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Grand Tour – Miguel Gomes – 2024

02. Grand Tour - Miguel Gomes - 2024Voyage manqué.

    5.5   1918, Birmanie. On suit Édouard, un fonctionnaire britannique qui fuit sa fiancée avec laquelle il devait se marier et entame un grand tour, de Singapour à Shanghai, en passant par Saigon. Voyage dans lequel il finira par se perdre, en pleine jungle. Le second tableau arpentera le même trajet aux crochets de Molly, cette fois, sa fiancée à sa recherche.

     C’est un film multiforme. Voyageant dans l’avant cinéma : Images mouvantes des forains, ombres chinoises, grandes roues manuelles. La couleur, le noir et blanc. Du théâtre, du documentaire. In situ et en studio. Il est hybride jusque dans l’utilisation des langues : personnages anglais, narration off en portugais, terres asiatiques, où l’on parle aussi français. C’est aussi une comédie de remariage, mais où le couple ne sera jamais réuni.

     Il y a l’imaginaire colonial qui irriguait déjà Tabou, mais l’Afrique est remplacée par l’Asie. Or ici c’est un peu comme avec Le Fleuve, de Renoir, j’ai un peu l’impression que l’idée est gâchée par la tentation exotique. Qu’il y a un petit côté touristique de cinéaste voulant faire une romance à l’ère coloniale.

     Et j’ai eu un gros problème avec les personnages. Lui d’abord, insignifiant. Molly ensuite. Molly c’est pas Aurora (l’héroïne de Tabou), Cristina Alfaiate ayant qui plus est la malchance de me faire penser à Sally Hawkins, que je n’aime pas du tout. Et puis ce rire insupportable, c’est pas possible.

     Pourtant, à l’instar de Tabou, Grand Tour fonctionne en deux parties distinctes. Déjà dans Tabou il y avait le plaisir d’une seconde partie qui répondait à la première et qui permettait au film de s’envoler complètement. J’ai attendu cet émerveillement-là devant Grand Tour, il n’est pas venu. Je l’ai suivi sans passion. J’ai trouvé ça très beau visuellement, c’est tout.

Un p’tit truc en plus – Artus – 2024

12. Un p'tit truc en plus - Artus - 2024En présence d’un clown.

   4.0   Ce sont toujours un peu des anomalies ces films qui cumulent des entrées de façon colossale. Celui-ci est donc le raz-de-marée de l’année. Dix millions d’entrées. Un film sur un père et son fils criminels coincés dans une colo avec des personnes en situation de handicap. Un film qui ne rie jamais d’eux mais avec eux. Un film tout à fait rassembleur. Un film surtout déjà vu mille fois. Dans sa forme, déjà. Filmé comme tous ces cartons, type Camping, Intouchables ou Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu. Et dans le fond c’est clairement le même film que Nos jours heureux mais on a remplacé les gosses par des trisomiques. Mais vraiment hein : les mêmes gags (le running-gag de la fille qui se prend des trucs dans la tronche en permanence) et les mêmes scènes-vignettes et les mêmes transitions musicales. Le tout saupoudré d’une intrigue de casse/cavale entre père et fils (Cornillac & Artus) que la colo forcée va guérir du mal, forcément. C’est mignon mais aussi complètement anecdotique, cousu de fil blanc, mais il y a au moins le plaisir de voir des personnages handicapés écrits sinon mieux écrits que les éducateurs spécialisés valides qui les accompagnent. Le fait de les voir démasquer rapidement le personnage campé par Artus – qui fait semblant d’être attardé – est évidemment la meilleure idée du film. Après, c’est évidemment très subjectif, mais on rit pas beaucoup, non ? Heureusement Artus joue dans son film, Artus pour qui j’ai toujours eu de la sympathie, en humoriste, dans Le bureau des légendes ou dans des merdes. Et surtout, heureusement qu’Alice Belaidi est là. Ça me rappelle qu’il faut vraiment que je voie la troisième saison d’Hippocrate.

Here – Robert Zemeckis – 2024

07. Here - Robert Zemeckis - 2024Fenêtre sur salon.

   5.5   À l’origine il y a un roman graphique – que je rêve de lire – du même nom, signé Richard McGuire. L’idée c’est d’abord un lieu. Plus inédit, l’autre idée c’est un angle inchangé. Ainsi, les cases (chez McGuire) et les plans (chez Zemeckis) sont observés d’un point de vue identique et immobile. Il s’agit donc du récit d’un lieu, à des époques variées, selon un ordre non chronologique. Idée géniale qui semblait bien casse gueule à l’écran, surtout venant de Zemeckis, qui n’est pas un spécialiste du plan fixe.

     C’est un film courageux et hybride en ce sens qu’il tente d’être expérimental et populaire à la fois. Malheureusement la mayonnaise prend difficilement. Le problème majeur pour moi c’est qu’il n’y a pas de durée, jamais. Une vignette en supplante toujours une autre. J’ai l’impression que chaque morceau est uniformisé, semblable au précédent et paradoxalement il me semble que Zemeckis s’intéresse pas vraiment à l’histoire du peuple indien ni à sa famille d’afro-américains.

