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Avengers, Endgame – Joe & Anthony Russo – 2019

avengers-4-endgameSnap to the past.

   8.0   Je poursuis mon voyage à travers le cinéma des Studios Marvel, je fais des ponts, découvre de beaux échos, butte sur un détail avant d’en apprécier pleinement un autre. La vue d’ensemble est de plus en plus nette, les pièces du puzzle s’imbriquent et la grosse machinerie apparemment sans âme, parfois grossière, révèle ici un troublant vertige. En allant voir Endgame, je savais qu’il me manquerait encore quelques pièces, tant pis, c’est le jeu, apprécier l’univers de façon non linéaire est un fonctionnement comme un autre.

     A l’heure où j’écris, le film vient de passer devant Titanic dans l’histoire du box-office mondial. En gros il a franchi la barre des 2 milliards de recettes. En seulement douze jours d’exploitation. Record absolu, évidemment. Si je serais toujours plus admiratif de la double anomalie réalisée par James Cameron puisqu’il n’a pas eu besoin de 21 films pour tout péter avec le 22e, je dois avouer que ce colossal succès m’impressionne beaucoup et curieusement me réjouit bien plus qu’il ne me terrifie : Au moins, les gens continue d’aller au cinéma. A l’heure où tu me lis il a probablement battu Avatar. Qu’importe ce qu’on pense du film, de cette saga et du box-office en général, le raz-de-marée que le film provoque est inédit, fascinant, flippant. Mais que reste-t-il du film lui-même après la démesure de son plan marketing ? Attention, spoilers en veux-tu en voilà.

     Le film se découpe clairement en trois parties. Il sera d’abord question de deuil puis il faudra élaborer la solution avant de filer vers le grand affrontement. La partie centrale est un pur délice. On traverse le temps et on retourne dans les films précédents afin d’aller chercher les pierres et faire en sorte que Thanos ne les récupère pas. Et c’est assez jubilatoire. On retourne dans la temporalité du premier Avengers mais aussi dans celle de Captain America 2 et le film a l’audace de rejouer une scène de Thor 2, le plus mauvais épisode de la série et d’en faire une scène très belle, entre Thor et sa mère. Sur Morag, il faut devancer Quill, toujours en train d’écouter Come and get your love. Steve Rogers se bat contre son lui-même de 2012 et Tony Stark retourne chercher le Tesseract en 1970 et y fait la rencontre de son propre père. Mais avant cela, le film tente déjà beaucoup, autrement.

     L’ouverture d’Endgame prolonge la cruauté sur laquelle se fermait brutalement Infinity war et demande à partager les derniers instants de bonheur familial de Clint Barton – qui était oublié, absent de ce final tétanisant – avant que sa femme et ses trois enfants ne s’évaporent en poussière. La séquence n’est pas très longue pour un « film normal » mais pour un blockbuster, c’est tout de même un étirement surprenant – que le film se permet, comme toute sa première heure de deuil, parce qu’il dure trois heures. C’est une grâce bucolique quotidienne qui soudain vire à la quadruple disparition, qui n’est pas sans rappeler la séquence introductive de The leftovers, voire celle, moins anonyme, qui touche le personnage incarné par Carrie Coon dans la série de Damon Lindelof. Comme elle, Barton perd tout. En un claquement de doigts, c’est le cas de le dire. Pas autour d’une table de cuisine mais en plein pique-nique dominical. Dans la séquence suivante, le récit fait un bond de cinq ans. La table rase n’est donc pas encore au programme.

