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Near dark – Kathryn Bigelow – 1988

10. Near dark - Kathryn Bigelow - 1988Les damnés de la nuit.

   8.0   Pour son deuxième film – mais le tout premier qu’elle réalise toute seule – Kathryn Bigelow souhaite faire un western. Le studio refuse. Elle trouvera un autre moyen d’imposer ses partis-pris. En effet, Near dark sera un film à la croisée de deux genres : Le western et le film de vampires. A l’époque, le premier est en berne (il faudra attendre le retour d’Eastwood quelques années plus tard, avec Impitoyable) quand le second est en vogue : La même année sort Génération perdue (The lost boys) de Joel Schumacher, responsable probable du bide en salle de Near dark. En effet, le film ne marche pas du tout. Il disparait, avant de refaire peau neuve dans son exploitation vidéo, où il gagnera rapidement un statut de film culte.

     En résulte un film aussi inégal que fascinant, une sorte de croisement nocturne entre La horde sauvage (qui est crânement cité le temps d’une scène dans un motel assiégé), Bonnie & Clyde et Mad Max. C’est un film de vampire débarrassé de ses attributs gothiques, plus à l’os, le nez dans la poussière plutôt que dans la mythologie : Pas de canines apparentes ni d’ail, le mot vampire n’est même jamais prononcé. On sait juste qu’ils sont allergiques aux rayons du soleil. On y trouve néanmoins tout l’aspect sensuel, glauque, violent et romantique cher au cinéma – en gestation – de Bigelow. Un peu comme le premier Terminator (toute proportion gardée) auquel on pense énormément, notamment durant la scène du camion. Rien d’étonnant en soit, puisque les deux films partagent le même chef opérateur : Adam Greenberg.

     Arizona. Une nuit, Caleb rencontre Mae. Il la séduit, l’embrasse tandis qu’elle le mord, avant de disparaître. Le premier tiers du film est magnifique, complètement engourdi et fait d’une part le récit de cette rencontre puis celui d’une transformation. Puis le film bifurque. Nous fait entrer dans le quotidien de cette famille (Jesse, Severen, Diamondback, Mae, Homer) marginaux cyniques et tragiques condamnés à errer la nuit, hors du temps et à tuer pour survivre. Plus tard il y a deux grandes scènes fulgurantes. Un massacre dans un bar d’abord, pur moment de violence glauque et jubilatoire – dont on dit qu’elle aurait inspiré Oliver Stone, pour Tueurs nés. Quant à celle qui suit, au motel, elle réactive ouvertement La horde sauvage, de Peckinpah, auquel on pense dès le premier plan du film avec le moustique.

     Near dark est un film très vaporeux, qui préserve de grandes zones de mystères, à l’image de l’origine des vampires. Tout juste saura-t-on que Jesse était jadis un sudiste, qu’il a rencontré Diamondback sur le bord de la route et qu’ils sont tous deux responsables de l’incendie de Chicago. On apprend aussi que Mae est devenue ce qu’elle est en donnant des cours de maths à Homer qui en est tombé amoureux. Le cœur du film c’est la famille, celle qu’ils se sont créés. Celle dont on peut faire partie si on accepte ses codes, ce qui s’avère plus difficile pour Caleb qui ne parvient pas à tuer. La famille donc, mais aussi l’omniprésence de la nuit, qui évoquent assez nettement, dans un autre registre horrifique, La colline a des yeux, de Wes Craven.

     Par ailleurs, Near dark est aussi un film bien ancré dans son époque, dans ses couleurs, ses filtres, son ambiance, qui plus est marquée par la musique de Tangerine dream. De loin on pense évidemment à Police fédérale Los Angeles, qui le précède (Il faut rappeler que Bigelow avait fait jouer Willem Dafoe dans The loveless) ou Miracle mile, qui le suit. On peut aussi y voir une matrice du Vampires, de Carpenter. Par ailleurs on y retrouve trois acteurs d’Aliens : Bill Paxton (complètement fou), Jenette Goldstein (carrément flippante) et le génial Lance Henriksen qui ressemble par instants, dans ses postures, à Nosferatu.

     Découvrir Near dark si tardivement c’est assister au chainon manquant permettant de comprendre toute l’œuvre de Kathryn Bigelow, centrée sur la violence et l’addiction. Quoi de plus forte dépendance que celle du sang pour le vampire ? Quoi de plus violent que leur réflexe de survie, qui consiste à tuer son prochain en s’abreuvant de son sang ? Bigelow tente de filmer le jour, l’astre, les grands espaces – elle se rattrapera avec Point break – mais ici, elle est condamnée à filmer la nuit, autant que ses personnages sont condamnés à vivre la nuit et à se souvenir du jour. Near dark est un film très sale, mais graphiquement, le film est somptueux, la lumière démente : Notamment lors de la très belle rencontre nocturne, ces silhouettes aux clair de lune sur la dune ou ces corps qui flambent à la fin.

