Archives pour la catégorie John Huston

Que la lumière soit (Let there be light) – John Huston – 1946

35. Que la lumière soit (Let there be light) - John Huston - 1946Going back to civilian life.

   6.0   En 1942, John Huston rejoint le centre cinématographique de l’armée américaine. Là, il signera, sous son nom, trois documentaires militaires dont celui-ci. Let there be light s’intéresse aux séquelles psychologiques des soldats rescapés de la guerre : Ceux qui n’ont pas de blessures physiques apparentes mais qui sont traumatisés de l’intérieur. Les autorités décidèrent, à l’époque, de ne pas distribuer le film. Les spectateurs ne purent visionner ce document que, lors du Festival de Cannes 1981, dans la section Un certain regard. Il faut noter que sa découverte de l’inconscient et l’hypnose rapprocha Huston de Freud, ce qui le poussa à faire Freud, passions secrètes, en 1962. Si le matériau est réel, Huston le met en scène, clairement et son dispositif est parfois un peu schématique, authentique mais fabriqué. C’est un cinéma de propagande, à la gloire des psychiatres de l’armée et de leurs différentes méthodes médicales : Groupe de parole, hypnose. On y découvre un homme retrouvant miraculeusement l’usage de ces jambes, un autre celui de la parole, un autre sa mémoire. Là où le film trouble tant – Et c’est sans doute là-dessus qu’il doit sa longue interdiction – c’est que malgré le traitement favorable que font les images de l’institution militaire, on y découvre malgré tout en face des visages abimés, des regards perdus, des voix bégayantes, des corps tremblotants, bref pas vraiment des héros de guerre que la propagande lambda se doit de représenter.

The African Queen – John Huston – 1952

04. The African Queen - John Huston - 1952L’impossible Madame Rivière.

   8.0   Difficile de ne pas se laisser séduire par cette comédie d’aventures qui se situe à la frontière de la screwball comedy et du film de guerre, puisque le récit se déroule en Afrique orientale allemande, durant la première guerre mondiale. Difficile de ne pas de laisser séduire par les grimaces contagieuses de Katharine Hepburn et Humpfrey Bogart vieillissants.

     Rose est une sœur missionnaire, ancrée dans un village reculé, un peu coincée, propre sur elle, britannique. Charlie est coursier pour une exploitation minière, un peu grossier, un peu épave, américain. Après l’arrivée des troupes allemandes dans le village (qui voit la mort du pasteur, le frère de Rose) et par crainte de nouvelles représailles, Charlie convainc Rose de partir sur l’African queen, son bateau, quand elle désir le transformer en torpilleur pour couler une canonnière allemande en aval.

     Si le film délaisse un temps « la guerre » pour partager la descente des rapides aux côtés de notre duo mal assortis et sa petite guerre de caractères, c’est pour mieux y revenir lors d’affrontements avec des soldats lorsque l’African queen passe devant le fort allemand. Cette embarcation archaïque offre le plus beau « huis clos » que le cinéma ait pu nous offrir.

     Le film vire alors du côté de la comédie romantique, sans pour autant délaisser son penchant aventurier et une grande quantité/variété d’obstacles, comme un épisode d’arbre d’hélice endommagé, un autre avec des sangsues entre les roseaux dans les marécages, une tempête nocturne (cette petite attention qu’elle a en le couvrant d’un parapluie, magnifique) puis le miracle provoqué par un déluge providentiel, une double exécution évitée de justesse par une explosion salvatrice. On ne peut plus rocambolesque. On ne peut plus savoureux.

     Je connais encore assez mal Huston mais petit à petit ça se dessine, c’est un aventurier et donc il y a des choses très stimulantes dans cette filmographie. Là on est typiquement dans l’un des genres « Ils se détestent mais vont finir par s’aimer » que j’adore (Je ne vais pas tarder à me refaire L’impossible Monsieur Bébé, de Hawks, ainsi que Le sauvage, de Rappeneau, du coup) et surtout le film se déroule sur un fleuve, et Huston en fait un décor fascinant, même s’il filme bien plus son couple vedette que l’Afrique.