     En parcourant les papiers qui fleurissent autour du film, je remarque en priorité un nombre conséquent de déception vis-à-vis de l’abandon du radicalisme qui parcourait le final du film précédent. Curieux reproche tant je ne vois pas ce qu’il y a de si inattendu dans ce déroulement ? Je veux dire, on savait bien que « ceux qui restent » trouveraient un moyen de faire revenir « ceux qui sont partis », évaporés parmi la moitié des êtres humains évaporés de la planète. On savait bien que le génocide serait effacé. Que Thanos finirait par perdre. Restait plus qu’à savoir comment ? Le « comment » peut être déceptif, oui. Mais il ne tombe pas comme un cheveu sur la soupe non plus, nous étions un peu prévenu. Avant de laisser la dernière pierre à Thanos, Dr Strange avait clairement annoncé à Tony Stark que son rôle serait prépondérant. Ant-man nous avait familiarisé avec la physique quantique – Et Ragnarok et son bifrost avait un peu joué là-dessus aussi. La scène post-générique d’Infinity war montrait que Nick Fury avait envoyé un SOS à Captain Marvel juste avant de se volatiliser. Et si je ne l’ai pas vu, comme par hasard quel film sort avant Endgame ? Captain Marvel, évidemment. Si l’on a appris un truc avec le MCU et sa façon d’écrire une saga de cinéma, c’est que tout s’imbrique, tout est toujours utile, il n’y a que des pistes, jamais de fausses pistes. Et tout cela, en effet, nous le verrons dans Endgame. Ça peut être déceptif mais c’est aussi un vrai tour de force, ainsi qu’un plaisir de fan service, cet opus agira en opposition au précédent : Retrouver l’humour de nos héros et retrouver nos héros. Alors si en plus tout ça s’opère en faisant du pied à Retour vers le futur, hein, allons-y gaiement. C’est un film qui semble sans cesse récompenser ses fans, leur offre pile (ou presque) ce qu’ils souhaitent. Un film qui se fait ses propres clins d’œil et revisite sa propre légende. Au moins autant que lorsque Spielberg revisite dans Ready player one, ce qu’il a en grande partie engendré. Quant aux reproches focalisés sur l’impossibilité au film de montrer le chaos que ce claquement de doigts a généré, oui, en effet, c’est pas The Leftovers. Mais bon, cette saga n’a jamais eu cette prétention, elle n’a jamais filmé le Monde. La population a toujours été réduite à de la simple figuration abstraite. Donc ce chaos ne s’incarne pas dans une dimension globale et mondiale mais uniquement via ses personnages, fortement touchés (Barton) ou non (Stark).

     Cinématographiquement, le film ne tente aucun vrai pas de côté, mais ce n’est pas nouveau, c’est comme ça depuis le premier Iron man, tous les films se ressemblent plus ou moins dans cette écurie, il ne faut surtout pas prendre le risque de briser la fidélité de la clientèle. Avec un tel marché financier et de tels chiffres, on les comprend. Il y aura parfois eu de ridicules déraillements – Thor 2, évidemment – mais aussi d’agréables interférences – l’ovni Ragnarok – mais rien qui n’entache l’univers produit par Disney. C’est donc majoritairement du fond vert dans chaque séquence d’action. Et majoritairement du plan télévisuel durant les dialogues, dont on désamorce systématiquement le sérieux, l’aigreur et/ou la lourdeur par une petite vanne, efficace, bien placée comme un produit. Thor est encore un peu dans Ragnarok, apparemment, puisque c’est lui, panse pendante et joues boursouflées, grimé en The Dude (The Big Lebowski cité ouvertement, trop, puisqu’on le voit et que les personnages le disent, deux fois ! On préfèrera, plus loin, la subtilité de son clin d’œil à l’ouverture des Aventuriers de l’arche perdue) sur qui reposera l’essentiel du potentiel comique d’Endgame. La fourmi aura aussi son rôle à jouer là-dedans. Ainsi que Le cul de l’Amérique.

     C’est curieux car l’univers de la pop culture est un peu chamboulé ces temps-ci, puisque le calendrier superpose la sortie du dernier volet d’Avengers avec la diffusion de l’ultime saison de Game of thrones. D’autant que c’était le 8.03 de GoT cette semaine-là. Loin de moi l’idée de les comparer, mais vivre cet épisode dingue et Endgame à quelques heures d’intervalle c’est l’assurance d’avoir vécu un truc à part, dans « l’histoire de la pop culture » si j’ose dire, d’être dans le vent, quoi, c’est très bizarre. Si j’ai suivi la série de Weiss & Benioff depuis ses quasi faits d’arme – J’avais rattrapé les wagons au moment de la diffusion de la quatrième saison, il y a cinq ans donc, je m’en souviens bien puisque le season finale tombait pile avec le début de la coupe du monde au Brésil – je recolle les morceaux avec la saga produite par Kevin Feige seulement depuis le mois dernier. Pourtant, je ressens des frissons similaires, quand je vois une discussion au coin du feu d’un côté, dans un bureau de l’autre, une bataille face aux marcheurs blancs ici, face à Thanos là : L’ambition n’est pas la même, la qualité d’écriture et de réalisation non plus, mais il y a le parfum de la mélancolie qui s’en dégage, une volonté de dire adieu aux personnages, qu’ils survivent ou bien qu’ils meurent. Cette même sensation de frissons s’exprime aussi via l’utilisation musicale : Dans l’un c’est au retentissement de son générique d’intro, dans l’autre c’est au moment d’une réunion dans la bataille. Deux thèmes bien bourrins comme il faut, mais qui te collent à ton siège.