Point break – Kathryn Bigelow – 1991

033. Point break - Kathryn Bigelow - 1991Riders on the wave.

   10.0   L’intrigue de Point break, le quatrième film de Kathryn Bigelow, est un classique du récit d’infiltration : Johnny, un ancien joueur de football, reconverti agent du FBI, se voit charger pour sa première affaire d’enquêter sur le gang des « anciens présidents » responsables de multiples attaques de banques. Selon son équipier, les braqueurs seraient une bande de surfeurs. Le jeune flic va dès lors infiltrer le milieu, se lier d’amitié avec Tyler et faire la connaissance du mystérieux et mystique Bodhi. Difficile à croire que l’on puisse porter au pinacle un film qui accouche d’un pitch si trivial. Et pourtant. C’est toute la magie d’un ensemble en totale synergie, créé par Bigelow, qui n’avait jusque alors réalisé que trois films, nettement plus confidentiels : The loveless, Near dark, Blue steel.

     Point break est un gros carton, lors de sa sortie. Par ailleurs, il faut savoir que cette réussite démarre de très loin. Au préalable, c’est Ridley Scott qui devait se charger de sa réalisation. Des acteurs comme Charlie Sheen, Val Kilmer ou Johnny Depp étaient prétendus. Puis Largo Entertainment récupéra le projet, le tout premier pour cette toute nouvelle boite de production. James Cameron, alors à l’exécutif, propose à son épouse qui est en quête d’un nouveau projet. Elle impose Keanu Reeves : Le film est ensuite renommé « Johnny Utah ». Puis bientôt « Riders on the storm » (d’après la chanson des Doors) dès l’arrivée de Patrick Swayze. Puis finalement « Point break ».

     Dans le langage du surfeur, le « point break » est une vague déferlant sur fond de rocher. Il y a déjà une grande violence là-dedans. C’est en somme un grand danger, un point de rupture, de non-retour. Soit tout ce qui fera l’évolution du personnage, Johnny, celui par qui nous allons entrer dans cette histoire et nous immiscer dans ce monde. Il faut donc que ça se chevauche, qu’il y ait une jonction avant de produire une violente disjonction, telle une vague cassant sur la roche. Lorsque les premiers crédits défilent sur l’écran au tout début du générique, les noms des deux interprètes se font face, s’entrelacent puis se disjoignent. Il en va de même pour le titre du film.

     La séquence, qui accompagne ce générique introductif, annonce de façon signifiante le programme, en proposant d’emblée un duel à distance entre Johnny Utah, le flic et Bodhi, le surfeur. Quand le premier tire sur des cibles, le second se pavane dans les vagues. Avec un peu d’astuce de montage et la musique aérienne signée Mark Isham, on la sensation que l’un tente de tirer sur l’autre, mais que ce dernier évite les balles sans pour autant chercher à le faire. A moins que ce soit l’inverse : Que le surfeur effectue sa parade en envoyant la vague envelopper sa proie, condamnée à se cacher, se rouler par terre avant de se défendre.

     Leur point commun s’impose d’emblée : Ce sont les meilleurs, chacun dans leur domaine de prédilection. On apprend que Johnny n’a raté aucune cible. Quant à Bodhi, il aura expérimenté les positions les plus folles les pieds collés sur sa planche. Et il s’agit surtout pour Kathryn Bigelow d’en effectuer une première confrontation (homo)érotique : La fumée blanche qui s’échappe du canon à chaque détonation se marie avec l’écume chassée par la planche. La pluie s’écoulant sur le corps du flic s’oppose à la silhouette du surfeur dessinée par la lumière du soleil couchant.

     Deux motifs, déjà : La terre et l’eau. La terre est hors-champ dans les plans offerts au surfeur, à la fois sous l’eau et sur les rives hors du cadre. Du côté du policier, qui effectue des roulades dans la terre humide avant d’atteindre ses cibles en carton, la pluie pénètre verticalement. A noter que les noms sont aussi des éléments très signifiants : Le surfeur se fait appeler Bodhi, terme qui dans le Bouddhisme représente l’éveil spirituel ; Quand le policier se nomme Utah, portant ainsi le même nom qu’un Etat de l’Ouest américain.

     Pourtant, dès la double séquence suivante, il s’agit de quitter la chorégraphie léchée, aérienne, abstraite pour entrer dans une tout autre danse, sèche, brutale. D’une part une steadicam suit Johnny lors de son arrivée au FBI de Los Angeles où il sera reçu comme un « petit footballeur de merde » « plein de foutre et d’hormones » fraichement débarqué du middle west. La caméra arpente les bureaux dans un mouvement permanent, quant au débit de parole, il en impose par sa vitesse et sa grossièreté. En parallèle, une caméra mobile, mais dans un montage nettement plus cuté, va s’intéresser à Bodhi, sans qu’on ait la certitude qu’il s’agisse de lui (puisque le personnage est masqué) mais rétrospectivement c’est évident, Bigelow ne cherche aucunement à nous duper : Il est déjà une icône, un mirage se jouant du système, de la loi, quand l’autre sera celui qui la représente.

