Archives pour la catégorie Jules

The super Mario Bros. Movie – Aaron Horvath & Michael Jelenic – 2023

24. The super Mario Bros. Movie - Aaron Horvath & Michael Jelenic - 20232023, l’odyssée de Mario.

   5.5   Je n’ai pas joué tant que ça à Mario était gamin, en fin de compte. Seulement à Super Mario 64, Mario Kart et Mario Party. Il y en a eu beaucoup et Super Mario Bros, le film mise tellement à fond sur les références que je ne les ai pas toutes. Un peu plus, toutefois, depuis que mon fils a fini deux fois Super Mario Odyssey, sur Switch, dont la trame pourrait être une partie de celle reprise par le film : Ici aussi Peach sera in fine prisonnière de Bowser qui veut se marier avec elle. Mais l’infâme roi des koopas entreprend ici de détruire le royaume champignons (sur lequel la princesse a échoué, petite) si sa requête n’est pas acceptée. Royaume dans lequel Mario, plombier de Brooklyn aspiré malgré lui dans les tuyaux verts du vortex – avec son frère Luigi qui se retrouve lui dans la forêt noire chez la tortue maléfique – échoue, et fait ainsi la rencontre de Toad, de Peach, bientôt même de Donkey Kong, qui constituera l’armée pour combattre Bowser et délivrer Luigi. Histoire archi classique pour du Mario, évidemment donc si l’on vient pour l’originalité, c’est râpé. Si l’on y va, comme moi, entre amis, avec nos gamins, c’est le pied car le film est très beau, drôle, ultra rythmé, jalonné de supers moments (l’arrivée dans le royaume champignons verdoyant, l’entraînement de Mario en mode reboot sans fin, le duel avec DK, l’inévitable course arc-en-ciel…) et de chouettes idées (la chanson de Bowser, le champignon bleu, l’étoile pessimiste…) qui font qu’on passe un excellent moment, au point de vouloir voir la suite (qui étant donné la scène post générique, promet d’intégrer Yoshi) ou d’enquiller n’importe quelle partie de jeu Mario dans la foulée.

Sacrées momies (Moomios) – Juan Jesús García Galocha – 2023

???????????????????Loin des pyramides.

   4.0   Surpris, en allant voir le film en salle avec mes enfants, de constater qu’il s’agit d’un film d’animation espagnol. Produit par Warner, certes, mais espagnol. Avec la caution « Égypte ancienne » dans le texte, disons que ça intrigue pas mal. On se rend malheureusement vite compte que ça n’a « d’exotique » que l’apparence. Tout respire ce qu’on nous sert habituellement, chez Disney, Pixar, Dreamworks ou d’autres. Tout. Zéro surprise. Jusqu’au personnage clown, ici un crocodile, qui pourrait être échappé de Buzz l’éclair ou pire, de cette séquence chantée, qui semble copiée collée sur Encanto. C’est dire si c’est original. La partie durant laquelle les personnages débarquent en ferry à Londres – en pensant arriver à Rome – est très chouette. Le reste se regarde et s’oublie.

Avatar, la voie de l’eau (Avatar, the way of water) – James Cameron – 2022

26. Avatar, la voie de l'eau - Avatar, the way of water - James Cameron - 2022Togetherness.

   8.0   Impossible d’y couper : Le défi technique accompagne inéluctablement la sortie d’Avatar, la voie de l’eau. On ne sait combien de technologies ont dû être mises au point afin de produire ce résultat-là, en grande partie aquatique. Et l’on sait le temps que le film a pris pour arriver devant nos yeux. Treize années depuis la sortie du premier volet. Et au moins autant de conception, auparavant. C’est un fait commercial et industriel, qu’on ne manquera pas d’accompagner d’arguments markéting, concernant la 3D, la haute fréquence, le son, sa capacité d’immersion. Il semble exister mille et une façons de le voir ce spectacle en salle. Un spectacle de ceux qu’on ne fait plus. Et une suite, dans la tradition cameronienne : Avatar 2 est à Avatar ce que Terminator 2 était à Terminator : Son prolongement, son remake, son reboot, sa réactualisation, son dynamitage. Si depuis Avatar, premier du nom, deux régimes d’images antagonistes (prises de vues réelles et images numériques) cohabitent souvent, le second pousse l’expérience à un paroxysme tel qu’il intègre un humain (Spider) au milieu des na’vis (ou avatars) durant le film tout entier.