     Il y a l’idée du « endgame » puisque le titre le revendique. C’est la fin d’un jeu. Evidemment le jeu s’est un peu durci, s’est un peu fait avaler par la mort à l’image du vaisseau de Thanos débarquant à la toute fin de Ragnarok et bien entendu à l’image de cet impressionnant goût de cendres que l’on respire depuis Infinity war, mais malgré tout il y a toujours l’idée du jeu et il reprend le dessus ici, très clairement, d’une part dans ses velléités comiques – la saga n’avait jamais été aussi drôle – et d’autre part dans sa volonté de tout faire péter dans un gigantesque feu d’artifice et l’idée du voyage temporel est une partie de ce feu d’artifice. Alors oui il y a une mélancolie quasi permanente parce qu’on prend le « risque » de perdre un présent parfois convenable (Les moments de complicité entre Stark et sa fille sont par ailleurs très beaux) pour revoir ceux qui se sont évaporés. Mais il y a le jeu. Et le film ira ouvertement là-dedans en citant d’abord Fortnite puis Retour vers le futur. Ce n’est pas faire offense au film de Zemeckis je crois, même si Endgame va gentiment s’en moquer, puisqu’il s’amusait déjà de ces ascenseurs émotionnels.

     Je pense, malgré tout un tas de défauts évidents – Punaise, le vrai héros du film c’est un RAT, quoi. C’est Rémy qui fait revenir Scott Lang, on croit rêver – qu’il est le plus stimulant, avec Infinity war, des films du MCU. Mais contrairement aux opus de Captain America, je ne crois pas que ces deux films s’apprécient indépendamment du reste, tant ils fonctionnent dans un ensemble, ils fonctionnent parce qu’ils sont la convergence de cet ensemble et sont donc touchants – vraiment, moi ça m’a collé un tas de frissons à plusieurs reprises voire quelques larmichettes, mais chut – si l’on a quelque atome crochu avec cet ensemble, cet univers, cette galerie de personnages.

     Il est possible que mon enthousiasme soit provoqué par le fait que je sois plongé à fond dans l’univers depuis peu – et qu’il retombe vite comme un soufflé mais qu’importe – ou bien c’est simplement le fait d’y être allé en Day2, de le voir en Imax 3D dans une salle blindée, aux côtés de ma femme et mon fils, tous deux aussi enthousiastes que moi, mais en l’état, j’ai pris un pied monstrueux. Un plaisir de divertissement idéal doublé d’une vraie mélancolie. Si on m’avait dit, il y a encore un mois, que je pourrais être ému par un film de super-héros, punaise. J’ai presque envie d’y retourner, tant ça m’a semblé aussi jubilatoire qu’astucieux. Le film réussissant aussi l’exploit d’être une belle conclusion pour les fans mais aussi de ne pas être réfractaire quant à l’idée de séduire les néophytes – Et j’en suis donc la preuve.

Thor, Ragnarok – Taika Waititi – 2017

29. Thor, Ragnarok - Taika Waititi - 2017« Je ne fais que passer »

   7.0   Suivant mon humeur, ce sera mon épisode préféré. En effet, si on apprivoise d’emblée le ton du film, volontiers facétieux, c’est un régal. On comprend rapidement que le film tourne le dos à Thor 2, on le comprend dès l’entame, quand Thor est enfermé dans une cage et discute avec un squelette, puis lorsqu’il est enchaîné au-dessus de la lave, face au grand méchant Surtur, qui lui explique son dessein d’anéantir Asgard : Le discours du démon du feu est sans cesse interrompu par le dieu du tonnerre, qui toujours suspendu, pivotant sur lui-même, lui demande d’attendre qu’il n’ait plus le dos tourné. Il faut entendre la désinvolture de Thor, apprécier le génie comique de Chris Hemsworth. Et ce dès les présentations puisqu’au très solennel « Thor, son of Odin » de Surtur, Thor répond « Surtur, son of…a bitch » ! Il faut aussi voir le combat qui s’ensuit, complètement bourrin mais complètement abstrait, sous Immigrant song, de Led Zeppelin. C’est Sucker punch. En drôle.