     Le film s’est ouvert dans un curieux mélange de vagues et de coups de feu, de planche et fusil à pompe. Avec un personnage face à un autre personnage, déjà dans un affrontement abstrait. Pourtant le film glisse d’emblée à la fois dans le film de groupe et le buddy cop movie. D’un côté il s’agit d’entrer dans le braquage, de l’autre de faire la connaissance avec l’équipier, Angelo Pappas, un rescapé de Khe Sanh, quelque peu désabusé. Notre première accroche avec ces deux mondes joue sur une subtile ambiguïté : Pappas est sur le point de sauter dans une piscine pour récupérer deux briques à l’aveugle, quand les braqueurs arpentent les guichets, fusils à pompe sous le bras. Le montage parallèle se termine sur un arrêt sur image : Celle du cul d’un braqueur (image importante du récit) saisie en couleur quand on assiste au braquage, puis en noir et blanc à travers la vidéo de surveillance visionnée par Johnny & Angelo. Le ton est donné en dix minutes : Point break ira vite. Très vite. Aucun répit, deux heures durant.

     L’ambigüité, le film se l’approprie de plus en plus à mesure qu’il se déploie. Afin d’entrer dans ce monde, Johnny fera la connaissance de Tyler, qui lui fera rencontrer Bodhi. Difficile de savoir de qui Johnny sera finalement le plus amoureux, passionné. Bigelow capture cette ambiguïté homosexuelle jusque dans leur proximité : Si Tyler et Johnny sont saisis lors d’une scène de baiser ou d’un réveil après l’amour (deux scènes magnifiques par ailleurs, très sensuelles) l’étreinte/altercation entre Bodhi & Johnny n’est pas en reste : Déjà dans la séquence de football sur la plage, plus tard sous la toile de parachute, pour finir par un combat menotté à la toute fin. On ne peut faire plus éloquent.

     En passant, impossible de parler de Point break sans en évoquer son génial casting. Passons sur Patrick Swayze (tout juste auréolé par Dirty dancing & Ghost) et Keanu Reeves (qui tournera bientôt chez Van Sant, Coppola ou dans Speed) qui sont tous deux impeccables, il faut surtout souligner la grande tenue des interprètes secondaires. Lori Petty, dont j’étais amoureux alors, mais je le serai moins plus tard dans Orange is new black. Gary Busey, génial side-kick, qui condense à lui seul la moitié des répliques cinglantes du film, qu’il m’arrive régulièrement d’utiliser (« Utah, j’en veux deux ! » ou « J’espère que t’es pas en train de draguer les petites minettes » ou « Encore un footballeur de merde » ou « Pizza froide, rendez-vous au petit dej, salut ! » ou « C’est bon pour le dos » ou « Arrête merde tu m’arraches les poils » ou « Parle dans le micro si t’as quelque chose à dire ! » ou « Lâche-moi les burnes, j’suis à fond » ou « Ah c’est gentil de faire une apparition »). Pour rester côté flics, il faut aussi mentionner l’agent Harp, formidable connard. Et chez les surfeurs, il y a d’abord les quatre nazillons trafiquants (dont un membre des Red hot chili pepers) qui font forte mais brève impression ; et bien entendu il y a le clan de Bodhi : Nathanial, Grommet, Roach et Rosie. A noter que les deux premiers sont de vrais surfeurs, ce qui permettait à Bigelow de les filmer assez aisément dans l’eau et d’accompagner les doublures des autres afin qu’on y voit que du feu. Mais tous sont formidables. Leur personnage respectif aussi puisqu’on est triste de les voir mourir. Tandis qu’ils sont en apparence archétypale, chacun d’eux existe en une scène ou évolue au gré des soubresauts du récit.

     Autre élément qui fait la beauté du film : Dans Point break, les braqueurs portent des masques d’anciens présidents américains : Carter, Johnson, Nixon & Reagan. Ça ne pourrait être qu’un détail, un gimmick ou un simple costume iconique, tape-à-l’œil mais il se trouve que leur leader et gourou, Bodhi, déverse par touches sa haine de la société capitaliste. Il défie l’ordre établi, se jouant de la bien-pensance d’une Amérique sous Bush portant les stigmates des quatre précédents. Braquer affublé de masques à l’effigie de politiciens c’est déjà tout un programme satirique à dessein politique. Et si le fait de braquer une banque ou bruler chaque voiture utilisée pour le braquage, sont pour lui des shoots d’adrénaline au même titre que le surf ou la chute libre, ce sont des actions qui racontent aussi son rejet du monde, des conventions, de la consommation de masse, du mimétisme occidental. Rejet que l’on pourrait accoler à Bigelow elle-même, tant elle érotise le personnage à mort – et jusque dans sa mort – et tant elle est aussi une figure badass en marge du marché cinématographique hollywoodien.

