Archives pour la catégorie Oscar du meilleur film



12 years a slave – Steve McQueen – 2014

923429_10151932960692106_171834631_n2 hours a slave.

     5.0   Le film m’intéressait autant qu’il me faisait terriblement peur. Comment McQueen, génial réalisateur de Hunger, allait-il passer du portrait hyper esthétisé et en boucle de ce sex addict dans Shame à l’enfermement d’un homme libre afro-américain enlevé et vendu comme esclave dans une plantation de Louisiane, dans l’Amérique du XIXème siècle ?

     Je pense qu’il y avait là l’occasion d’effectuer une rupture avec son cinéma, de beaucoup moins lorgner sur le m’as-tu vu et de plonger dans la boucle et la répétition de la manière la plus radicale qui soit. En somme, de raconter l’esclavage comme on ne l’avait jamais vu, dans sa structure la plus proche du réel, dans sa dureté et sa durée quotidienne. Un ou plusieurs lieux filmés comme une journée de douze ans. Jamais pourtant McQueen ne s’éloigne formellement et distinctement de ses homologues Hollywoodiens. Hormis quelques bonnes idées, son film est engoncé dans un dispositif commun : construction classique, musique envahissante de Hans Zimmer, séquences chocs et recherche de la performance. Il n’y a plus d’expérience. Ne reste qu’un manifeste oscarisable, honorable certes, mais peu passionnant cinématographiquement parlant.

     Dans les bonnes idées il n’y a en a qu’une qui vienne vraiment de lui. Disons que la grande idée du film, déjà, c’est le choix de ce personnage, Solomon Northup, qui n’avait surtout pas volonté de survivre (« Je ne veux pas survivre, je veux vivre ! ») mais qui se plia aux exigences de se maîtres esclavagistes parce qu’il n’y avait pas d’autre moyen de s’en sortir. Bien que cette idée siée parfaitement au cinéma de Steve McQueen (qui n’aura cessé de faire interagir survie, lâcheté et martyr) c’est dans l’ouvrage de l’homme en question qu’il est allé la puiser.

     Le parti pris le plus intéressant du cinéaste est donc d’avoir tenté d’abolir toute temporalité. Ce qui rejoint ce dont j’évoquais et espérais. Le film s’appelle donc 12 years a slave mais on ne ressent pas ces douze années, on ne nous présente aucune chronologie, aucune date, aucun dispositif diégétique facile comme il est coutume de le croiser dans n’importe quel film mainstream à minima historique, avec des calendriers, des entailles sur un mur, diverses modifications physiques. Douze ans deviennent donc presque une journée, où le temps se serait arrêté pour rappeler que l’enfer n’a pas de temporalité. On est évidemment loin du compte, enfin disons qu’il y en a l’esquisse mais que tout est bien trop mécanique pour véritablement proposer quelque chose de nouveau.

     La plus belle esquisse d’une forme entièrement dévouée à la durée et à la souffrance se situe dans cet interminable plan d’ensemble où Solomon, pendu à la branche d’un arbre, après avoir échappé aux vilénies du charpentier de son premier maître, bouge légèrement les pieds un à un afin de toucher terre pour ne pas s’étrangler. Ce plan est parcouru d’un mouvement permanent en sa profondeur et d’une sublime entrée dans le champ d’une esclave (celle dont il ne supportait plus les larmes ?) lui apportant un verre d’eau. Plan fixe qui rappelle celui du nettoyage de pisse dans Hunger. Ou le travelling latéral dans Shame. Plans qui se fondaient dans un ensemble tandis que celui-ci semble s’être perdu au milieu d’un académisme global, provoquant une impression de performance un peu forcée ce qui est d’autant plus frustrant.

