L’émoi du désert.
5.5 Je continue de ne pas comprendre le cinéma de Wes Anderson, qui me semble à la fois épuré et surchargé, plein de passion (pour ses personnages, qu’il aime dessiner) mais atone, raffiné mais pourtant si lourd. J’y glane quelques moments, quelques scènes, un visage, un regard, un plan, un mouvement de caméra. Quand l’ensemble défile sous mes yeux circonspects, qui sitôt la projection terminée, oublient vite ce à quoi ils viennent d’assister.
Néanmoins, il y a dans Asteroid city, une matière qui au préalable, m’attire. Le film me séduit par son folklore fifties et sa petite virtuosité absurde d’enchâsser western et récit de science-fiction. Il m’intrigue aussi par cette histoire de personnage (de femme, de mère) absent mais qui fait office de centre de gravité. Et de manière plus concrète, je préfère ce film-ci (à The French dispatch ou The grand Budapest hotel) pour son cadre, son vent, son silence.
Puis je m’y suis un peu ennuyé. Enfin pas tout à fait. Je sortais d’une période de six semaines sans être entré dans une salle de cinéma. Il y avait donc un vent de séduction, un plaisir du regard, tant on retrouve les obsessions visuelles, très marquées, du cinéaste. C’est très beau, visuellement, Asteroid city. Mais il n’y a pas de relais, sur moi : L’intrigue m’intéresse aussi peu que chacun de ses personnages. Une capsule succède à une autre. Finalement, rien n’a changé.
Je continue d’y voir qu’une virtuosité sous cloche. De comprendre ce qui peut émerveiller voire toucher, mais cette émotion sous-jacente ne prend jamais sur moi tant j’observe cela avec une distance froide. C’est brillant mais toujours très artificiel et désincarné. C’est un petit laborantin plus qu’un cinéaste, à mon sens. Et qu’il s’agisse ici du récit d’une pièce de théâtre ne l’aide pas, je crois.
Au même titre que chez Nolan (dans Oppenheimer) l’épure narrative (des personnages de passage), formelle (moins axé sur la frénésie de la vignette) et décorative (un village et un cratère dans un désert) est paradoxalement annulée par la lourdeur du trait. Une esthétisation malade, pour ne pas dire malsaine.
J’ai donc été plutôt séduit – pour un Wes Anderson, s’entend – sur le moment, mais les vacances sont passées et au même titre qu’Oppenheimer (qui jouissait par ailleurs aussi – j’y vois beaucoup de similitudes – d’un casting haut de gamme) je me rends compte qu’il ne m’en reste plus grand-chose. Son cinéma a le don de s’évaporer dans mon esprit à chaque fois, c’est terrible.
Wes Anderson et moi ça fait deux. J’ai parfois apprécié ces films mais ne les ai jamais revus. Hormis une fois, pour Moonrise kingdom : Une déception en le revoyant, à la hauteur du plaisir qu’il m’avait provoqué en salle. J’essaie de pas insister et en même temps son cinéma, très singulier et personnel, me rend chaque fois curieux.