     Et pourtant, le film semble cocher toutes les cases. Il est parfois prévisible, un peu programmatique, mais toujours mu par une dynamique folle. On y filme les surfeurs dans la vague, de vrais sauts en parachute. On nous offre une course-poursuite en bagnoles, suivies d’une course-poursuite à pied, entre les ruelles, maisons et les jardins. On assiste à trois braquages (Et avant celui de Heat, on n’avait rarement vu cela avec cette puissance-là) de manière chaque fois très différente, dont un qui finit dans un bain de sang. Le film offre aussi deux grandes scènes d’intervention musclée, fusillades dans une baraque puis sur un tarmac, qui virent au massacre. Il y a une générosité permanente, un engagement visuel, rythmique qu’on ne retrouve plus nulle part. Avec, en plus, un vrai sens de la dramaturgie, un vrai cachet romantique : Des exécutions terribles et une retrouvaille bouleversante dans un désert du Mexique.

     La mise en scène de Bigelow colle complètement à ses personnages, animés d’une ivresse de vie en permanence. Car Point break est un grand film sur la dépendance à l’adrénaline. Une spécialité bigelowienne, qu’on trouvait déjà dans Near dark (les vampires en quête de sang) ou Blue steel (le désir de porter l’insigne et faire régner l’ordre) et qu’on trouvera de façon encore plus significative dans ses œuvres futures : l’addiction aux désamorçages de bombes (Démineurs) et l’obsession pour la traque de Ben Laden (Zero dark thirty). Avec la violence, la dépendance (sous toutes ses formes) est le cœur de l’œuvre de Kathryn Bigelow. Pourtant, ce sont chaque fois des films ancrés dans leur époque : Ici une sorte de thriller spectaculaire, portant les coutures de la génération MTV, maniant les belles gueules, le polar et les sports extrêmes, tout en testostérone et en adrénaline.

     La toute fin (sublime de désenchantement) du film – tournée par ailleurs plusieurs mois plus tard, tandis que Swayze venait de finir son tournage de La cité de la joie, de Roland Joffé – renvoie au dispositif initial. Mais cette fois, la grisaille semble avoir gagné, la tempête s’est emparée du coucher de soleil, la dureté des visages a dévoré les silhouettes dans l’ombre, le combat au corps-à-corps et le nez dans l’eau remplace la confrontation abstraite. Mais le paradoxe de continuer : Et si c’était Johnny qui arborait dorénavant un pur look de surfeur ? « Tu surfes encore ? » lui demandera Bodhi. « Tous les jours » lui répondra-t-il. Au vieux masque de Reagan jeté aux pieds de son mentor répond bientôt ce badge jeté (façon Dirty Harry) dans la vague. Johnny savait qu’il retrouverait son ami ici, qui s’était confié sur le fait qu’il ne raterait pour rien au monde son rendez-vous à Bells Beach avec la tempête des cinquante ans. En bon petit soldat, il est venu l’arrêter. Cavalerie avec. Mais là encore il agit autrement et le laisse filer, lui offre le droit de mourir comme il en rêvait : « If you want the ultimate, you’ve got to be willing to pay the ultimate price. It’s not tragic to die doing what you love » confiait Bodhi un peu plus tôt autour du feu.

     Certes, je suis très attaché à Point break depuis que je suis gamin. Difficile d’être pleinement objectif à son sujet. Pourtant, dans son registre – l’actioner hollywoodien – il me semble qu’on n’a jamais fait mieux. Qui plus est dans un format si hybride, généreux, tentaculaire. Ne serait-ce que dans son utilisation musicale. Qu’il s’agisse ici des envolées de Mark Isham : Le fameux générique d’ouverture, la séquence de chute libre, l’équipée nocturne ou tout simplement la course-poursuite. Ou bien qu’il s’agisse de morceaux rock empruntés :

-          I want you, de Concrete blonde, lorsque Johnny suit Tyler des jumelles. Gros émoi adolescent que l’ajustement de ce short en jean.
-          Over the edge, des L.A.Guns, autour du feu sur la plage avant que Johnny ne rejoigne Tyler, qui s’inquiète de lui trouver l’œil du kamikaze. 
-          Hundreds of tears, de Sheryl Crow au moment où Johnny persuade Tyler de lui donner quelques cours de surf.
-          If 6 was 9, de Jimmy Hendrix, quand Johnny débarque à la soirée de Bodhi et lui découvre une façon sexy de déguster les vodkas citron vert.
-          7 and 7 is, par Love quand Johnny prend des risques sur Latigo beach et écope d’un bourre pif par le très accueillant Bunker.
-          I will not fall, de Wire train, quand Tyler tente de faire tenir Johnny sur la planche.