     J’aurais aimé un Hunger transposé à l’Esclavage, soit un film sans limite, ne ressemblant à aucun autre, fait de répétitions et de boucles ad aeternam, de chairs et de sang sans aucun contre-champ. Mais ici, Mc Queen n’a pas l’idée ingénieuse qui faisait le sel de Hunger, c’est-à-dire de s’intéresser aussi bien aux bourreaux qu’aux victimes en faisant glisser son récit. Il veut tout montrer en même temps. Le calvaire des esclaves et les démons de leurs maîtres. J’aime assez malgré tout comment est traité le personnage de Solomon. Je trouve culotté d’en faire un tel idéaliste qui vire raclure, enfin disons que c’est de la résistance par la lâcheté (tout le contraire de Hunger) ce qui du même coup offre un final des plus gênant ici, à la fois émouvant et dégueulasse.

     Autre chose intéressante, c’est la relation entre le maître Epps (Michael Fassbender) et sa petite esclave Patsey qu’il chérit à en être fou amoureux, la couvrant d’éloges lors des décomptes de quantités ramassées de cotons, la violant au clair de lune, avant de la torturer plus tard pour une histoire de savon dont il se fait une montagne de jalousie. C’est ce personnage-là, la chose la plus fascinante dans ce film, un type absolument immonde, fanatique et amoureux de ceux qu’il fouette – Cette façon d’approcher Solomon un moment donnée est là aussi très douteuse, même si l’on imagine qu’il est imbibé d’alcool. De manière générale c’est peut-être les relations croisées qui sont les plus belles car les plus mystérieuses, les relations entre Edwin Epps et Patsey, mais aussi entre Solomon et Mary Epps.

     McQueen a donc contenu sa mise en scène, l’immersion qui la caractérise et qui faisait à priori les réussites de son cinéma. Là c’est un sujet trop fort, il se noie dessous, alors certes il s’en dépêtre plutôt bien, n’importe qui aurait fait un truc absolument détestable, mais il annihile la force de ses habituels partis pris passionnants (montage en glissement, longues séquences, boucles en répétition) dans un déluge démonstratif et sur-esthétisant. Je continue de croire que c’est un cinéaste de l’intérieur et du coup tous ces plans gratuits de paysage ici font tocs.

     En revoyant Shame dans la foulée, je me suis rendu compte que j’adorais sa construction, avec cette temporalité disloquée aux extrémités, caractérisant les affres de son personnage prisonnier et cette bulle au milieu, avec cette double relation, amoureuse et fraternelle, qui pourrait s’il s’en donnait le cœur le sortir de sa torpeur. Hunger était plus fort dans la construction : trois personnages, trois parties, puis trois parties pour un seul personnage avec une scène de dialogue fleuve. Mais Shame était tout aussi culotté malgré tout bien qu’on entrevoyait déjà quelque peu les prémisses de ce 12 years a slave.

     Je pensais que Shame me décevrait à la revoyure mais il y a vraiment des trucs super forts dedans. Tout d’abord je trouve ça excellemment écrit (la scène du repas avec la collègue c’est probablement ce qu’il a réussi de plus beau) et nettement plus raccord (que 12 years a slave) en terme de mise en scène avec la douleur de son personnage. Il y a des facilités oui mais je ne pense pas que McQueen soit le garant de la subtilité non plus.

Kramer contre Kramer (Kramer vs Kramer) – Robert Benton – 1980

30Mon fils, ma bataille. 

