Archives pour la catégorie Renaud Victor

Fernand Deligny, à propos d’un film à faire – Renaud Victor – 1989

06.-fernand-deligny-a-propos-dun-film-a-faire-renaud-victor-1989-900x619La méthode.

   5.5   Voilà ce qu’aurait dû être Ce gamin, là version Truffaut s’il avait eu un minimum de bon sens artistique, soit une sorte de non film commercial, avec une parole donnée, écoutée (comme dans un Duras) sur laquelle sont parfois insérées des images du film à tourner. Assez ingrat, certes, mais le film a au moins le mérite de ne pas couper la poire en deux, d’être purement ce qu’il doit être : Un projet en construction. Evidemment, le film en question ne verra jamais le jour, mais il reste ces quelques images qui nous font croire à un basculement total ou presque dans une dimension fictionnelle, Deligny et Victor y jouant des rôles, autour d’un petit garçon brésilien, autiste mutique, toujours. Ce qui frappe dans la parole de Deligny c’est cette manière qu’il a de tout offrir par tâtonnements, d’être dans la recherche perpétuelle de l’utilité du langage. L’autisme devient un radeau. Filmer devient camérer. Le langage une grille. Et ce monologue offre une multitude de questionnements improbables, amusants et complexes dont Deligny seul avait le secret.

Ce gamin, là – Renaud Victor – 1976

05.-ce-gamin-la-renaud-victor-1976Adieu au langage.

   5.0   Je n’ai cessé, durant l’intégralité du film, de m’interroger sur le pourquoi de la présence d’une narration, beaucoup trop conséquente il faut le reconnaître. Comment un type comme Deligny, que la parole n’avait guère intéressé (parce qu’elle est selon lui une grille avec l’autiste mutique) dans Le moindre geste, pouvait accepter de telles directives allant à l’encontre de sa façon de faire ? Comment Renaud Victor, qui chérissait Le moindre geste, avait eu l’idée saugrenue d’enrober le geste par la pédagogie ? La réponse est simple, évidente, mais je l’ai su après : François Truffaut produisait le film et imposa une voix off (Celle de Deligny, qui reprenait certains de ses commentaires de rushs voire de ses discours pédagogues) contre l’avis de Victor et Deligny. Ces derniers voulaient que le film dure cinq heures ; Truffaut refusa, évidemment, préférant le glisser dans un circuit commercial, d’autant que le film arrivait quasi dans la foulée de L’enfant sauvage. Bref, c’est dire combien les regards sont différents ; Combien être cinéaste c’est aussi faire marcher une industrie, ce que Deligny et Victor étaient loin d’être, dans leur chair. Il en résulte un film raté qui aurait pu être cinglant. Un film pour les circuits scolaires (j’exagère à peine) alors qu’il pouvait devancer les merveilles de Depardon et Wang Bing que sont San Clemente et A la folie. L’idée était géniale : Filmer les autistes dans un lieu loin des ambiances closes des hôpitaux auxquels ils ont l’habitude d’être cantonner ; Mais à l’inverse du Moindre geste, ne plus les filmer dans la solitude et la fuite, mais dans leurs interactions avec des accompagnants qui ne s’occupent pas d’eux mais sont à leurs côtés, effectuant des tâches quotidiennes. S’intéresser au chemin qu’ils parcourent durant leur journée et constater que petit à petit ce chemin se cale de plus en plus sur celui des accompagnants allant même jusqu’à reprendre et répéter certaines de leurs manies, comme des fous imitant des fous. Des gestes décisifs et coordonnées, sans aucune forme de langage verbal.


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silencio


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