     Bref c’est l’une des plus belles et cohérentes bande-son qui soient. Jouant aussi bien sur sa dimension punk que sur ses velléités atmosphériques. C’est très Cameronien, en définitive. On sait que Bigelow était Madame James Cameron à cette époque encore. On sait qu’il est producteur exécutif. On peut aussi considérer qu’il a repris une réplique de Johnny pour Jack, dans Titanic. Quant à Tyler, elle évoque une certaine mouvance cameronienne, tant elle pourrait être un croisement entre Sara Conor, Rose ou Ripley. C’est pourtant à un autre cinéaste auquel on pense devant le duel offert entre Johnny & Bodhi, tant il n’est pas sans rappeler ceux de Manhunter, Collateral ou Heat. En effet, il y a beaucoup de Michael Mann dans Point break. Mann, autre cinéaste ayant révolutionné l’action au cinéma (Miami Vice), autre cinéaste ayant brillé par son duel d’icone (Pacino / DeNiro), autre cinéaste des bandes-son emblématiques.

     Alors d’accord : Point break n’est à priori qu’une banale enquête de police en immersion / infiltration dans le monde du surf. Tout ce qu’il y a de plus classique, aussi bien il y a trente ans qu’aujourd’hui, tant on pourrait aisément citer les films dont il fut la référence ou l’héritier : Drop zone en tête, avec Wesley Snipes & encore Gary Busey, remplaçait les planches par des parachutes, film très dispensable pour rester poli. Ou bien sur le premier Fast and furious qui ne fera rien de plus que changer les surfs en bolides, le talent de mise en scène en moins. Ou bien ce remake ni fait ni à faire qui n’a absolument rien compris à l’original. On pourrait tout aussi bien évoquer ses diverses évocations parodiques, dans La cité de la peur, Brice de Nice ou Hot Fuzz. Bref c’est un film qui traverse incroyablement bien les années. Un grand film populaire, un excellent film d’action, déjà, et, par je ne sais quel miracle, Point break est bien plus que tout cela. C’est la plus belle des vagues. Le « créneau » qu’attend Bodhi à Bells Beach : « Look at it! It’s a once in a lifetime opportunity, man! ».

NB1 : Il s’agit du trois millième papier écrit sur mon blog. Il fallait bien marquer le coup et évoquer un film qui m’est cher.
NB2 : Revu pour le faire découvrir à mon fils, ce 28 août sans savoir que le film fêtait les trente ans de sa sortie en salle française.

Blue steel – Kathryn Bigelow – 1990

15. Blue steel - Kathryn Bigelow - 1990Pain & gun.

   7.0   Entre Near dark (1987) & Point break (1991), Kathryn Bigelow réalise ce savoureux mélange de portrait de femme, de récit initiatique et familial, de polar saupoudré de film de serial killer.

     Si Ron Silver est littéralement en roue libre en psychopathe possédé, déployant tout une batterie de grimaces embarrassantes, Jamie Lee Curtis se révèle souveraine, habitée, bouleversante dans le rôle ambigu de cette femme animée par un désir de justice, de l’uniforme, une obsession pour l’autorité, tout en sous-tendant une vision plus contestataire, cette volonté de faire entrer manu militari la femme dans un monde d’hommes. On y verrait un sous-texte méta qu’on ne serait pas si hors-sujet.

     Et c’est sans doute pour cette dimension théorique que Blue steel s’avère si passionnant. Moins pour cette mise en abyme de cinéaste trouvant son alter-égo fictif, que dans son fétichisme de l’arme à feu. Le générique s’ouvre sur ce flingue, le canon, les douilles. Il servira de catalyseur. Il érotise, il diabolise. Il est même déclencheur de l’intrigue.

     Tandis qu’elle vient d’entrer dans la police, une nuit lors de sa première ronde, Megan Turner (Jamie Lee, donc) doit intervenir lors d’un hold-up. Menacée par l’agresseur, elle l’abbat, froidement. Elle lui vide son chargeur sur la tronche. Elle ne remarque pas que dans la foulée de son intervention, un inconnu, alors au sol, s’empare de l’arme du braqueur tombée près de lui, et disparait.

     L’homme, un riche trader, se découvre bientôt une passion pour ce flingue, le meurtre et une obsession maladive pour Turner, qu’il séduit avant de la persécuter. Entre-temps, Turner se retrouve suspendue de ses fonctions pour son intervention musclée sur un agresseur dont finalement rien ne prouve qu’il était armé. Tout se joue bientôt entre Turner & Hunt. Entre Megan & Eugene.

     On comprend très vite que l’un n’existe pas sans l’autre. Eugène est touché par une sorte de révélation, il est persuadé d’avoir trouvé son double, sa victime à lui, le monstre. Et quand son collègue (Génial Clancy Brown) lui demande pourquoi elle est devenue flic, Turner répond « For him ». Le film tient entièrement sur ce dispositif quasi abstrait. Réalisme et vraisemblance n’ont pas leur place. C’est sans doute la limite du film, c’est aussi ce qui fait son originalité, tant le geste, à la limite du fantastique, fascine.