   10.0   Le film s’ouvre sur une scène terrible. Dans la pénombre d’une chambre d’enfant, quelques temps après l’heure du coucher, le visage marqué d’une mère désespérée qui embrasse son garçon, lui murmure qu’elle l’aime, lui dit au revoir, et lui, en phase de pré-sommeil, répond un crédule « A demain matin maman », n’imaginant pas une seule seconde la portée de cet adieu provisoire. L’enfant est déjà le centre, le monde. Celui qui réunit, celui qui rompt. Celui qui ne sera que spectateur, celui qui souffrira le plus. C’est un film d’une tristesse hors norme qui offre des instants de magie incroyables. C’est un film constat, d’une fatalité renversante, avec un père d’un côté, une mère de l’autre. L’un sera sous nos yeux durant une grosse moitié de film, l’autre restera hors champ. D’un côté, un père dans l’incompréhension, puisqu’il ne conçoit pas encore le besoin de sa femme, qui lui paraît impulsif, croit en quelque chose qui n’existe pas et se retrouve vite débordé entre deux attentions à temps complet : employé dans une agence publicitaire qui le monopolise et la garde de cet enfant, dont il se rend compte qu’il ne s’en jamais véritablement occupé. De l’autre, une mère arrivée à saturation qui cherche une solution salutaire à cette morosité quotidienne qui la poursuit, lui fait douter de sa qualité de bonne mère autant qu’elle remet en question sa propre existence, et trouve dans cet abandon l’unique moyen de fuir la folie si ce n’est davantage.

     Cette scène de séparation est bouleversante. Elle contient toute cette désagrégation incompréhensible que l’on pourrait lui affubler, mais jamais dans l’emphase, toujours dans une justesse indélébile. Joanna Kramer ne part pas sur un coup de tête, ni sur un sentiment de trahison, d’énervement impulsif, c’est ce qui est le plus terrible, c’est quelque chose de pensé, de mûrement réfléchi, à tel point que lors de son entrée dans l’ascenseur, elle fond en larmes tout en expliquant à son mari abattu, agacé, surpris, qu’elle croit devenir folle, qu’elle ne peut plus assumer ce rôle, n’accepte plus cette condition qu’elle a sans doute jadis espérée. Elle ne lui en veut pas, elle s’en veut, elle ne se reconnaît plus. C’est la force du film, cette remise en question perpétuelle de soi-même, plus tard ce sera à son tour à lui lors du divorce au tribunal.

     Il leur faudra quinze mois pour comprendre cela tous deux. Lui : qu’elle souffrait terriblement de ce rôle de femme au foyer affublé d’abord de gré, inconsciemment, puis contre son gré avec le temps. Elle : qu’elle n’était pas une mauvaise mère, qu’elle était une personne ordinaire qui voulait reconquérir son indépendance, comprenant peu à peu que son enfant avait besoin de sa mère autant qu’elle avait besoin de lui, qu’il n’avait pas mérité cela et elle non plus. Il y a le couple, et l’enfant reste le centre, inévitablement. La réussite majeure du film tient à notre considération de l’un ou l’autre de ces deux personnages, Joanna et Ted. Tout est travaillé dans la nuance, le besoin de comprendre l’un autant que l’autre, dans la difficulté de ses choix, leurs erreurs, leurs évolutions. Joanna est hors champ longtemps, pourtant elle attise notre empathie alors qu’inévitablement nous nous sentons bien plus proche de Ted, et cette nouvelle vie avec Billy. C’était la difficulté du film, ne pas basculer vers un propos confus tendance misogyne, tout du moins faussement féministe. Il est possible de leurs faire des griefs, ils n’en sont bien entendu pas exempts, lui dans son accaparement professionnel, elle dans cet abandon insoutenable, mais le film continue d’éclairer les motivations de chacun, et n’hésite pas à faire entrer une tierce personne, une amie voisine, qui donne au film une dimension existentielle encore plus intense. D’abord du côté de Joanna, Margaret apporte ensuite le soutien à Ted, tous deux ayant en commun une histoire conjugale mouvementée.