     Avatar, la voie de l’eau est animé d’un paradoxe passionnant, cher à son auteur : Il y a comme une double quête, dont celle de retrouver l’harmonie avec la nature, mais aussi cette fascination pour la guerre, le feu, le métal. Au cœur du film se joue un savant montage alterné. D’un côté le récit semble se suspendre dans la découverte de ce nouveau monde et révèle (une fois encore) la passion aquatique de James Cameron. Son amour pour l’observation aussi, des éléments, des corps, de l’espace : Son cinéma devient plus contemplatif. Cette séquence centrale représente pourtant un faux climax – au sens narratif – cher au cinéma cameronien : Qu’on retrouve dans les faux creux de Titanic (La petite cavale de Rose & Jack) ou dans ceux de Terminator 2 (L’escale dans le désert). Faux climax car le récit, lui, cherche à revenir, à s’immiscer dans cette bulle rêveuse, puisqu’on suit par micro-scènes la progression de Quaritch et son escouade, accompagnés de Spider.

     Mais c’est un fait, on a le sentiment d’avoir vécu ce pas-de-côté. Comme si le film échappait alors au scénario, se permettait de sortir des contingences markéting imposées par le genre, qui aurait comme mission de raconter une histoire, linéaire, avant tout. Si l’on suit aussi l’avancée de Quaritch dans un montage alterné qui peut aussi rappelé le tout début de Terminator 2 (La progression du T800 et celle du T1000 vers la cible John Connor) on est suspendu, l’espace d’un moment – assez long, dans un blockbuster –dans l’observation de ce nouveau monde. A l’autre bout pourtant, le final sera évidemment une immense bataille, colossale. C’est aussi cela, le geste Cameronien : On se souvient que, dans Titanic, à mesure qu’on plongeait dans les souvenirs de Rose contant sa relation naissante avec Jack, on oubliait que le paquebot allait couler. Ici, c’est pareil. On a tendance à oublier que les méchants humains recherchent notre famille na’vi. On les voit trop brièvement pour qu’ils impactent une vraie inquiétude. Au même titre qu’on voyait peu l’équipage se soucier de la nuit et la mer de glace qui s’étendaient bientôt devant eux.

     Ce paradoxe se joue aussi dans l’image. Si posée l’action soit-elle, l’image, elle, ne cesse d’être en mouvement. Ne serait-ce que dans le vivier sous-marin, et notamment celles (dont j’ai oublié le nom) qui remplacent les Ikran des na’vi de la forêt. Et bien entendu grâce à l’eau, fil d’Ariane camerionien. Ou l’on se rend compte à quel point l’univers sous-marin devient sans doute le plus bel univers pour le numérique et la 3D, aussi bien son décor, sa dimension sonore et la multitude de mouvements nouveaux qu’il génère, révélant une action paradoxalement aérée – alors qu’on devrait étouffer – et organique – alors que c’est du numérique tout entier. S’il existe une dépression post-Avatar c’est en grande partie dû à sa capacité immersive. Quand bien même on puisse comprendre que cela produise sur certains une forme de saturation.

     Quand je vois des images esseulées d’Avatar, je me demande comment ces films ont le pouvoir de m’emmener, de m’enchanter, de m’émouvoir. Je refuse de penser qu’il s’agit d’une simple prise d’otage numérique, spectaculaire – ou disons-le vulgairement : une attraction de fête foraine – mais bien la densité et la fluidité narratives qui permettent d’éprouver cette émotion-là. Le blockbuster de super-héros ne produit jamais ceci sur moi, à l’exception de ces épisodes qui ferment la boucle, l’univers. C’est que là aussi il s’agit de narration, d’un corpus qui te permet de tenir jusqu’au bout et d’en sortir ému. Si Avatar produit cela sur un seul film, dorénavant deux, c’est bien qu’il représente une anomalie, puisqu’il ne découle pas d’univers étendu. Ce qui ne l’empêche évidemment pas d’être rattaché à d’autres univers, cinémas, références.