     Enregistré sur Arte il y a peu, qui diffusait la copie restaurée, et j’ai halluciné, de la qualité de la copie, belle comme c’est pas permis. Le premier plan déjà, alors qu’on ne fait que traverser les feuillages pour arriver jusqu’au village, je jubilais sur place.

Fat City – John Huston – 1973

24Vanishing dream.

   8.0   Malgré mes nombreuses lacunes, j’annonce : Fat City est mon Huston préféré. Il faut dire que c’est un cinéaste qui me laisse souvent de marbre. D’ailleurs, si Huston n’est pas tout jeune, on peut largement dire que Fat City fait très Nouvel Hollywood et c’est sans doute ce qui m’empêche de crier au chef d’œuvre : Je n’y vois pas la liberté et la folie d’un Cassavetes, d’un Hopper ou d’un Hellman. Pourtant, il y avait tout. L’ouverture sur un morceau de Kris Kristofferson ; La rencontre, sublime, dans la salle de gym, entre le boxeur cabossé et le jeune loup fougueux ; Il y aura aussi ce match de boxe, vers la fin, où deux come-back paumés s’affrontent dans la douleur et le baroud du désespoir ; Et cet épilogue, d’une noirceur terrible, accompagné comme au début par Help Me Make It Through the Night. Désenchanté, le film l’est, probablement plus encore qu’un Vanishing point ou un Five easy pieces. Et Huston n’est pas tendre avec ses personnages, jusqu’à les faire provisoirement disparaitre du champ quand ils s’animent d’un futur plus lumineux – Ernie Munger qui va être papa. Les ellipses sont légion, ce qui n’arrange rien. Les relations semblent éphémères (Le boxeur et son mentor, la femme et son mari) comme vouées à s’évaporer sous le vernis d’une Amérique décharnée, d’une civilisation dont les rêves se sont effacés. Billy Tully (Inoubliable Stacy Keach) est un très beau personnage aux rêves envolés, il est seul, il n’est plus grand-chose de concret, il revient juste pour mourir. Ce sont les cicatrices et cette calvitie de Tully, ce boxeur de 30 ans, dont la gloire n’est plus qu’un souvenir, qui marquent durablement. Ça pourrait, ça devrait me bouleverser, pourtant, il me manque une clé pour le déchiffrer, une structure plus accomplie pour m’y abandonner. Je trouve aussi que le film exagère certains portraits, qu’il produit des archétypes du « Nouvel Hollywood » sans la nuance qu’on peut trouver dans un Macadam cowboy ou un Play Misty for me. Si je cite à foison c’est vraiment pour te dire combien c’est un cinéma qui me touche à l’infini. Toutefois, si le film colle souvent à ses personnages, dans une discussion de bar comme sur un ring, c’est bien dans sa peinture des lieux (Stockton, en Californie) qu’il s’avère le plus magistral et Huston choisit de nous offrir ces « plans documentaires » en guise d’introduction pour mieux s’en défaire ensuite : Une parcelle d’autoroute en chantier, un immeuble en ruines fumant encore, une église sur laquelle est inscrit « For sale » et les visages ravagés d’hommes et de femmes oubliés. 

Le trésor de la Sierra Madre (The Treasure of the Sierra Madre) – John Huston – 1949

32La ruée vers l’or.