     Et l’ambiance continue ainsi lorsque Thor débarque sur Asgard, en vainqueur, arborant les cornes de Surtur derrière le dos. Il parle comme OSS 117. Mais c’est Loki le roi ici, statufié et héroïsé dans une comédie relatant son sacrifice : Matt Damon joue l’acteur qui joue Loki, Sam Neil l’acteur qui joue Odin et le frère de Chris Hemsworth prend le rôle de Thor. Ils apparaissent quelques secondes, puis on ne les reverra plus. Mais c’est dire la générosité du délire. Et tout est ainsi dans Thor, Ragnarok. Le film va à cent à l’heure mais il est rempli de petites surprises de ce genre, de subtiles apparitions, de superbes situations comiques (la rencontre avec Dr Strange, absolument géniale) et graphiquement il ne ressemble pas vraiment au style du MCU. Il est plus coloré, plus kitch encore que Les gardiens de la Galaxie. C’est d’un mauvais goût assumé, toujours amusant. A l’image d’Hela, déesse de la mort et sœur de Thor & Loki, grande méchante de cet opus et incarnée par une Cate Blanchett méga badass. Qui fou une pichenette au faux gant de Thanos, dans la pièce aux trésors d’Odin. C’est le WTF complet ce film, c’est impressionnant.

     Et là ce n’est que le début. Car Thor, Ragnarok trouvera ses meilleures inspirations sur Sakaar, une gigantesque décharge sur laquelle règne Le Grand-maître – dictateur magnifiquement campé par Jeff Goldblum – qui organise des combats dans une arène où il faut se battre jusqu’à la mort. L’arrivée de Thor, déjà, qui échoue ici grâce à l’un des nombreux portails cosmiques qui entourent cette planète, est super drôle. Il chute dans les poubelles, littéralement. On tombe beaucoup comme de la merde dans Thor, Ragnarok. Ce sera aussi le cas pour Valkyrie, une guerrière un brin alcoolique, mais aussi de Banner plus loin, qui s’écrase à l’entrée du bifröst avant de redevenir Hulk et affronter Fenris, le loup géant d’Hela. Cette planète permet en outre la rencontre d’un chouette personnage tout en pierres (Korg et sa réplique géniale : « Another day, another Doug ») et bien entendu permet de construire un groupe, façon Les gardiens de la galaxie, afin d’aller affronter la grande méchante. Et ce trio qui devient quatuor quand le caméléon Loki les rejoint, fonctionne à merveille, je trouve.

     Sans mentir, j’ai pris un pied phénoménal, à tel point que j’ai revu le film une semaine plus tard tant sa mécanique comique me manquait. Tant je voulais revoir Skurge répondre à Héla qui vient de buter tous les autres sbires « Je ne suis que le concierge ». Tant je voulais revoir le cri de soulagement neuneu lâché par Thor quand il découvre qu’il va affronter Hulk. Ça reste un film du MCU, hein, avec une construction attendue, des rebondissements prévisibles, mais le ton est différent, les curseurs déplacés, on a l’impression qu’il a été piraté par un gamin insolent. Ça fait plaisir. D’ailleurs c’est dans celui-ci que Stan Lee fait la meilleure apparition. C’est la seule fois où c’est vraiment drôle, en fait, puisqu’il sera le coiffeur de Thor, qui perd donc sa crinière dorée. « Un vieillard répugnant m’a coupé les cheveux » lâchera-t-il à un Banner surpris de le voir cheveux courts. Bref, Thor Ragnarok est un film hilarant et récréatif, qui a conscience d’être récréatif, vain, d’être consommable comme on consomme du popcorn. C’est un film qui ne fait que passer. Moi ça me va.