     Benton n’offrira pas de fin lumineuse, le film se terminera sur la porte d’un ascenseur qui sectionne inéluctablement le couple en deux, comme il l’avait déjà fait dans une des premières scènes. Ce couple là ne pouvait pas s’en sortir, il ne pouvait y avoir de miracle, ou alors il serait loin, hors film, de toute façon ce n’était pas le propos. Mais pour contre balancer cette noirceur, le cinéaste met en lumière une éventuelle et miraculeuse reconquête conjugale en la présence justement de cette troisième personne, cette femme que l’on quittera en fin de film sur une note d’espoir entre elle et son ex-mari. De ne pas choisir la facilité du happy-end en offrant cette issue non pas aux Kramer mais à ce couple hors champ, je trouve cela absolument prodigieux. Pour revenir à Ted/Margaret il y a une séquence de vaisselles, qu’ils ont en commun, qui est inoubliable. Les visages sont marqués, les sourires nerveux puis il y a une petite vanne de l’un, puis l’autre qui lui enserre brièvement les épaules, tout en lavant/essuyant le verre, une marque de soutien si discrète, si belle à en pleurer. Au même titre que cette séquence en miroir du pain perdu entre le papa et son fiston : une première intervenant le lendemain de la séparation, dans la vitesse, la nouveauté, l’énervement, qui nous plonge du rire aux larmes pour parler grossièrement. Et celle-ci, une heure plus tard, symbolisant les derniers instants passés ensemble (le divorce est prononcé, Billy va retrouver sa mère) qui est tout son contraire : deux zombies au levé, effectuant leurs tâches de façon mécanique, en silence, calmement, suivi d’une scène de regard et d’un câlin, probablement l’un des plus forts moments que le cinéma ait su m’offrir.

     Quand j’étais jeune, j’adorais déjà ce film même s’il devait m’émouvoir autrement. J’ai ce souvenir impérissable de m’être sans cesse placer du point de vue du garçon, sans doute que les premières fois où j’ai vu le film je devais avoir son âge, sensiblement. Je ne suis pas certain d’avoir compris le pourquoi de cet abandon, sans doute pas d’ailleurs, mais je devais pleinement ressentir cette absence. Je me rappelle avoir beaucoup souffert pour Billy, avoir été apeuré par les cris de ce papa qui n’accepte pas que son fils ait renversé un verre de jus sur ses maquettes, avoir été chaviré quand je le voyais pleuré parce que son papa ne voulait pas qu’il mange sa glace tant qu’il n’avait pas fini son plat, avoir eu très mal lorsqu’il tombait de la cage à écureuil et qu’on le recousait dans l’urgence sans anesthésie. Ce sont des moments qui me sont restés gravés à tel point que lorsque j’ai revu le film, une fois grand, semi-ado, ado, déjà adulte je ne sais plus, ces séquences m’ont procuré un effet très étrange, entre association inexplicable présent/passé et différenciation marquée comme si je ne les retrouvais pas exactement tout en reconnaissant malgré tout une image en flash, une odeur, une ambiance. Par exemple, ceci est très clair dans ma tête, j’avais le souvenir d’un appartement beaucoup moins lumineux que celui que je revois dorénavant, j’ai aussi une impression de statisme alors que le film m’a paru cette fois effréné. Ce film est là, en moi, il le restera à tout jamais. Et encore davantage maintenant que je suis père.