   5.5   On a beaucoup dit de Sorcerer qu’il était le remake américain du film de Clouzot, Le salaire de la peur. Oui, mais pas que. Et si sa vraie matrice se trouvait dans la dynamique Hustonienne, dans le désert crasseux et cruel qui parcourt Le Trésor de la Sierra Madre ? Là où les éléments semblent se déchainer plus que d’ordinaire. Là où les visages sont durcit par l’avidité. Là où la quête est aussi absurde au début que ne l’est son fiasco final. Si chez Friedkin, c’est uniquement après la réussite exténuante et in-extrémis de l’affaire que des tueurs viennent tout anéantir dans un hors-champ mémorable, chez Huston c’est une bourrasque de sable qui s’empare de l’or aussi abruptement que le filon avait été débusqué. C’est donc un film d’aventures dans la tradition du genre, avec des rencontres, des affrontements et de l’or, un film fantasme qui une fois de plus avec Huston, me laisse au mieux sur ma faim, au pire sur la touche. C’est à ce jour ce que j’ai vu de mieux de sa part mais ça n’atteint jamais le fantasme que je m’en faisais – Ou alors au tout début dans les prémisses du voyage et à la toute fin, magistralement ironique. Ça manque de chair et de rythme, de climax et de sidération. L’impression continue que Huston en fait trop ou pas assez ; Qu’il voudrait faire un film de personnages mais échoue à n’en produire que des caricatures. Qu’il voudrait jouer avec l’immensité du désert mais ne se plait vraiment que dans ces risibles échanges de gunshots. Et si l’on apprécie les marques que le temps vient infliger sur le visage de Bogart, la mise en scène ne crée jamais cette envoutement et cette aliénation que l’on retrouvera chez Friedkin. Déception relative donc, mais déception quand même.

Le faucon maltais (The Maltese Falcon) – John Huston – 1946

35.5« The stuff that dreams are made of »

   4.5   Je laisse systématiquement passé plusieurs années entre chaque découverte d’un film de Huston. Ce n’est pas bon signe. Moby Dick, d’abord, il y a dix ans puis L’honneur des Prizzi et Des gens de Dublin. Aucun de ces films ne m’a laissé de souvenir suffisamment fort pour avoir envie d’approfondir sa filmographie illico. Je n’ai probablement pas vu les bons. C’est en voyant Huston dans Le convoi sauvage que j’ai pensé à lui en tant que cinéaste. Après avoir découvert ses deux derniers films, Le faucon maltais me permettait de faire le grand écart, étant donné qu’il s’agit de son tout premier. Quarante-cinq ans avant son dernier. Un film noir, en noir et blanc, plus noir que blanc, sur une histoire de trésor de pirates, un faucon fait de pierres précieuses, convoité par toute la pègre de San Francisco. Tout le film ou presque se vit du point de vue d’un privé, joué par Humphrey Bogart, qui brille par son charisme, tentant d’élucider le meurtre de son associé en se mettant aux trousses de ceux qui sont aux siennes. Le faucon maltais multiplie les séquences d’interaction notamment entre Lorre et Bogart, jouant sur de longues plages de dialogues bien pesés, intégralement repris, parait-il, sur l’œuvre de Hammett, dont le film est l’adaptation fidèle. Je ne suis pas vraiment attaché aux classiques du noir et si j’aime En quatrième vitesse d’Aldrich, Underworld USA de Fuller, Assurance sur la mort de Wilder, Les amants de la nuit de Nicholas Ray, je n’en ferais guère mes films de chevet. Ce qui me plait avant tout dans ces quatre films, cités spontanément, c’est leur mouvement permanent et leur capacité d’évolution dans le ton, la forme, le mélange du parler et du mutique et le fait de ne jamais rien reposer sur la présence des acteurs. Le faucon maltais me semble être le film idéal pour le fan ultime de Bogart, d’autant que je n’y vois qu’un scénario filmé, sans réelle envergure, sinon celle de filmer des gueules et les dialogues d’un bouquin. Alors certes, le film constitue les prémisses du Noir, puisqu’il est l’un des premiers répertoriés comme tel, mais sa mécanique huilée qui va pourtant dans tous les sens, ne dégage finalement que confusion, sans fascination. Essai manqué à nouveau, donc, mais je ne désespère pas et mise énormément sur Le trésor de la Sierra Madre, mon prochain rendez-vous avec Huston, j’espère pour très bientôt.


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silencio


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