     Si cet Avatar, deuxième opus cite à foison la filmographie de Cameron, recyclant même (un peu trop ?) certains de ses motifs, climax, on pense à beaucoup d’autres choses et notamment à John Ford. C’est un western, Avatar. Dans l’espace, certes, mais un western, dont il reprend crânement les codes. Au point qu’il ira jusqu’à balancer (un peu lourdement) une séquence d’attaque de train. Mais on peut évoquer l’incendie initial avec ces créatures galopantes, calcinées sur place – qui rappelle les visions apocalyptiques de l’ouverture de Terminator 2, où des petits chevaux de bois à bascule (probablement dans un parc pour enfants accentuant l’idée d’innocence perdue) sont dévorés par les flammes de l’enfer. Il y a aussi l’exil vers une nouvelle terre, la bataille finale, le duel, tout semble référer au western. Mais dans sa structure narrative, le film ma fait penser à du Fennimore Cooper : Le dernier des mohicans, bien entendu, grande fresque guerrière, grande fresque de familles aussi. Quant à l’histoire terrible du Tulkun vengeur et paria, qui n’est pas sans évoquer une baleine, évidemment, c’est aussi Orca (Michael Anderson, 1977) qui est convoqué, film dans lequel un orque mâle se venge des pêcheurs ayant tué sa femelle et son baleineau.

     En effet, ce second volet développe un univers nettement plus familial voire patriarcal, ne serait-ce que dans sa multiplication des liens pères/fils. Chez Cameron, la cellule familiale est toujours au cœur du récit, d’une manière ou d’une autre. Dans Avatar, premier du nom, Jake était là parce que son frère n’était plus là. Neytiri y voyait son père mourir sous les foudres des humains en guerre. Neytiri est d’apparence plus en retrait cette fois mais reste la figure résistante ; que Jake va « combattre » durant le film – pour protéger sa famille, sa forteresse, dit-il – mais sur laquelle il va in fine s’aligner. Quand il ouvre les yeux dans le dernier plan, c’est une nouvelle renaissance qui prend cette fois acte de résistance.

     L’ordre patriarcal – si tant est qu’on en trouve un mais il m’a semblé plutôt désorganisé, cet ordre – est donc chamboulé à la fin, puisque d’une part ce sont les enfants qui viennent en aide à leurs parents (Loak vient chercher son père, Spider le sien quant à Kiri, elle vient au secours de Neytiri). Mais surtout l’action est déplacée, elle n’est plus militaire, massive, elle s’affine, se féminise, indexée sur le personnage de Kiri, donc – qui sera probablement développé dans l’épisode suivant – qui semble éprouver les choses autrement, sentir les éléments divins – elle semble dialoguer directement avec Eywa et son existence n’est pas sans évoquer l’immaculée conception – être faite pour l’univers aquatique. Si les enfants sont dorénavant les personnages moteurs, Kiri est le cœur battant et spirituel du film. On la voit assez peu mais elle est déjà partout. Elle m’a tellement fait penser à la Pocahontas du Nouveau Monde, le chef d’œuvre de Malick.

     A son image, Avatar, la voie de l’eau fonctionne aussi par séquences qui communiquent ensemble. Les échos d’une scène à une autre sont très marqués. Comme lorsque Jake saisit le corps de son fils lors de l’attaque du train, en observant dans son dos afin de voir si la balle n’a pas traversé. La même scène aura lieu à la fin, sous un détour plus funeste. On pense aussi à Spider qui découvre la bestialité de Neytiri (on sent vraiment cette folie à travers son regard) d’abord dans l’écran qui lui montre la mort de son père, puis dans la scène finale où elle est devenue incontrôlable au point de menacer de le tuer. Et la plus belle de ces scènes « en écho » est bien entendu celle où l’on entre dans la gueule d’un Tulkun. Tout d’abord aux côtés de Loak, convié par Payakan à découvrir son histoire. Ensuite, aux côtés des baleiniers ayant capturés une Tulkun femelle afin de prélever la partie émotionnelle de son cerveau, qui servirait dit-on à stopper le vieillissement humain et servirait par la même occasion à financer de nombreuses recherches scientifiques.

