simple survival en milieu hostile. C’est que la réussite de ces films repose aussi sur l’empathie envers leurs protagonistes. Le couple est détestable d’un bout à l’autre ici. Il emmène ses petits problèmes et règle ses comptes au beau milieu de la nature. Il incarne la beaufitude suprême en tirant aux canards pour le fun, balance ses canettes de bière dans la mer ou écrase un kangourou ; Elle la lâcheté, demeurant transparente tout en voulant être ailleurs – le film se voudrait psychologique en une scène balayant les problèmes conjugaux du couple et le traumatisme d’un éventuel avortement – préférant se masturber dans son coin plutôt que de répondre aux demandes sexuelles de son mari, mais qui en tant que femme, ne peut rien canaliser. Le film m’apparaît très misogyne selon ce point de vue là. La femme devient le déclencheur de tout. Lorsque son mari la retrouve inerte, les seuls mots qu’il lâchera seront ceux d’une déception quant à sa volonté de s’enfuir sans lui.
Long weekend est au survival ce que Home de Yann Arthus Bertrand est au documentaire. Un clip écologique démago. En fait, Jamie Blanks veut tellement raconter quelque chose d’édifiant que les mécanismes de la peur voués au genre sont involontairement obstrués. Le film se termine sur la mort du personnage central via une séquence qui frise le ridicule : ce dernier s’est enfin extirpé de la forêt (comme le personnage féminin à la fin de Eden Lake en somme) et débarque sur une route, faisant des signes à un camionneur qui ne peut le voir parce qu’un oiseau malin s’est immiscé dans sa cabine, troublant sa conduite. Le camion écrase le personnage. Le film semble dire que la nature est bien trop forte pour l’homme. Oui, et ?