The Artist – Michel Hazanavicius – 2011

The Artist - Michel Hazanavicius - 2011 dans Cesar du meilleur film 791804_the-artist-300x199     5.5   La réussite est totale ! J’ai pourtant cru un temps que ça finirait mal cette histoire. Lorsque Georges Valentin (Jean Dujardin) est sauvée de justesse du suicide par la belle Peggy (Bérénice Béjo) qui lui avoue avoir une idée lumineuse en réponse à ce mal-être qui le ronge selon lequel les spectateurs, désormais accoutumés aux voix, ne veulent pas l’entendre. L’idée c’est la comédie musicale. Et le film se terminera là-dessus, sur ce happy-end alors qu’il aurait pu opter pour un penchant régressif, nostalgie du muet autant qu’il aurait pu être un simple pastiche fun mais l’heure est plutôt à la cohabitation artistique des genres et des évolutions. Le muet est has-been, la faute au parlant. Le muet musical fait alors son apparition. L’idée ingénieuse est double puisque le parlant intervient par deux fois seulement dans le film. Lors d’un rêve dans un premier temps, cauchemar de la star qui matérialise ses obsessions et ses craintes, dans lequel il s’invente muet au milieu d’un monde sonore. Puis plus tard, dans la scène de fin, où précédé par le son des claquettes de nos deux danseurs, les mots de l’équipe technique en tournage retentissent, avec cette caméra qui s’éloigne de la scène (muette) et du plateau afin d’enrober ce vaste espace d’échange (parlant) qui se conclue par un traditionnel « Silence ! Moteur ! Action ! ». Le film ne sonne pas tant comme un rappel nostalgique d’un âge d’or révolu que comme la conscience d’une page qui se tourne, d’un monde qui change, évolue et c’est tant mieux, mais que se replonger dans le patrimoine a quelque chose de savoureux. The Artist pourrait donc être le film qui réconcilie les époques, le film d’Aujourd’hui qui donne envie de se replonger dans ceux d’Hier. C’est sa seule véritable ambition. Le reste, comme je le disais, est amplement réussi, aucun doute là-dessus mais il ne faut pas oublier que le film se contente d’être un pastiche, le voir comme tel, ne pas espérer davantage. Sans pour autant le submerger, les références inondent l’écran. Georges Valentin, star déchue, fait inévitablement écho à Sunset boulevard. L’évolution cinématographique dans une période charnière qui voit le parlant reléguer le muet c’était le cœur de Chantons sous la pluie. Quant au personnage de Dujardin, avec ces tentatives de burlesque Chaplinesque, on ne peut s’empêcher de penser aux Feux de la rampe, surtout que l’idée du vieillissement est aussi évoquée ici « les jeunes prennent la place des vieux » dira Peggy à la presse sans savoir que la star du muet l’écoute. Il ne faut pas oublier de signaler le bel emprunt au score de Vertigo et dire que la musique dans The Artist est de manière générale assez géniale. Pour le reste, car « ce film performance » mise aussi beaucoup sur son interprétation : Dujardin est impeccable, qui en aurait douté ? Bérénice Béjo est sublime, sex appeal de l’année haut la main. Quant à Uggy, aucune récompense du meilleur chien ne peut lui échapper, il est fabuleux.

Le discours d’un roi (The king’s speech) – Tom Hooper – 2011

le-discours-d-un-roi-de-tom-hooper-10370320momswSur la voie.    

   5.0   Le titre ne ment pas sur la marchandise, c’est bien d’un discours qu’il est question, de la parole d’un monarque, juste de cela, d’un combat contre une voix. Ce n’est pas une reconstitution historique et bien qu’il y ait un soin apporté aux évènements (la mort d’un roi, l’échec d’un autre, la prise de pouvoir d’Hitler, la déclaration de guerre) les lieux sont très peu filmés, les personnages sont très théâtraux (la moue sympathique de Churchill, la marginalité de l’orthophoniste de génie fou de Shakespeare, la nonchalance d’Elizabeth…) on est propulsé, et on le sait assez vite, dans une machine à décrocher des oscars : Classicisme de la mise en scène, de la progression du récit, interprétation proche de la performance, musique d’accompagnement en permanence et un zeste de fantaisie bon enfant avec ces séances de diction singulière, entre insultes compulsives, gesticulations rigolotes et un retour difficile sur les traumatismes et souffrances d’une enfance que l’on cherche à oublier. Tout le gratin du film oscarisable oscarisé est là, ce pourrait être joliment atroce, et pourtant.