     Les échos apparaissent aussi d’un film à l’autre, tant les deux films se dévorent aisément dans la continuité. On se souvient que le climax final d’Avatar (Neytiri sauvait la version humaine de Jake) faisait écho à son ouverture, (un frère meurt quand l’autre renaît) et tenait autant d’une fête funéraire que d’une cérémonie baptismale. A ce petit jeu de miroirs, l’opposition et les similitudes entre Jake Sully & le colonel Miles Quaritch sont passionnantes. Si la renaissance de Quaritch d’Avatar, la voie de l’eau évoque celle de Sully dans le premier film – jusque dans son opposition : l’avatar de Jake y retrouvait l’usage de ses jambes brisées quand l’avatar de Quaritch ici brise brutalement le crane de son clone humain. On retrouve cette dualité en miroir déformé dans le dressage de l’Ikran. Il y a clairement une ambiguïté, qui se profile ensuite, dans la mesure où ils sont tous deux aux prises avec la protection de leurs progénitures respectives.

     Bien sûr, des choses qui en apparence me plaisent moins, j’en vois des tonnes. Je le disais ; le film est tellement dense qu’il tente bien plus, qu’il rate donc plus aussi. Premier exemple qui me vient à l’esprit : Les sous-titres utilisés pour traduire le Tulkun et ainsi comprendre la discussion entre Loak & Payakan. D’autant que la barrière de la langue est au préalable évoquée. Puis c’est oublié, d’un revers de main. C’est une (telle) facilité qu’on retrouve peu chez Cameron, me semble-t-il. Et globalement la voix off me pose problème : Elle illustre ce qu’on a déjà compris, elle ne sert in fine à rien. L’univers musical m’a semblé plus étriqué, là aussi. Moins intéressant que dans le premier volet, qui renfermait déjà l’univers musical le moins intéressant de la filmographie de Cameron. C’est d’autant plus regrettable que le film en est inondé jusqu’à la saturation. Mais rien ne marque vraiment hormis quelques percées Horneriennes qui évoquent son travail sur Apocalypto, et bien entendu l’instant de la mort de la mère Tulkun et son bébé, scène terrible, durant laquelle est reprit le thème entendu pour la chute de l’arbre-mère dans le premier Avatar.

     Il y en a d’autres, bien sûr. Mais j’ai davantage envie de rester sur ce qui me plait – et qui m’aura fait m’y déplacer à trois reprises en salle en un mois – et me semble emporter le tout dans un vertige de cinéma total, dans l’urgence, à l’image de cette idée d’éclipse, qui renvoie encore au génial Apocalypto, de Mel Gibson. Quoiqu’il en soit, j’ai trouvé ça fabuleux, dans la lignée du premier, mais dans une version plus démesurée encore (pour le meilleur et le moins bon, mais qu’importe) avec une simplicité narrative parfaite, un sens de l’action à tomber et un vertige de plus de trois heures qui passent comme deux. Et avec un « épisode » central incroyablement radical, d’une beauté et d’une douceur inouïes, qui prépare le final dantesque qui ira mixer Abyss, Titanic, Terminator 2. Du Cameron à l’état pur et en mode bulldozer, physique et émotionnel.

Ernest & Celestine, le voyage en Charabie – Jean-Christophe Roger & Julien Chheng – 2022

16. Ernest & Celestine, le voyage en Charabie - Jean-Christophe Roger & Julien Chheng - 2022En avant la musique.

   6.0   Si l’on fait exception de l’importante série de livres qui porte le nom de ces deux personnages emblématiques, l’ours grincheux & la souris énergique, Ernest & Célestine sont apparus la première fois au cinéma en 2012 dans un long-métrage magnifique, retraçant le quotidien puis la rencontre de deux êtres qui à priori ne doivent pas se rencontrer et qui finissent par s’apprécier et s’unir contre l’ordre des choses. C’était un vibrant film politique, social, une puissante ode à l’amitié et la différence, dessinée à l’aquarelle. Aussi bien pour les petits que les grands. Une réussite majeure dans l’animation, à mon humble avis. Mes enfants en sont fans.

     Plus tard, nous avions vu Ernest & Célestine en hier, constitué de quatre épisodes, assez proches de l’esprit des livres et littéralement fait pour les fêtes de Noel. Ernest & Célestine, le voyage en Charabie est donc le deuxième long-métrage des aventures de nos deux trublions. Une séance avec les enfants, bien entendu, qui ont adoré. Il me semble que cet épisode marque toutefois le pas, si on le compare à celui réalisé il y a dix ans. On en retrouve le ton, le charme, le rythme, la dimension satirique, mais peut-être avec beaucoup plus de lourdeur.