Thor, Le monde des ténèbres (Thor, The dark world) – Alan Taylor – 2013

25. Thor, Le monde des ténèbres - Thor, The dark world - Alan Taylor - 2013Il n’y a pire eau que Loki-Thor.

   2.5   Si je suis globalement satisfait de ma session de rattrapages Marvel, là en revanche, j’aurais mieux fait de m’abstenir. Purée, la purge. Autant le premier, dispensable mais pas désagréable, masquait parfois sa lourde relecture shakespearienne et son immonde esthétique branaghienne par son attachant esprit « Les Visiteurs » avec tout ce qui se joue dans la collision entre Thor et la Terre. Il y avait des instants rigolos, notamment parce que le duo Hemsworth / Portman fonctionne pas trop mal ; Et des trucs presque aussi lourds que la réalisation de Jean-Marie Poiré. Là c’est une catastrophe à tous niveaux : Graphique, narratif, interprétatif, rythmique. Les décors sont laids. Les scènes d’action sont laides. Et trop de portails, trop de Bifröst. Un peu à l’image de la scène qui semble reproduire le pire du pire de Star Wars, avec Padmée / Jane Foster et Anakin / Thor sur les bords du Lac de Côme, c’est ni fait ni à faire.

Ant-man – Peyton Reed – 2015

21. Ant-man - Peyton Reed - 2015Nano war.

    7.0   Le douzième film du MCU, qui clôt la phase II, est né d’une désillusion terrible pour la geekosphère. Leur incompréhensible héros – Franchement j’ai de la sympathie pour Hot Fuzz et Shaun of the Dead, mais ça s’arrête là, quoi, je ne comprends pas trop la hype autour de ce bonhomme – s’est fait débarquer d’un projet qu’il chérissait. Qu’il chérissait au point de trop se l’approprier, sans doute. Remplacer Edgar Wright par Peyton Reed, réalisateur plus passe-partout, capable du meilleur (Le chouette Yes man, avec Jim Carrey) comme du pire (La rupture, avec Jennifer Aniston) c’était se garantir une certaine transparence mise en scénique. C’est pas plus mal. Au moins, on n’a pas eu à se farcir une scène avec un Cornetto, c’est toujours ça de gagner. C’est un beau film de casse, une chouette comédie romantique et s’il est aussi attachant c’est probablement parce qu’il semble en apparence plus anecdotique que les autres.

     Si plus tard, Spiderman, Homecoming amorce un virage dans le capital sympathie de la Marvel Cinematic Universe qui visait plus jeune et davantage l’esprit geek que celui de la vanne formatée dessinée par Iron Man et consorts, Ant-Man bâtit une pierre supplémentaire, réjouissante tant il pourrait être le crossover idéal entre l’univers comique de Wright, la délicate approche super-héroïque de l’homme araignée qu’en avait fait Sam Raimi et L’homme qui rétrécit. Film ouvertement cité et pas seulement parce qu’on y rapetisse un homme, mais aussi par l’évocation d’abord puis la traversée bientôt de l’infra-moléculaire, véritable trouée bouleversante sur laquelle s’achève le chef d’œuvre absolu de Jack Arnold, et qui sera aussi un haut fait dans le dernier quart d’Ant-Man, réduit pour s’en tirer à passer en taille subatomique. Et puis quand on parle de capital sympathie, difficile de ne pas mentionner Paul Rudd, acteur toujours génial partout où il passe : Difficile de trouver quelqu’un de plus cool pour camper ce rôle aussi cool.

     C’est d’ores et déjà l’un de mes films préférés de la saga. Sans doute parce que ça me parle complètement, à moi qui aime d’amour L’homme qui rétrécit et bien entendu Chérie j’ai rétréci les gosses. Si on m’offrait de choisir un pouvoir, ce serait celui de pouvoir rétrécir, « sauver le monde » dans une cave ou un jardin. Sans compter que je trouve ça hyper cinématographique, faire croire qu’un jardin est une jungle, une cave un monde tout entier, c’est rappeler qu’on peut croire à l’aventure dans un studio. A ce titre, l’affrontement final entre Ant-man et Yellowjacket, dans la maison de Scott, enfin surtout dans la chambre de Cassie, que l’on suit parfois du point de vue de Scott en Ant-man parfois du point de vue de sa fille de sept ans, qui voit un combat au sein de ses jouets, est absolument réjouissant en ce sens qu’il exploite à merveille les variations d’échelles et utilise des inserts comiques hilarantes, qui rappelle les plongées au sein de l’imaginaire de l’enfant – avec les jouets qui s’animent – dans Toy Story.