     Il faut par ailleurs signaler que Blue steel s’ouvrait comme un présage de cette séquence pivot : Turner y faisait ses gammes, lors d’un examen musclé, où elle devait intervenir sur une fausse scène de ménage à main armée. Elle y abattait l’homme avant de se faire surprendre par la femme de ce dernier qui se saisissait de son arme pour la retourner contre la policière novice.

     A l’image du nom de l’antagoniste « Hunt » et du jeu que Silver lui adjoint, le film n’est pas exempt de lourdeurs, Mais l’ambiance new-yorkaise, essentiellement nocturne, est très troublante, anxiogène, renforcée par la musique métallique d’un Brad Fiedel qui semble très inspiré de sa création sur le Terminator, de James Cameron.

K19, Le piège des profondeurs (K-19, The Widowmaker) – Kathryn Bigelow – 2002

29. K19, Le piège des profondeurs - K-19, The Widowmaker - Kathryn Bigelow - 2002La guigne en profondeur.

   5.5   Clairement un Bigelow bas de gamme, mais loin d’être mauvais, contrairement aux vagues souvenirs que j’en gardais. Le film est beaucoup trop long, mal équilibré, surchargé de musique, c’est vrai, mais il se suit aisément, il y a un certain savoir-faire. K19 c’est aussi un film de sujet. Sans doute que ça l’écrase. Qu’importe, c’est tout à l’honneur de la réalisatrice de Point Break de s’en être emparé.

     S’il n’est pas toujours très bien représenté, on pouvait compter sur Bigelow pour tirer quelque chose du film de sous-marin. Avec K19 on est sans doute trop dans l’américanisation du genre, il y sera malheureusement plus que tout question d’honneur, de sacrifice, de héros, d’entente complémentaire. Avec une particularité de taille, tout de même : Cette histoire se déroule du côté des russes, dans un équipage à la solde de Khrouchtchev, qui a l’objectif de répondre aux forces américaines par dissuasion nucléaire.

     On est en 1961, le submersible en exercice transporte donc des ogives mais son voyage se trouve bientôt contrarié par une avarie au cœur de son réacteur. Cette partie réparation du monstre et combat contre la radioactivité est ce que le film réussit de plus intéressant, il y a une vraie tension doublée d’une attention à l’architecture confinée du lieu, ses couloirs, ses écoutilles. On en oublie le sujet même. De nombreux marines se succèdent, afin de poser un circuit de dérivation et des soudures en zone gravement exposées aux radiations.

     Dommage qu’il faille accompagné tout cela d’un affrontement admiratif entre Harrison Ford et Liam Neeson, capitaine et commandant, un poil trop sur le devant de la scène. La fin échoue d’ailleurs dans ce lourd dispositif et n’en finit plus de finir. Les plus sceptiques trouveront que les américains ont trop le bon rôle, les russes celui que l’on moque (bataille d’égos, erreurs en pagaille, équipage incompétent) mais ce serait oublié que le film parvient à faire exister ce groupe, à les rendre humains, fragiles, faillibles, quelque soit leurs grades.

     Que l’intégralité des personnages, russes donc, parlent uniquement l’anglais, est un autre problème. Disons que ça gêne au début puis qu’on s’y fait – comme on s’y faisait progressivement récemment devant la série Chernobyl. Mais on peut trouver le contexte doublement difficile à avaler, entre la langue et le concours de bites entre Gui-Gon & Indiana Jones : Difficile d’attendre de Bigelow qu’elle fasse autre chose que du Bigelow, c’est musclé, testostéroné, on le sait.

     Mais justement : Le fait est que K19 est un film américain. Que le point de vue sur cette histoire russe est américain. En somme, prendre des acteurs anglo-saxons se tient. Mais oui, ça reste un Bigelow mineur (mais cher, donc un échec financier important) surtout au regard de ses trois dernières réussites en date que sont Démineurs, Zero dark thirty & Detroit.

Detroit – Kathryn Bigelow – 2017

14. Detroit - Kathryn Bigelow - 2017Carnage.

   8.0   Voilà bien longtemps que je n’avais pas été à ce point malmené, excité, terrifié, violenté par une « séquence » au cinéma. Ça fait du bien. Si je mets les guillemets c’est uniquement parce que la séquence en question concentre les deux/tiers du film ou quelque chose comme ça, je n’en sais fichtre rien en fait tant ça m’a semblé aussi puissant et magistral qu’assommant et interminable.

     Ce qui est très beau et plutôt rare dans ce genre de film gravitant autour d’un unique bloc séquentiel précis, en l’occurrence l’arrestation de l’Algiers motel (le 25 juillet 1967) c’est qu’on ne reçoit aucunement le geste en tant que performance, le parti pris comme raison au film d’exister. L’instant arrive quand il doit arriver, sans qu’on l’ait attendu ou imaginé ne serait-ce qu’une seconde. Le film existe déjà brillamment avant cette longue séquence. On croit d’abord qu’il va s’étirer ici plus que d’ordinaire avant de passer à autre chose. Mais non, il s’installe-là jusqu’à l’écœurement.