     Afin de réparer le violon de son ami et contre son avis ronchon, Célestine part en Charabie – le pays d’Ernest, où se trouve notamment le luthier en question – et essuie une tempête de neige, sauvée in-extrémis par son ours préféré. Arrivés en Charabie, pays sublime, coloré, entouré par les montagnes, la petite souris découvre que l’endroit renferme un régime totalitaire qui traque tous les musiciens, les instruments et les notes interdites. On y tolère que le Do. Un voyage qui révélera donc ses surprises et en premier lieu les origines d’Ernest et ce qui conduisit à soin exil.

     La seule devise qui règne ici « C’est comme ça et pas autrement » n’est bien entendu pas du goût de certains – dont un mystérieux justicier masqué (je n’y ai vu que du feu), allié à un réseau de maquisards auquel Ernest & Célestine vont apporter leur précieuse aide et faire souffler un vent de poésie et de liberté. Attendu, par les temps qui courent, mais salvateur, toujours tant la Charabie fait évidemment pot-pourri de tous les régimes de notre monde. Moins réussi que le précédent, dans l’ensemble, mais chouette malgré tout.

Le pharaon, le sauvage et la princesse – Michel Ocelot – 2022

09. Le pharaon, le sauvage et la princesse - Michel Ocelot - 2022Liberté au cube.

   5.5   En sortant, mon fils me dit que le point en commun entre ces trois contes c’est qu’ils sont à chaque fois des histoires d’amour. C’est un peu mon regret. Que le noyau soit systématiquement cet amour impossible entre une femme et un homme, qu’on navigue dans l’antiquité égyptienne, l’Auvergne médiévale ou l’empire ottoman. D’autant qu’à l’exception du second conte (Le plus beau et de loin) c’est le point de vue du prince qui nous guide. Bon, Ocelot a bientôt quatre-vingts ans aussi. Et Dilili à Paris, avec son ancrage dans La belle époque, son name-dropping, son discours politique, était adapté au circuit pédagogique. Ici on va dire que si ces romances impossibles et ces personnages au fort désir de liberté ne révolutionnent rien, l’écrin formel dans lequel ces trois récits évoluent est on ne peut plus séduisant, tant tout y est beau, magnifiquement cadré, très doux, raffiné dans ses contrastes mais aussi dans son verbe. Ocelot y reprend la recette de ses collections de courts réunis dans un long, avec en exergue de chaque une narratrice s’adressant à un public – nous, bien entendu – et écoutant ce qu’ils souhaitent qu’on leur raconte, afin d’en créer une histoire, plutôt plusieurs car « ceux qui n’ont qu’une histoire à raconter n’ont pas beaucoup d’imagination » dit-elle. Ici les ombres chinoises dans le deuxième conte, m’évoquent la beauté plastique de Princes et Princesses (2000) ou Ivan Tsarevitch et la princesse changeante (2016). Celui des trois que je retiendrai vraiment. Peut-être ce qu’Ocelot a fait de plus beau. Ce qui écrase (trop) les deux autres, à mon avis. Cette structure et ce rythme semblent avoir bien fonctionné sur mes enfants, en tout cas.

 

Buzz l’éclair (Lightyear) – Angus MacLane – 2022

07. Buzz l'éclair - Lightyear - Angus MacLane - 2022Vers l’infini, mais pas au-delà.

   6.5   Le film est globalement rejeté, par le public et la presse, je ne comprends pas. C’est vraiment super. Peut-être pas du niveau des quatre Toy Story mais qu’importe.

     C’est un spin-off en forme de one shot assez parfait : C’est vrai, pourquoi toujours vouloir faire des ponts, des suites ? Ce film-là se suffit à lui-même. Il est un peu à Toy Story ce que Rogue One est à Star Wars.

     L’idée de base est géniale : Buzz l’éclair se réclame d’être le film qui rendit Andy, le petit garçon de la franchise Toy story, fan du jouet ranger de l’espace.