     Parmi les bonnes idées qui jalonnent le film, mention spéciale à l’une de mes séquences préférés de l’intégralité des films du MCU lorsque Ant-man et Yellowjacket s’affronte dans un hélicoptère puis dans une mallette tombant d’un avion, entre multiples objets – Piles, écouteurs, boutons, clé USB, carte bleue – accompagnés par « Plainsong » que Scott a accidentellement (pour se propulser) déclenché en appuyant sur l’I phone et criant : « I’m gonna disintegrate you » ! Entendre l’Iphone répondre : « Playing « Disintegration » by the Cure » est un pur moment de grâce, tellement en phase avec la situation. Voilà, ca dure à peine trente secondes, mais c’est une belle surprise, et d’un point de vue graphique c’est fabuleux. Et puis comme la plupart des scènes d’action du film, on retrouve finalement notre échelle et cette chute de mallette s’achève modestement dans la piscine d’un quartier résidentiel.

Avengers, Infinity war – Joe & Anthony Russo – 2018

15. Avengers, Infinity war - Joe & Anthony Russo - 2018Le mur porteur de l’édifice.

   7.5   Plus je (re)vois les films de la MCU, plus je les réhabilite ou tout du moins cerne leur existence au sein de cette interminable entreprise qu’est « The Infinity Saga », qui une fois qu’elle sera bouclée, englobera donc vingt-trois films – tous sortis durant ces onze dernières années – qui parfois se seront recoupés outrageusement (Dans le beau Civil war, notamment), parfois plus discrètement, le temps d’insérer un nom, un visage, parfois seulement pour une scène intra ou post générique.

     Il y a peu de temps encore, je n’y éprouvais aucun intérêt, aucun désir de tout raccorder – D’autant que je ne connais pas l’univers des comics et que je découvre les films dans le désordre – au mieux un petit plaisir immédiat, indépendant – J’avais plutôt apprécié Iron Man, à l’époque. Black panther (vu en février cette année) changea un peu la donne. Mais Spiderman, Homecoming fut le premier vrai tournant. Ça remonte à pas si longtemps, c’était en décembre dernier. J’ai toujours apprécié ce personnage plus que les autres, et de le voir pris dans quelque chose de plus large, avec les Avengers, de relier son esprit geek avec leurs caractères à tous, son humour avec celui des autres, d’un coup ça me plaisait beaucoup. 

     Il me fallait toutefois revoir et un peu réhabiliter les deux premiers Avengers avant de plonger dans Infinity war. Depuis j’ai vu les très chouettes films sur Ant-Man et les nettement moins chouettes films sur Thor. Il faudrait que je boucle les aventures de Thor (Ragnarok) et que je revoie Les gardiens de la galaxie, que je poursuive l’aventure Captain America, que je découvre Captain Marvel. J’ai du pain sur la planche.

     Mais là je voulais voir Infinity war, c’était ma priorité. Sans doute car j’ai pensé que si ça me plaisait j’irai voir la seconde partie qui sort ce jour – Mon premier Marvel en salle. Allez je ne vais pas y aller par quatre chemins, j’ai adoré. Avengers, Infinity war, troisième volet des films Avengers et dix-neuvième opus de la franchise a tué le game, mis la saga entière au tapis. Au point de donner raison d’exister aux précédents films – qui franchement parfois faisaient bien pitié – qui demandaient en réalité à converger vers lui, première partie d’un incroyable ( ?) bouquet final.

     Une ribambelle de super-héros réunis pour affronter un méchant hors pair, Thanos, qui leur vole la vedette puisqu’il est Le personnage fort de cet opus. Celui qui cristallisait toutes nos attentes tant il était teasé dans nombreux des films précédents. Teasing à la hauteur de l’impact qu’il laisse ici, puisqu’il est partout et réussit tout ce qu’il entreprend, SPOILER ON jusqu’à voler les pierres et réussir pleinement son entreprise de destruction dans un final d’une force et d’une cruauté terrible au point que l’on se demande comment il est possible que les studios aient laissé faire ça, de cette manière-là. Laissé tuer la moitié de l’humanité et donc par la force des choses la moitié de nos super-héros.

     D’aucuns diront qu’on va les revoir. Evidemment, mais qu’importe, l’image reste, le geste aussi, jusque dans la scène post générique, qui désintègre Nick Fury et Maria Hill mais demande d’ores et déjà à compter sur Captain Marvel. Les théories ont dû enfler de toute part depuis un an, j’imagine. Je m’en fiche un peu, à vrai dire, mais punaise j’en veux davantage, quoi. Car au-delà de cette fin c’est tout le film qui est d’une véritable noirceur narrative – malgré les toujours disséminés traits d’humour de la franchise – puisque Thanos gagne tout.

