5.3 Si dans son remake libre du premier opus il n’expérimentait pas tellement dans le domaine du gore, préférant s’attarder sur l’enfance de Michael, tout en proposant un retour au bercail violent mais restant dans les balises (outre l’idée de la recherche de la petite sœur, ce qui n’intervenait pas avant le deuxième volet dans l’ancienne saga) narratives instaurées par Big John, il laisse ici libre cours à son imagination et son désir de manipulation ultime pour nous embringuer dans un pur cauchemar ambigu dès le début autant qu’il le sera à la toute fin. Certains (les puristes) crieront au n’importe nawak, personnellement je trouve que c’est un volet qui a des couilles, à défaut d’être véritablement passionnant. Car étrangement je ne dirais pas que je me suis ennuyé par moments, mais il faut dire que Rob Zombie pousse tellement loin son expérimentation initiale (le rêve de Laurie) qui dure tout de même un tiers du film, que lorsque tout retombe comme un soufflé, on a du mal à reprendre correctement le wagon. Probablement des problèmes de rythme, juste cela, c’est parce que le premier ne m’y avait pas habitué. Car pour le reste c’est une machine du gore lancée à pleine vitesse, où l’on ne sait plus si on navigue dans le vrai, dans les pensées de Michael, dans les pensées de Laurie. La jeune femme est-elle folle ? Michael est-il mort ? C’est dans cette ambiguïté que Halloween II tient là quelque chose d’outrageusement décapant, dépoussiérant d’un seul coup d’un seul toutes les suites du film de Carpenter (même si je ne les ai pas toutes vues) en proposant de l’extrême. Jusqu’à un final de malade qui n’est pas sans rappeler Haute tension, l’excellent film d’Alexandre Aja. Sans doute je préfère le premier, parce qu’il est beaucoup plus fort, qu’il me surprenait sans cesse, mais cette suite – car il s’agit vraiment d’une suite, le film commence là où s’arrête le précédent – a quand même un charme bien dégueulasse que j’aime beaucoup.
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Halloween – John Carpenter – 1978 (contre) Halloween – Rob Zombie – 2007
Publié 7 octobre 2010 dans John Carpenter et Rob Zombie 0 CommentairesJe viens de voir ou de revoir les deux, à la suite l’un de l’autre et il est à mon sens très intéressant d’effectuer un comparatif entre ces deux films, justement car ils ne se ressemblent pas beaucoup.
9.0 En gros je trouve l’opus de Carpenter très épuré, presque abstrait, dans le sens où rien ne nous est donné sur Myers à part qu’il est diabolique, qu’il a tué sa sœur à l’âge de neuf ans, qu’il s’est évadé de prison quinze ans plus tard, qu’il s’apprête à faire un carnage à Heddonfield, sa ville d’enfance. Il semble n’y avoir aucune barrière entre lui et sa violence, au point de ne jamais la remettre en question et ce jusqu’aux derniers plans du film. Myers n’est pas un homme répète le docteur Loomis, c’est l’incarnation du mal. Et à ce petit jeu mystérieux, Carpenter distille une angoisse fascinante, jouant de la caméra subjective, de ces plans récurrents où la tête de Myers nous est cachée, d’une musique oppressante et redondante, de la respiration de Myers en continu et d’une ambiance morte. Car Heddonfield, pendant Halloween, n’est que ville fantôme. Certains enfants, certains lycéens, mais ils ne sont pas nombreux, jonchent les trottoirs résidentiels, et rentrent chez eux après l’école. Pendant que certains seconds gardent certains premiers, d’autres s’éclatent sexuellement. Il n’y a de place à Heddonfield que pour le baby-sitting et la baise. Et l’angoisse permamente que l’on se refuse d’avoir, à l’image de Jamie Lee Curtis rassurant les enfants de la non-existence d’un croque-mitaine, alors qu’elle n’est pas plus rassurée elle-même. Pendant que certains enfilent des masques pour faire peur aux autres, d’autres enfilent le masque qui leur permet de surmonter leur peur, mais il y en a un qui l’enfile pour tuer, c’est Michael Myers. Dans le film de Carpenter, il ne semble être attiré par rien d’autre que ça : tuer. Déshumaniser le meurtrier, lui donnant l’aspect de monstre, de façon à pérenniser l’angoisse, inculquer au spectateur qu’il a affaire à un méchant hors norme, sans sentiment, qu’il ne peut guère compter sur un revirement de situation humain. Il va jusqu’à le rendre invincible.
6.0 On est évidemment dans une toute autre optique chez Rob Zombie, puisqu’il ne s’agit ni plus ni moins que de rendre Myers humain aux yeux du spectateur pendant qu’il ne l’est toujours pas pour le docteur Loomis. Dès le début du film le ton est donné. Chez Carpenter nous étions Michael enfant (caméra subjective) pendant cinq minutes, avec sa respiration comme rythme, poursuivant sa sœur dans les couloirs de la maison, avant de la massacrer au couteau. Chez Zombie on atterrit dans un cercle familial en crise, où Michael se cache déjà derrière des masques, pour masquer son apparence fragile que son père par alliance ne fait qu’agrémenter, entre violences et humiliations à répétition, pendant que sa sœur l’appuie, que sa mère reste impuissante et que la petite dernière, tout bébé, ne peut encore donner son avis. Et à l’école c’est le même problème, Michael étant la risée de ses copains de classe qui n’hésitent pas à lui en faire baver sévère. Mais Michael nourrit secrètement une passion pour la mort et la destruction, tenace, qui s’apprête à exploser. Viendra le jour du fameux meurtre d’Halloween, comme chez Carpenter, même si elle est plus massive chez Zombie, Michael se débarrassant en quelques minutes de l’ami de sa mère, de sa sœur et de l’ami de sa sœur. Sur les marches, avec la petite dans les bras, Michael est sûrement plus heureux ainsi. Il est alors enfermé quinze ans (durant lesquels sa mère se tire une balle dans la tête) puis s’évade, sauf que Zombie montre un peu de la prison et un peu de l’évasion, pendant que Carpenter jouait de l’ellipse. Et le gros changement dans ce nouvel opus c’est le motif de retour de Michael Myers : sa petite sœur. Il vient la chercher. Mais évidemment comme on va lui barrer quelque peu la route, il ne va pas non plus être ultra pacifiste. Zombie, à ce petit jeu là, joue sur le gore plutôt que sur l’angoisse et son étirement. Du coup, par moments, ça fait un peu boucherie, renforçant l’idée qu’on se faisait de Michael Myers : un tueur fou et sans scrupules. Avant qu’il ne devienne ce personnage qui ne souhaite qu’une chose, revoir sa sœur, alors que la concernant c’est comme si elle ne l’avait jamais vu, toute trace de cette ancienne vie a été rayée. Quand Carpenter avait crée une sorte de tueur sans âme, comme si pour Halloween, il revenait d’entre les morts, Zombie en fait quelqu’un de blessé, quelqu’un de très humain, il donne vie à Michael Myers, et le gros de la réussite est là.
Je garde une nette préférence pour le film de John Carpenter parce que je préfère les films de mise en scène qui préservent leur mystère à ceux moins travaillés formellement qui s’attachent davantage à établir une psychologie de personnage. Mais en tant qu’étude psychologique justement, du mythe Michael Myers, on ne pouvait rêver meilleure adaptation libre que celle de Rob Zombie.