     Après avoir condamné, à la suite d’une erreur de pilotage, les habitants d’un vaisseau à vivre sur une planète inconnue, Buzz tente de s’en échapper mais dans une succession de ratés aux vertiges temporels imposants : à chacun de ses retours, quatre ans se sont écoulés pour les autres. C’est l’ouverture de Là-haut qui croise Interstellar.

     Le reste fait seulement office de film d’action, avec une drôle d’équipe à construire et un méchant à affronter (Zurg, évidemment), ainsi Buzz l’éclair manque clairement d’émotion, surtout au regard de la franchise et de la belle promesse que constituent ses vingt premières minutes.

     Mais ce serait grossier de bouder son plaisir, tant de plaisir j’en ai eu durant cette agréable projection de juillet avec mes enfants. Quel bonheur de les entendre rire à gorges déployées à chacune des apparitions / répliques du chat Sox, qui est génial.

     Dieu sait que l’idée, pourtant, ne m’emballait au préalable pas des masses. Enfin pas moins que celle de faire un Toy Story 4 après le sublime final de l’épisode 3. Finalement j’ai préféré ce Pixar-là à un autre sorti cette année, Turning red, qu’on encense, à mon avis, beaucoup trop.

     A part ça, on ne le dira jamais assez, mais quel plaisir de revoir un Pixar en salle : Buzz l’éclair étant le premier du studio à sortir sur grand écran depuis le début de la pandémie. Foutue plateformes… Y a que sur grand écran que l’on profiter d’une telle animation, encore une fois, aux petits oignons !

La petite bande – Pierre Salvadori – 2022

23. La petite bande - Pierre Salvadori - 2022Childs moves.

   7.5   C’est un vrai film pour enfants, qui ne les prend jamais pour des demeurés, qui ne sonne pas faux. Avec une écriture fine et engagée, des dialogues ciselés et réalistes (le fait qu’il y ait un gros mot dans chaque phrase déjà), une mise en scène limpide et inspirée, une interprétation irréprochable. C’est une superbe comédie d’aventure, un peu écolo, un peu mélancolique, qui se déroule en Corse.

     A la suite d’un exposé sur l’écologie, une petite bande de gamins de douze ans entreprend de faire sauter l’usine chimique du village qui pollue leur rivière. Si au départ on se dit que c’est un prolongement de La guerre des boutons ou des Goonies, est-ce que finalement, ce n’est pas plutôt un mélange surprenant et pour enfants du Night moves, de Kelly Reichardt et du Breakfast club, de John Hugues ?

     Car c’est aussi l’histoire d’une rencontre, d’une bande qui se crée (sur des mensonges) autour d’une occasion (une journée de colle pour l’un / une opération commando-écolo pour l’autre) avec des gamins qui vont s’ouvrir et se confesser les uns aux autres et comprendre que leur plus grand bonheur c’est d’être ensemble. La nonchalance du film se pare alors d’une gravité assez déconcertante, glissant la comédie d’aventure vers la fable cruelle.

     Au gré de ses nombreux rebondissements (le kayak d’essence, la prise d’otage, le cinquième complice, la cabane dans les bois…) le film a un parfait timing comique (ma salle était hilare, petits et grands compris, notamment durant la scène de l’accent anglais) chose qui parfois peut me gêner chez Salvadori (ou parfois aussi chez Rappeneau ou De Broca, par exemple) : Je n’avais pas aimé En Liberté à cause de cet effet trop-plein. Là, probablement grâce aux enfants, il trouve le ton et le rythme justes. D’autant que l’enfance fait toujours parti de son cinéma : Qui sont « Les apprentis » marginaux sinon des grands enfants ?

     Et puis Salvadori y insuffle de belles idées de réalisation : les ombres des masques d’animaux sur un mur, les plans fixes sur des échanges de mots en classe ou des instants de magie en suspension, notamment entre Cat et Fouad « amoureux l’un de l’autre sans le savoir » pour reprendre les mots d’Aimé. Et le film se déroule en grande partie en pleine forêt. Un bonheur. Il faut que j’y retourne avec mon fils (Chose faite un mois plus tard). Je pense que ça doit être parfait entre dix et douze ans.

Jurassic world dominion – Colin Trevorrow – 2022

???????????????Les gardiens de la franchise.

