Archives pour la catégorie Joseph Losey

Deux hommes en fuite (Figures in a landscape) – Joseph Losey – 1970

01. Deux hommes en fuite - Figures in a landscape - Joseph Losey - 1970Traqués.

   8.0   Dans un pays inconnu (probablement en Amérique latine) deux hommes traversent la campagne et fuient un hélicoptère. Bientôt, l’un d’eux se débarrassera d’un simple berger qui se trouvait sur leur chemin. Lors d’une escale nocturne dans un village, ils voleront des provisions et des armes chez une vieille dame. Ils tueront bientôt le passager de l’hélicoptère qui les pourchasse – dont on peut sentir l’inspiration chez Ted Kotcheff, pour une mythique scène de Rambo – déclenchant un gigantesque serpentin de patrouilles à leurs trousses entre champ de mais et forêts d’oliviers.

     Le titre original est très beau : Figures in a landscape. Mais le titre français apporte aussi son lot de vérité : il s’agit quand même davantage d’une traque que de simples silhouettes dans le paysage. Néanmoins, le film est épuré. Losey a évacué toute psychologie : On ne saura rien de ces personnages, de ce vers quoi ils vont (une frontière ?), de ce qu’ils fuient, ce pourquoi ils fuient et pourquoi ils étaient préalablement prisonniers. On imagine qu’ils se sont évadés, puisqu’ils ont d’abord les mains liées derrière le dos. On apprend d’eux, brièvement, au détour d’un de leurs moments de folie ou de brève confession.

     C’est un film parfaitement ancré dans le nouvel Hollywood et dans la thématique de la fuite cher à Losey. Qui s’ouvre sur la plage à l’aube et se terminera dans la neige sur le haut d’une montagne. Un film semi-abstrait. Car très physique, sauvage. Une matrice de Duel ? De Gerry ? On pense aussi aux Sarafian (Vanishing point, Cat Dancing, Le convoi sauvage) de la même époque. Robert Shaw & Malcolm McDowell forment un beau duo. Excellente découverte.

Pour l’exemple (King & country) – Joseph Losey – 1965

????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????????Le petit soldat.

   7.0   En 1917, dans les tranchées de Passchendaele, en Belgique, un jeune soldat britannique attend d’être jugé. Arrêté alors qu’il fuyait loin du front, il est accusé de désertion. Son capitaine s’improvise comme étant son avocat militaire afin de lui faire éviter le peloton d’exécution. En somme, Pour l’exemple est un film de procès dans les tranchées et c’est ce que retient brillamment Losey qui certes filme ce conseil de guerre et ce que cela induit de visages, de joutes verbales et donc de champs contrechamps, mais il s’intéresse aussi beaucoup au lieu, filmant crûment la boue, les rats, les cadavres, et plus simplement le quotidien des soldats (glissant même par instants des images d’archives très dures) faisant entrer en résonance la folie latente de chacun d’eux avec la nôtre et bien entendu avec celle de ce petit soldat perdu.

Le garçon aux cheveux verts (The Boy With Green Hair) – Joseph Losey – 1948

13613571_10153845202352106_7123639744013579606_oUn enfant pas comme les autres.

   6.0   C’est un premier film encourageant et courageux, à prendre comme un conte, qui se fait à la fois léger et cruel, invente un scénar abracadabrant pour gosses (les fameux cheveux verts) tout en tapant sur la société, intolérante face aux êtres isolés. Et puis dans le fond c’est déjà tout Losey qui se dessine des Damnés à Mr Klein. Ça ne me marquera pas outre mesure mais c’est vraiment pas mal.

The Servant – Joseph Losey – 1964

13879296_10153845202802106_6710276393235307562_nTout pour la forme.

   3.5   Trop carré, trop propre, trop virtuose dans ses effets pour moi. J’avais l’impression d’être devant un film d’Orson Welles. C’est donc de la belle ouvrage mais je n’y vois aucune âme, je ne ressens aucune émotion, je me fiche totalement des personnages. Je m’attendais à voir un chef d’œuvre, mais ça a complètement glissé sur moi. La douche froide de l’été.

Monsieur Klein – Joseph Losey – 1976

31_-monsieur-klein-joseph-losey-1976La métamorphose.

   9.5   Le cinéaste choisit, pour illustrer l’absurdité et le calvaire des déportés de la Shoah, de s’intéresser au destin d’un homme qui n’est pas directement concerné mais se retrouve imbriqué dans cette spirale kafkaïenne d’une identité que l’on dédouble avant qu’on ne la modifie pour l’anéantir.