     Les Avengers eux-mêmes – alors qu’ils avaient déjà bien galéré à faire front ensemble face à Ultron – sont totalement désynchronisés, à, l’image de Steve Rogers et Tony Stark qui se font la gueule. Thor n’a plus de marteau, Captain America plus de bouclier, quant à Banner il ne parvient plus – Et n’y parviendra pas, enfin pas avant Endgame en tout cas – à faire venir Hulk. Le d’ores et déjà célèbre claquement de doigts final scelle ce fort climat de lose qui règne 2h40 durant. SPOILER OFF

     Et même au-delà de ça encore, le rythme et la mise en scène n’ont jamais été aussi brillants, point barre. Il y a une grande limpidité dans le passage d’une planète à une autre, déjà parce que chacune d’elles tient une vraie identité visuelle, mais aussi car le récit prend le temps de s’y implanter. Le montage est plus clair, plus posé. L’image ne fait pas mal aux yeux comme dans Thor, le monde des ténèbres.

     C’est un plaisir permanent, dans ses réjouissantes multiples retrouvailles du premier acte du film, comme durant les nombreux affrontements, en rupture avec l’héroïsme habituel. Le combat à New York entre Ebony Maw et Dr Strange avec celui qui déforme la matière et balance des blocs de béton partout et celui qui ouvre des portails dans tous les sens, est hyper impressionnant. La suite souffre un peu de ce superbe combat pour être honnête, mais le film se reprend vite, notamment grâce à Thanos mais aussi parce qu’on y croise Peter Dinklage en nain géant. Bref.

     Le choc est tel qu’il m’a décidé à entamer un marathon de rattrapages Marvel. Pour le meilleur et le pire, je le sais, mais qu’importe. Je l’ai déjà dit j’ai depuis beaucoup aimé Ant-Man et sa suite avec la Guêpe, pas trop Thor et encore moins celui qui suit. J’ai été impressionné par Civil war. J’essaie de me faire Ragnarok dans les heures à venir. Et je reparlerai de tout ça bientôt. Car finalement je le reçois un peu comme je reçois une série, c’est moins un épisode (en l’occurrence un film) en particulier que la vue d’ensemble que chacun génère qui m’intrigue.

Docteur Strange (Doctor Strange) – Scott Derrickson – 2016

04. Docteur Strange - Doctor Strange - Scott Derrickson - 2016Pas si strange.

   3.5   Où je me rends compte à quel point je suis de plus en plus las de ces trucs. Je m’y ennuie au bout de cinq minutes. Et pourtant, au rayon Marvelleries, Docteur Strange a tout, sur le papier, pour entrer dans le (médiocre) haut du panier, le problème c’est qu’à l’image, dans l’exécution donc, c’est une fois de plus consternant de banalité, avec ses petites blagues bien placées, son casting exubérant mais sans relief, son déroulement sur expliqué afin de ne pas perdre l’ado plus lent que les autres, les jolies grimaces de Cumberbatch post Sherlock, le gimmick de la cape, personnage à part entière. Visuellement c’est pas mal, ceci dit, il y a une identité qu’on ne retrouve pas dans les autres Marvel qui se ressemblent quasi tous, graphiquement. Même si tout le côté distorsion spatiale avec le méchant fasse office d’Inception du pauvre et souvent mal à la tête. Le film n’est pourtant pas enseveli sous des montagnes d’explosions / destructions, comme on en a l’habitude avec le MCU, c’est plutôt agréable. Mais bon, au bout d’un (court) moment, fallait que je fasse autre chose en même temps. La « magie » ne prend jamais de mon côté, c’est probablement que ce n’est pas suffisamment différent du reste de l’univers Marvel, j’imagine.