     La première partie du film, qui voit le futur roi affronter ce bégaiement (devant le stade de Wembley, face à son frère, en racontant une histoire à ses enfants, aux côtés des différents médecins) vécu comme un cauchemar, qui l’empêche de croire en son statut majestueux, alors qu’il cherche à tout prix une personne qui l’aidera à s’en sortir, n’a pas grand intérêt, enfin disons que c’est lourd de mièvrerie, c’est hyper musical et on s’en fiche pas mal d’ailleurs. C’est ensuite que le film prend un nouveau départ, dans cette rencontre avec cet orthophoniste aux méthodes particulières, n’hésitant pas à emmener son client vers des retranchements inconnus. Petit à petit le roi surmonte ce problème, mais au prix d’une bataille féroce qui l’oblige à libérer son esprit de souvenirs malencontreux lié à l’enfance, alors qu’il a d’abord refusé de parler de vie privée avec cet homme, qu’il juge en dessous de lui. Le portrait qu’en fait Hooper est plutôt intéressant parce qu’il est dans l’Histoire censé être l’un des rois les plus aimés d’Angleterre, mais pendant une bonne partie du film je l’ai trouvé carrément insupportable. C’est dans le processus de guérison que l’on commence à avoir de l’empathie pour cet homme, en guerre contre sa diction. Ce n’est que ça. Il n’est pas vraiment sympathique mais il est touchant. Et puis je trouve qu’Hooper ne s’est pas trop attardé sur le possible traumatisme de l’enfance, c’est évoqué mais jamais surligné, reste à l’imaginer.

     Le film restera ce qu’il est, rien de plus qu’un joli biopic tire-larmes classique, mais il met rarement les deux pieds dans le plat, il reste bizarrement sobre (certains diront chiant), il progresse timidement, sans que l’on perçoive l’évolution réelle de cette voix. Avoir choisi de laisser la durée du discours final dans son intégralité, même s’il est accompagné par Beethoven, et surtout qu’il s’amuse à rencontrer les visages de (pour ainsi dire) toute l’Angleterre, suspendue à sa radio, avec cette peur de basculer dans le ridicule à cause de ce roi bègue qui prononce un discours d’une importance phénoménale puisqu’il évoque l’entrée du pays en guerre contre l’Allemagne, est un parti pris très osé, surtout jusqu’à ce ouf final symbolisant la réussite du roi, lessivé mais comblé, et ces applaudissements qui supplantent cette tristesse solennelle, et achèvent de faire de ce film et de cet homme le tableau ironique (car minuscule) de l’Histoire en marche, justement parce qu’il ne parle pas vraiment de l’Histoire, mais d’un combat intérieur, du courage d’un homme, de la naissance d’une amitié. J’étais à la fois très gêné et très impressionné. Et en définitive j’ai trouvé ça plutôt émouvant.

No country for old men – Joel & Ethan Coen – 2008

No country for old men - Joel & Ethan Coen - 2008 dans Joel & Ethan Coen no-country-for-old-men

   7.5   Voilà des mois que je voulais le revoir. Se le mater après A serious man n’est pas un hasard, il fallait que je me décrasse. Ce n’est que mon second visionnage mais mince, quelle merveille ce film ! Il y a une science de l’absurde mélangée au western moderne qui est remarquable. C’est très bien dosé. On a le sourire aux lèvres et en même temps le climat est des plus tendu. On a donc envie d’y croire comme rarement chez les Coen.

     On pourrait le voir comme un film choral, très proche d’un Fargo, ou d’un Blood simple. Cette façon si singulière qu’ils ont de s’occuper de leurs personnages. Ainsi nous ne verrons pas Tommy Lee Jones tout de suite. De la même manière Javier Bardem est très présent mais rarement dans le cadre. Et puis il y a Woody Harrelson que l’on voit peu mais son apparition me suffit à dire que c’est mon personnage préféré du film. Il est à l’image de No country for old men. C’est le doseur. Il m’effraie autant qu’il me fait marrer. Là ce n’est pas un film séquentiel. Chaque moment est plus ou moins dépendant d’un autre. Il y a une linéarité qui me plait énormément.