   3.5   Un sixième volet qui fait illusion – de plein de manières – mais qui s’avère in fine pas si différent, si on observe attentivement, de L’empire des fourmis géantes, de Bert Gordon.

     Sa première illusion, assez évidente, c’est qu’il a des sous, donc ses dinosaures, en numérique ou en animatronique, sont assez beaux. Ils ne sont pas bien mis en valeur, mais c’est un problème de mise en scène, c’est autre chose.

     Sa deuxième illusion c’est d’être une suite : Si on a grandi avec Jurassic Park, on a envie de voir un troisième Jurassic world, d’autant que le précédent (signé Bayona) était plutôt réussi, très visuel. Quand on grandi avec Jurassic Park, les dinosaures au cinéma c’est sacré : même quand ils sont sous employés, dans Toy Story ou dans le King Kong, de Peter Jackson.

     Troisième illusion et pas des moindres : Il m’a permis une sortie en famille, en pleine fête du cinéma, avec mon fils qui connait le Spielberg par cœur et qui adore aussi les suites. Difficile de bouder ce plaisir.

     Quand bien même ce plaisir se soit souvent effondré durant une séance interminable (2h26, sérieusement ?) et un film archi mal branlé, et cela dès les premières minutes de cette bouillie de spot TV immonde, qui résume maladroitement la situation, qui reprend la suite de ce que promettait le volet précédent.

     J’avais mal à mon Spielberg. D’autant que le film s’assume pleinement dans l’ère du temps : cumuler le fait d’être une suite, un remake voire un reboot. Il y a aura du Jurassic park partout. Il me semble que Bayona s’en sortait plus subtilement, dans le précédent, lui. Là c’est souvent grossier (la bombe de mousse à raser, le plan de découverte des sauterelles (des sauterelles !!) où Ellie Sattler ôte ses lunettes, la scène finale dans l’hélicoptère etc…) quand c’est copié sur Jurassic park.

     Mais le film ne s’en tient pas là et cumule les références variées, arpentant aussi les terres de James Bond, d’Indiana Jones, de Jason Bourne, de Mission Impossible : La scène à Malte (très chouette en passant) qu’est-ce que ça vient foutre là, franchement ? Ou pire, ces films ont tendance à s’inspirer des daubes super-héroïques actuelles, ainsi il ne sera pas surprenant de voir un avion se crasher dans un lac gelé et de voir en sortir Chris Pratt & Bryce Dallas Howard, sans une once d’égratignures. Les gardiens de la galaxie, en somme.

     J’aurais aimé y voir davantage d’idées (du niveau d’un verre d’eau qui tremble, je sais pas) et davantage de contrastes : J’ai l’impression qu’il y fait nuit en permanence, comme dans les films DC ou Marvel, c’est insupportable. C’est vraiment un cache-misère, la nuit. Mais tout le monde n’a pas le talent pour faire un Blade runner.

     Autre chose : Que le film soit invraisemblable, ok, ça ne me dérange pas, les films de la franchise le sont rarement, vraisemblable, après tout on parle de faire cohabiter humains et dinosaures. Mais pourquoi les personnages sont-ils devenus si antipathiques ? Si débiles ? Mon cœur saigne quand je retrouve Ellie Sattler, le professeur Grant & Ian Malcolm. Plutôt les ersatz de leurs personnages, inchangés en trente ans, mais aseptisés, leurs mauvaises copies, comme s’ils avaient été remplacés façon L’invasion des profanateurs de sépultures.

     Je garde le meilleur pour la fin : L’anthropomorphisme. Pourquoi les dinosaures ressemblent de plus en plus à des clébards ou des humains ? Je pense qu’il y avait déjà ça chez Spielberg, c’est difficile d’y échapper, surtout venant de créatures dont il est difficile de savoir leurs vrais comportements. Mais il y trouvait le bon dosage, une étrangeté, une surprise. Ici on peut les dresser en leur tendant la main façon salon nazi. Pire encore, ils peuvent faire semblant de mourir. Dans Fallen kingdom, l’indoraptor faisait semblant de dormir, déjà, mais c’était une création hybride, guerrière, pourquoi pas. Là c’est le Tyrannosaure, celui du film de Spielberg, qui reprend in extremis son statut de « roi de la jungle » qui feint d’être mort sous les coups d’un Giganotosaure. Manquait plus qu’un clin d’œil. Et un hug avec son nouveau copain, le Therizinosaure. Tranquilou bilou. Un nanar à 165 millions, quand même.