Black Panther – Ryan Coogler – 2018

35. Black Panther - Ryan Coogler - 2018Loyal to the throne.

   5.0   Si visuellement ce dix-huitième opus de l’écurie Marvel s’inscrit dans la bouillie-continuité des précédents films, Black panther offre quelques petites surprises qui ne le rend pas forcément plus digeste, mais plus intéressant sur la durée. Tout d’abord, le personnage de Black panther n’a aucun intérêt, et l’acteur est assez mauvais. C’est con, pour un film qui s’appelle Black panther, mais ce n’est pas grave sitôt qu’on comprend que le film se rattrape sur son méchant (joué par un acteur qui en impose : Michael B. Jordan, le jeune Wallace dans la saison 1 de The Wire c’était lui, Steve dans Chronicle c’était lui aussi, avant qu’il n’explose dans Creed), personnage nuancé dans ses ambitions, hyper ambigu, puisqu’il campe le cousin du super-héros qui donne son titre au film, qui après avoir grandi à Auckland, se soulève contre l’injustice raciale en voulant récupérer le pouvoir de ce royaume africain technologiquement avancé. Disons que son soulèvement est légitime, c’est la manière qui l’est moins, puisqu’il est guidé par sa colère. Il me semble qu’il est rare de voir ça dans les films Marvel, qui en fin de compte déploient souvent une idée, une seule, mais qui oublient de l’intégrer dans un corpus plus cohérent. Black panther n’évite pas complètement cet écueil, notamment en se vautrant dans une relecture thématique du Roi Lion, sa récupération sous forme de métaphore de l’opposition idéologique Malcolm X / Martin Luther King, et une mécanique dans ses scènes d’action qui renvoient forcément à la prélogie Star Wars de Georges Lucas. Malgré tout, j’aime bien son côté girl power puisque outre le méchant, ce sont les rôles de femmes qui sont les plus intéressants, lucides, badass, on sent que le film tente de récupérer pas mal de Game of thrones sur ce point. Ainsi que sa belle galerie de costumes. Dommage que ce pays imaginaire du Wakanda (On débarque dedans avec l’élan bourrin de Ludwig Göransson un peu comme on débarquait dans Zootopie avec la voix de Shakira) soit si vilain, finalement, que son décor soit si peu travaillé, si peu « magique » si j’ose dire. Après, que le film soit nommé six fois aux oscars, c’est un peu n’importe quoi, mais ça ne m’étonne pas plus que de voir Bohemian rhapsody concourir pour celui du meilleur montage.

Spiderman, Homecoming – Jon Watts – 2017

46. Spiderman, Homecoming - Jon Watts - 2017Super geek.

   6.0   Chouette idée que de faire un reboot geek de Spiderman, un film aussi décomplexé qu’il est modeste, bien plus occupé à agrémenter son versant comique et citationnel que sa caution grand spectacle. Les effets spéciaux ne sont d’ailleurs pas ce qu’il réussit de mieux, la scène au Washington monument est bien fichue mais celle du ferry bave beaucoup trop. Ça ne révolutionne rien, mais ça n’en a jamais la prétention, jouant surtout sur le folklore lycéen et la lose communicative du groupe d’ados, avec leurs caractères bien trempés, les vannes et la dimension théorique à l’image de sa façon de renverser « le baiser à l’envers » par exemple. Et puis c’est con mais je crois que je préfère cent fois ce gamin à Tobey Maguire. Reste à savoir si les suites resteront dans ce délire ou s’ils se prendront davantage au sérieux.

Avengers – Josh Whedon – 2012

06.-avengers-joss-whedon-2012-1024x576Don’t take my stuff.  

   5.0  Le 21/10/2014,

C’est impressionnant en terme de technique voire de pyrotechnie mais alors ce que ça peut profondément m’emmerder… Et puis je trouve ça roublard quand même. Disons que le défilé de personnages – sans aucune épaisseur psychologique – ne sert pas tant un ensemble qu’une petite mise en valeur personnelle. Du coup, lorsque le sérieux de pape de l’un me gonfle l’humour d’un autre me séduit, mais on sent que tout est organisé pour faire un tout, pour que tout le monde y trouve son compte. Du coup les personnages n’existent pas, ce sont des figurines dans un grand chantier numérique.

Le 25/11/2018,

J’étais prêt à lui redonner une chance parce que dans mon souvenir la chorégraphie de son spectacle volontiers pyrotechnique était impressionnante. Et aussi parce que je devais à mon fils, qui s’est récemment trouvé une passion pour les super héros, de lui faire découvrir un film qui regroupe quatre de ses idoles : Hulk, Thor, Iron Man, Captain America. On va pas faire de roulement de tambours, il a adoré. Moi, moins. En fait j’avais oublié à quel point c’était long, bavard. Les quarante-cinq premières minutes, en mode promesse de réunions de supers et bastons/vannes de cours de récréation c’est pas possible. Mais dès que Hulk se met en colère, il se passe quelque chose. Heureusement qu’il y a Hulk. Heureusement aussi qu’il y a la scène centrale du porte-avion volant et la scène finale de chaos dans New York.

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