     La première partie du film est en effet très documentée et disparate, s’intéresse à la ville de Détroit en état d’urgence suite aux émeutes de 1967, offert en carnet de route hyperréaliste, avec les dates des émeutes, les noms des différents lieux. Plus étrange dans cette introduction, il n’y a pas de personnage principal clairement identifié mais plutôt des groupes dans le groupe : Trois flics d’intervention, deux agents de sécurité, des émeutiers, les membres d’un groupe de soul music. On passe des uns aux autres sans pour autant croire qu’ils vont converger ensemble vers une séquence centrale en huis clos. C’est ce que j’appelle réussir sa dimension chorale, déjà.

     D’autant que Detroit se permet aussi de s’ouvrir sur un générique animé, plus introductif que didactique et très beau justement parce qu’il est en animation et non en images/vidéos d’archives. Et d’autre part de s’en aller en film de procès. Pas la partie la plus réussie du film d’autant que tout est surligné à nouveau sur les cartons du générique final mais cela permet au film de sortir élégamment et non sur ce coup de poing virtuose qui aurait probablement laissé un amer goût de complaisance.

     Ce qui me plait dans cet épilogue appendice c’est qu’on y voit dès lors que des visages tandis que la première partie s’évertuait à ne montrer que l’action et engloutir l’émergence de vrais personnages. Les personnages sont nés grâce à cette ahurissante partie centrale. Ne reste donc que des visages. Fatigués, tuméfiés, honteux, anéantis. Ainsi que les souvenir de ces trois visages qui ont péri dans ce motel. On voyait une masse – Peut-être moins chez les flics où les deux acteurs connus étaient identifiés d’emblée – on distingue désormais tout le monde, on sait ce que chacun a vécu ou fait cette nuit-là. Celui qui a tué puisqu’il n’a pas compris que ce n’était qu’un jeu. Celui qui est mort pour avoir tiré avec un jouet. Le chanteur de soul qui finira dans un chœur d’église. C’est aussi une affaire de trajectoires.

     L’interprétation parlons-en, elle culmine à un tel degré d’implication, ça file le vertige. Tous sont exceptionnels. Mention spéciale à Will Poulter, acteur au physique ingrat mais qu’il n’utilise pas à des fins grandiloquentes. Il campe magistralement ce flic raciste monstrueux et ce d’autant plus qu’il donne l’impression qu’il est persuadé d’être un bon flic. Tous les acteurs sont toujours géniaux chez Bigelow c’est vrai, mais là c’est vraiment très fort.

Zero dark thirty – Kathryn Bigelow – 2013

Zero dark thirty - Kathryn Bigelow - 2013 dans * 2013 : Top 10 zero-dark-thirty-2-300x183Essential killing.

   8.5   L’ouverture du film est déjà remarquable. Plutôt que de nous abreuver d’images que l’on connaît par cœur à force de les croiser depuis plus de dix ans, Kathryn Bigelow choisit l’écran noir. Les cris des victimes de l’attentat des Twin Towers résonnent dans l’obscurité et aucun repère introductif, ni chronologique, ni géographique, ne nous sera offert. Pas de didactisme à l’œuvre mais une parabole sur l’aveuglement, d’emblée, thème que le film ne cessera de poursuivre dans la traque de Maya qui ne verra d’autre ligne de mire que la chasse à mort du chef d’Al Qaida. Personnage mécanique et silencieux, justicier moderne, à peine rattrapé par la mort des siens (l’attentat suicide dans le désert ne la dévie en rien de sa trajectoire) qui s’engouffre inexorablement dans la poursuite d’une ombre, que le film laissera accomplir au détriment de toute satisfaction ou glorification.

     Les premières images sont des séquences de tortures. Crues, précises mais jamais tapageuses, elles n’impressionnent pas tant par la violence insoutenable qui les caractérisent (waterboarding, mise en cage, humiliations) que par leur construction logique, mélange de douceur maquillée et de manipulation organisée. Aucune complaisance ici, d’un côté comme de l’autre, les scènes s’enchainent et se répètent, tenant plus du précis reportage que d’un élément de scénario. On passera sur la polémique que ces séquences ont engendrées politiquement mais il fallait bien s’y attendre, tant le film ne cesse de dire que la torture fut un stratagème efficace pour retrouver Oussama Ben Laden. Le charme de Dan (Jason Clarke) peut se grimer en terreur, tandis que Maya (Jessica Chastain) attend dans l’ombre, écoute et observe, sans expression. Quant au prisonnier, à aucun moment il n’est agité en marionnette fanatique (ni lui ni les autres, un peu plus loin dans le film) destinée à effrayer le spectateur occidental, le film ne s’en tenant qu’à une succession de faits et la terreur, réelle, n’émerge que via leurs réussites. Les personnages sont des pantins de torture, voués à disparaitre. C’est d’ailleurs concrètement ce qui se passe une fois les informations récupérées puisque Dan disparaît du plan au même moment qu’Ammar, le torturé, laissant définitivement place à Maya, qui jusqu’ici n’était qu’un regard, un assistant de mise en scène, pour finalement devenir la caméra elle-même, l’organisatrice de la traque, metteur en scène jusque dans l’initiative de la mise en place de la traque finale.