Le chêne – Laurent Charbonnier & Michel Seydoux – 2022

04. Le chêne - Laurent Charbonnier & Michel Seydoux - 2022Crise d’épilepsie.

    3.0   C’était un petit coup de poker que d’emmener les enfants voir cela. D’une part car s’ils ont l’habitude de voir des docus animaliers à la télé, ils regardent souvent par intermittences. Ils glanent des images. D’autre part car c’est un film sans parole. C’est tout ce dont je savais. Vu le titre on se doutait qu’on allait voir la vie d’un vieux chêne, plutôt la vie sur et autour de ce vieux chêne.

     Mon fils a plutôt bien vécu la séance, surtout les aventures du petit écureuil. Il a aimé sursauter quand le balanin chevauche un crapaud qui ouvre soudain grand la gueule. Il a aimé voir des sangliers d’autant qu’on venait d’en voir un traverser la route devant nous quelques jours plus tôt. « C’était mignon » a-t-il dit en sortant.

     Ma fille a trouvé le temps très long. Distraite en grande partie par les mulots, l’épisode de la couleuvre ou celui de l’aigle coursant le pauvre geai. Et bien entendu requinquée pendant le chapitre bébés (marcassins, geais, mulot…). Mais globalement elle a passé son temps à me signaler qu’elle s’ennuyait.

     Ennui total pour moi aussi. Je vais tenter d’expliquer pourquoi. Charbonnier & Seydoux optent pour le docu sous forme de rollercoaster jusqu’à intégrer des séquences souterraines de champignons en CGI. Ils vont donc filmer dans les recoins, avec de minuscules caméras, j’imagine. Et quand ils simulent un temps orageux il n’est pas difficile de voir la faune effrayée, puisque c’est leur façon de filmer, de bouger la caméra, qui les effraie. C’est peut-être un mauvais procès, qu’importe ça m’a beaucoup dérangé.

     Ça et le fait qu’il n’y ait pas un plan qui dure plus de trois secondes. C’est un truc de monteur épileptique, pour tenter d’insuffler du rythme, de façon complément artificielle. C’est un film qui refuse le calme et la lenteur. Quand le serpent grimpe l’arbre, c’est un enchaînement de gros plans sur une faune pétrifiée, accompagnés d’une musique adéquate. Mais au final il n’y a aucun danger. La nature est vue comme un terrain de jeu rigolo pour tout le monde.

     C’est un film tout sauf documenté. Tout sauf contemplatif. C’est un tour de manège. Avec les attractions « inondation chez les mulots », « le geai millenium », « Comme un serpent sur la branche » et autre « Le mulot et le renard ». Entre ces attractions, on s’ennuie, on fait la queue – sans pouvoir parler – et on est abreuvé d’images jolies mais publicitaires, épileptiques.

Vaillante (Fireheart) – Laurent Zeitoun & Theodore Ty – 2022

34. Vaillante - Fireheart - Laurent Zeitoun & Theodore Ty - 2022Entre deux feux.

   5.0   Sorte de Backdraft féminisé mixé à du Tootsie inversé, dans le New York des années 30, Vaillante, production franco-canadienne (Les studios L’atelier Animation, qui avaient précédemment fait Ballerina) ne brille ni par son animation, passe-partout, sans invention ni par son récit, ultra prévisible et programmatique. On est vraiment sur un terrain balisé, singeant les standards hollywoodiens. On s’en remet à cette relation père/fille et au travestissement de Georgia, qui se rêve pompier dans une époque où les femmes sont encore loin de pouvoir être des gardiennes du feu. Le film est parsemé de gags burlesques archi lourds – pour faire marrer les gamins – et running gags réchauffés comme les vingt séquences où le chauffeur narcoleptique s’endort. Il ne suffit pas de balancer un gag référence à Safety Last pour réussir un film. Et encore moins de placarder un discours féministe aussi neuneu. Moins désagréable à voir toutefois quand on accompagne les enfants. Surtout en salle.

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silencio


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