     La film débute sur une séquence effrayante, aussi frontale que détachée, évidemment absurde, évidemment ignoble, où un médecin et son assistante observent le corps nu d’une femme, en dictant ses particularités afin d’établir ou non sa judéité. Identité placardée comme on montrerait du doigt un animal malade. Humilié, cet homme l’est aussi dans la séquence suivante, lorsqu’il souhaite se faire racheter un tableau par l’arriviste Monsieur Klein, qui marchande l’oeuvre et déclare en réponse aux interrogations de son interlocuteur, que bien souvent il préférerait ne pas dépenser. Quelque part il sous-entend que cette passion de la collection le dévore, qu’il faudrait presque l’en plaindre. Il a autant de respect pour cet homme qu’en a la médecin pour cette femme.

     La guerre est une aubaine pour Monsieur Klein, pour son business. Cette persécution juive l’indiffère sans doute plus qu’elle ne le réjouit, mais inconsciemment elle l’arrange, cela lui suffit à ne pas la considérer. C’est pourtant cette ironie là qui se met progressivement en place, dès l’instant qu’il reçoit, volontairement ou non, le journal des informations juives. On est en janvier 1942 et Monsieur Klein se retrouve bientôt pris pour un possible homonyme après qu’il ait simplement pensé à une erreur, s’en allant en rendre compte à la préfecture, sans imaginer – il est au-dessus de cette éventuelle méfiance – que cette réclamation pourrait ensuite lui devenir préjudiciable.

     Les idées de mise en scène vertigineuses sont nombreuses, aussi ostensibles qu’une déambulation subjective accentuant l’aspect paranoïaque que discrètes, par l’utilisation de l’ellipse ou du hors champ. Dans ce café, le serveur se déplace entre les tables, annonçant « téléphone pour Monsieur Klein » avec une ardoise en mains mentionnant les cinq lettres de son nom. Un nom à la craie sur une ardoise avant de disparaître en poussière, plus qu’une prémonition c’est une fatalité. Une scène dans un château où Klein part à la recherche de l’autre Klein et ne trouve que sa maîtresse, apparemment (car il n’y a aucune certitude dans le film de Losey, à aucun moment) lui demandant l’adresse de cet homme. Le plan montre le visage de la jeune femme lui répondant naturellement en lui donnant sa propre adresse à lui. Le plan se coupe, n’offre aucun contre champ, donc permet d’exacerber le malaise et le vertige. Klein s’efface peu à peu, disparaît au travers même de la mise en scène.

     Tous les personnages qui croisent alors sa route, de son avocat à son propre père pour les plus proches, demeurent suspects à son égard, on ne sait jamais s’ils sont de son côté ou s’ils font parti d’une possible machination visant à son aliénation progressive, le coinçant définitivement dans un problème identitaire qui le dépasse mais qui paradoxalement va lui rendre son humanité. Il est d’abord loin de tout ça, lui qui n’a d’autre préoccupation que de réfuter, aux yeux de la société, sa judéité. Le sort des juifs ne le soucie guère, c’est le sien qui lui pose problème, jusque dans ce véhicule pour déportés où il dit à une femme bouleversée qu’il n’a rien à voir avec tout ça. Peut-être que là, hors champ (toujours) il se rend compte de l’absurdité de cette pensée, de la vraie cruauté du monde. Il lui faudra ces dix dernières minutes : plongé en pleine rafle du Vel d’Hiv, et alors qu’il aperçoit son avocat brandissant le certificat authentifiant son identité, il se laisse enfoncer dans la foule en marche vers les trains, donc vers les camps. Lorsque les portes du wagon se referment sous son nez, le plan laisse apercevoir derrière lui, cet homme à qui il a marchandé ce tableau en début de film. Le tableau de ce compagnon d’infortune, qu’il refusa de laisser saisir par la police lors de la perquisition, dernier lien avec son ancienne identité et témoin de l’émergence de l’identité de substitution forcée, passerelle vers celle qui le conduira probablement vers la mort, vers Auschwitz. Le film a cette intelligence de montrer l’infime frontière existante entre une complicité inconsciente des gens ordinaires et les victimes directes des déportations.

Les damnés (The Damned) – Joseph Losey – 1963

Les damnés (The Damned) - Joseph Losey - 1963 dans Joseph Losey losey_thesearethedamned

Deux en un.

   6.0   Ce qui s’apparente dans un premier temps à un film d’anticipation, sur la jeunesse, la violence, proche dans ce qu’il montre, d’un Mad Max, d’un Class 84, d’un Orange Mécanique même, vire de bord d’un seul coup pour nous plonger dans un pur film de SF, tendance Village des damnés, avec des enfants toujours, des enfants étranges, que certains considèrent même comme des zombies, des enfants qui sont la conséquence de radiations. Je ne préfère pas en dire davantage, j’en ai déjà trop dit. Je ne pense pas que ce soit un très bon film dans le fond. Niveau mise en scène il n’y a rien de très emballant et le film ne pousse peut-être pas assez loin la question. Mais quoi qu’il en soit un film qui se divise en deux parties si distinctes c’est la première fois que je vois ça. Du coup ça lui offre un cachet particulier, quelque chose d’unique en son genre qui n’est pas négligeable.


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Auteur:

silencio


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