     On est en plein Texas, dans les années 80. Un modeste chasseur trouve malgré lui une mallette de billets que deux groupes de trafiquants mexicains n’ont pas réussi à se départager. Il décide de la garder. John Chigurgh, un gars qui fait flipper avec une coiffure de palymobil, est un personnage bien curieux, sorte d’électron libre, dira quelqu’un dans le film, qui recherche cette fameuse mallette, qui contient un transpondeur. Et il y a le vieil homme, ce policier qui ramasse les miettes derrière.

     Je ne pense pas qu’il y ait de grande réflexion à tirer de ce film fabuleux. Comme il n’y en avait pas dans les western spaghetti de Léone. C’est une chasse à l’homme. Avec très peu d’émotion. Il y a les grands espaces naturelles désertiques le jour. Et une ville dépeuplée la nuit. Sur les trois personnages majeurs, l’un ne parle pas beaucoup, il tente de s’en sortir. Le second joue la vie de ses rencontres à pile ou face, remplace l’arme à feu par une bombonne d’oxygène et semble tout droit sorti d’une autre planète. Le troisième, le vieil homme, constate qu’il est dépassé. Il pense que les choses ont trop changé, qu’aujourd’hui n’est plus comme avant, que l’ère est mauvaise. Un ami, en fin de film, lui dira que ce n’est que vanité de penser cela. Qu’un homme de son âge, il y a cent ans, dirait la même chose. Il se rend compte alors qu’il n’est pas que dépassé, il est vieux tout simplement.

Slumdog Millionnaire – Danny Boyle – 2009

Slum5_LDreams on fire.    

   3.5   J’ai vu mon premier Bollywood movie! Plus sérieusement, sans connaître le cinéma indien, mais vraiment que dalle de chez que dalle, Danny Boyle m’aura permis d’en saisir un peu la trame, la logique étant donné qu’il nourrit son film de lourds sentiments, de paillettes, de scènes mélodramatiques à foison et qu’il nous réserve pour le générique final une sympathique chorégraphie sur un quai de gare. L’histoire assez nunuche et réberbative est celle d’un jeune gars des Bidonvilles de Mumbai qui se retrouve – et on sera plus tard pourquoi car d’emblée c’est le comment il s’y démerde qui nous intéresse – dans l’émission « Qui veut gagner des millions? ». Aussi, l’on sait tout de suite qu’il a raflé le pactole. Le but étant de montrer à chacune des questions ce pourquoi il connait ou non la réponse. Donc, quand on lui demande le nom d’une vedette de cinéma hop un retour en arrière afin que l’on comprenne comment Jamal a connaissance du sujet. Quand c’est une question de religion c’est un évenement tragique de sa vie qui lui permet de répondre correctement. Et ainsi de suite. C’est comme ça tout le temps. Parfois pénible et prévisible.     Durant toute une partie du film c’est bien l’industrie Hollywoodienne qui prime. ça pue la thune, la mise en scène est ultra speedée, très fatiguante mais qui a au moins le mérite, comme souvent chez Boyle (The Beach, Sunshine, Trainspotting…) d’être énergique et sans temps morts. La fin c’est Bollywood à fond, enfin j’imagine. Je ne raconterai rien mais soyez-en sur, ça vaut le détour! En fin de compte, sans doute m’étais-je préparé à voir exactement ce que j’ai vu, mais ce n’est pas du tout la daube que j’en attendais. Les personnages sont tout mimis, il y aussi plein de gens pas gentils, ça flashbackise un max, mais c’est finalement très attachant. Et puis hein cette petite actrice, avec ses yeux miel, à elle seule ça vaut le coup d’oeil!

123

Catégories

Archives

octobre 2023
L Ma Me J V S D
« sept    
 1
2345678
9101112131415
16171819202122
23242526272829
3031  

Auteur:

silencio


shaolin13 |
Silyvor Movie |
PHILIPPE PINSON - ... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Playboy Communiste
| STREAMINGRATOX
| lemysteredelamaisonblanche