     Séquence finale dont on a beaucoup entendu parler : assaut sublime, dans l’obscurité, écrasé par la pénombre et enveloppé par le sable. La scène impressionne mais pas vraiment comme on l’attend, elle force le respect à la manière de celle des snipers dans le bunker dans son précédent film, Démineurs. Elle semble à contretemps, sans repère, sans imagerie pompée sur un réel rebattu. C’est dans l’abstraction que Bigelow s’en va chercher le corps d’Oussama Ben Laden. Deux avions de chasse survolent le lieu, une flopée de militaires s’en échappent, suspendus aux filins, ils pénètrent dans le fort comme le cartel colombien se hissait dans celui de Tony Montana, dans le Scarface de De Palma. Aucun contre-champ ici, les seules images visibles seront unilatérales, du seul point de vue des militaires. Ailleurs on aurait installé un micro suspense en variant le point de vue, la cinéaste a l’intelligence de ne pas se laisser séduire. Son film est brut et le restera jusque dans le dernier plan. Comme en écho au 11/09 et donc à la première séquence du film l’un des avions se crashent dans l’obscurité, nous n’en saurons pas davantage. La suite se déroule au viseur, en infrarouge ou  dans le noir complet. On discernera l’évacuation d’une femme ayant assisté à la mort de son mari avant d’en voir une autre se faire abattre froidement aux côtés du sien. Ailleurs, dans une autre pièce, des enfants. Les militaires leur tendent des lampes pour les rassurer puis  ils leur demandent l’emplacement de la cible. « Oussama ?! Oussama ?! » Chuchotent-ils un peu avant de l’abattre. Geronimo. On rentre au bercail. Rien de plus. Une telle radicalité dans une telle situation en apparences spectaculaire impose le respect.

     Entre ces deux chapitres phares bien définis, on flotte, on tâtonne dans une sorte de grand vide imperceptible, entre renseignements d’importance et petits événements divers au sein d’une progression volubile. Maya devient la représentation d’une Amérique qui s’impatiente d’un dénouement, en bravant sa hiérarchie, imposant ses choix dans un milieu aussi flou – et extrêmement bien rendu – que les bureaux de la CIA. Mais au service de quoi, de quel ordre, de quelle satisfaction ? Zero Dark Thirty est un grand film sur l’absurde. Absurdité de la guerre évidemment, ici réduite à la traque d’un seul homme et absurdité d’une traque obsessionnelle qui n’a pour but qu’un passage de relais abstrait. Al Quaida sans Ben Laden c’est Al Quaida avec un autre. Maya représente le personnage où l’absurdité s’élève à son paroxysme, puisqu’elle substitue sa vie à cette traque, n’existe pas sans Ben Laden (magnifique ultime plan) coincée dans l’idée de combattre le Mal qui doit être un visage, un seul, probablement pour se rassurer, comme le souhaite alors l’Amérique toute entière.

     Plus qu’un énième film à la gloire du mandat Obama, qui héroïserait espièglement cette longue traque qui fit une des grandes réussites de la CIA  de ces dernières années, Kathryn Bigelow choisit de faire une suite à Démineurs, cependant moins axée sur l’abstraction mais plutôt sur une mécanique indéboulonnable, de pantins dévoués et déterminés à ne rien lâcher de leur proie. Plus de bombes à désamorcer, uniquement d’éventuelles pistes et informations à creuser. Jessica Chastain incarne magnifiquement ce rôle d’agent de renseignements obnubilé par cette chasse obsessionnelle, qui la happe dans un songe onirique, en déconnection absolue – Belle séquence de l’envol des hélicoptères dont elle regarde le décollage, comme suspendue à un rêve, qu’elle sent, prend bientôt fin. Preuve que le projet ne vise pas la glorification des forces armées, mais bien son absurdité, la cinéaste avait déjà écrit le film bien avant qu’OBL (C’est à ses initiales qu’il est réduit dans le film, dans la bouche des militaires, un simple code) ne soit refroidi, en montrant l’impossibilité de réussite de l’entreprise et la démesure qu’elle engendre. C’est quasi Herzogien. Zero dark thirty est un grand film sur l’addiction et la détermination, et son revers la solitude, mais il faut attendre le dernier plan pour entièrement l’entrevoir. Je trouve que c’est un bel écho au cinéma de Fincher, en particulier à The social network, avec lequel il partage cet état névrotique. Maya est un personnage sans histoire ni affects, simplement défini par sa détermination et à sa seule conscience de logique professionnelle. On pense encore à Fincher, mais à Zodiac cette fois, quand la cinéaste cadre son personnage chez elle, dans ses recherches sans fin. Elle n’a pas de vie privée. C’est une matrice sacrificielle et robotique sans lendemains.


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silencio


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