Home sweet home.
6.0 Avant de voir – le même soir, pour Halloween – le superbe home invasion inversé que constitue Don’t breathe, de Fede Alvarez, je me suis laissé prendre au jeu (inégal mais intéressant) d’un autre home invasion inversé (une autre variation du moins), à la française cette fois : Furie, d’Olivier Abbou, au sein duquel les propriétaires, cette fois, sont enfermés dehors : Leurs locataires estivaux ayant eu l’idée ingénieuse de changer les serrures, modifier la ligne téléphonique, payer les factures et de bénéficier d’un vice contractuel.
Si l’on dit « Furie » on pense forcément Fritz Lang ou Brian de Palma. Pourtant, le film d’Olivier Abbou évoque tout un tas d’autres films, qu’on ne va pas citer, mais c’est assez flagrant. C’est un puits de références, toutes plus ou moins bien digérées, certes, mais l’ambition générale réjouit. Car inégal, Furie l’est assurément – problème de rythme, ventre-mou, interprétation pas toujours adéquate, dialogues trop écrit – mais certains de ses parti pris fascinent.
Il y a d’abord le fait d’ancrer Furie dans le réel du labyrinthe administratif et judiciaire. Mais pas seulement : Il interroge aussi les névroses masculines françaises à travers la crise d’identité, de virilité, de statut de fils d’immigré, de produit du système qui fabrique des victimes, de la peur du déclassement social. Ça devient vite très angoissant, pour nous autant que pour son couple de personnages impuissants. Alors, quand on ne l’attend plus, le film libère de purs trouées formelles et hypnotiques, d’abord lors de cette longue soirée de boite de nuit, ensuite lors d’un final explosif, sanglant, malsain.
Fort et surprenant, qui plus est au sein du cinéma de genre à la française, tant la production s’avère très peu concluante si l’on excepte, ces cinq dernières années, des films comme Grave, de Julia Ducournau, Revenge de Coralie Fargeat ou La nuit a dévoré le monde, de Dominique Rocher. Furie a ce petit quelque chose de passionnant, non pas qu’il s’inspire d’une histoire vraie, mais qu’il s’avère tout à fait français, dans ses problématiques, sa topographie, sa dramaturgie. Il ne cherche jamais à imiter le modèle américain. Bonne surprise.