     Celle qui le drive c’est celle qui s’étire sur trois générations, avec Tom Hanks et Robin Wright, le couple de Forrrest Gump. Les retrouver ne produit absolument rien sur moi, sans doute car, aussi bien fait soit-il, le de-aging me gêne constamment. Je suis toujours en train de me dire à quel point c’est bien fichu et bizarre à la fois. Ça me tient continuellement à distance. Les petites fenêtres qui s’ouvrent systématiquement dans les plans pour ouvrir sur une autre temporalité m’empêchent aussi de me plonger dans une époque ou une autre, je n’ai jamais le temps. Tout me paraît beaucoup trop écrit et fabriqué.

     Et pourtant le film a fini par m’émouvoir d’une part lors de la scène du gâteau d’anniversaire, puis dans l’avant-dernier plan, qui surprend et qui donne les clés du projet : filmer la mémoire d’un lieu. Il y a aussi une scène formidable avec un miroir. Et une fenêtre qui apparaît dans le miroir. Il y a l’idée géniale que cette femme n’a jamais vraiment voulu vivre ici, qu’elle a fini par avoir ce lieu en horreur. Il y a plein d’idées, tout le temps, Zemeckis est un super cinéaste. Et je resterais toujours curieux de voir son prochain projet.

Juré n°2 (Juror #2) – Clint Eastwood – 2024

06. Juré n°2 - Juror #2 - Clint Eastwood - 2024Le douzième homme.

   7.5   Clint Eastwood, 94 ans, refait à la fois Douze hommes en colère et Le septième juré mais dans un film cent pour cent Eastwoodien, qui interroge les limites de la justice, la construction de la lâcheté, le dilemme moral et l’obsession de ne pas voir au-delà de ses propres zones de réussite, confort, expérience personnelle et intérêts individuels, qu’on soit avocat, procureur, juré et/ou coupable. La justice n’est finalement jamais corrélée à la vérité, mais dépend systématiquement d’un facteur humain mouvant. Film passionnant, d’une fluidité totale, dans chacun de ses rebondissements de scénario. Peut-être un peu trop propre et prévisible dans sa mise en scène, mais qu’importe. Un grand Clint.

Le voyage en pyjama – Pascal Thomas – 2024

04. Le voyage en pyjama - Pascal Thomas - 2024A la recherche de notre temps perdu.

   3.5   Pascal Thomas s’enlise encore et toujours (depuis quand n’a-t-il pas fait un bon film ? Mercredi folle journée ?) avec ce film de vieux libidineux (son personnage couche ou a couché avec toutes celles qu’il rencontre, lesbiennes comprises) sur un dandy narcissique parcourant au présent son passé sentimental, dans un délire mélancolico-merveilleux, disons. Une sorte d’A la recherche du temps perdu (il va d’ailleurs citer Proust un moment donné) version vaudeville d’un Mouret mal digéré, dans lequel viennent passer une tête : Annie Duperey, Pierre Arditi, Hippolyte Girardot. Un conte d’été en charentaises, quoi. Les dialogues sont surécrits, la photo est atroce, la petite musique de fond insupportable. C’est pas terrible.

La prisonnière de Bordeaux – Patricia Mazuy – 2024

08. La prisonnière de Bordeaux - Patricia Mazuy - 2024Sans cérémonie.

   3.0   Alma habite une grande bâtisse en ville, seule avec sa domestique. Mina est mère de deux enfants, vit en banlieue lointaine et travaille dans un pressing. Elles se croisent toutes deux en prison lorsqu’elles rendent visite à leur conjoint. Alma propose à Mina de l’héberger. Une relation naît, une sorte de complicité rivale inattendue, une amitié contrariée.

     Quasi tout trouvé insupportable là-dedans. Au sortir de la séance, je ne comprenais pas comment la réalisatrice du sublime Travolta et moi ou Paul Sanchez est revenu avait pu faire un film aussi nul, lourd et daté, avec un matériau coécrit avec Bégaudeau, pourtant. Et puis je me suis rappelé de Sports de fille (ce machin insupportable avec Marina Hands). Bref Mazuy et moi c’est OUI ou NON. Avec Bowling Saturne entre les deux, je dirais, mais penchant tout de même du bon côté. Là c’est clairement NON.

     Isabelle Huppert m’a constamment semblé à côté en dominante généreuse. Hafsia Herzi en permanence à se demander ce qu’elle foutait là dans ce rôle d’opportuniste asservie. On comprend vite où Mazuy veut en venir dans ce double portrait chevauché : qu’importe ce qu’on bouscule, il y aura toujours un déséquilibre social, une opposition de désirs, un conflit d’émancipations. Passionnant oui. Mais cinématographiquement c’est le néant. Un Chabrol sous Prozac. J’étais malgré tout ravi de revoir Magne-Håvard Brekke (magnifique chez Mia Hansen-Løve dans Un amour de jeunesse ou Le père de mes enfants).

Haunted – Lewis Gilbert – 1995

17. Haunted - Lewis Gilbert - 1995Fantômes en fait.

   4.0   L’ouverture rappelle d’emblée celle de Don’t Look now, de Nicholas Roeg. Mais au détour de trois plans on sait déjà que le film de Lewis Gilbert ne lui arrivera pas à la cheville. Il y a donc un drame avec une petite fille dans le parc d’une grande bâtisse. Puis on est parachuté dans le milieu de la parapsychologie, vingt ans plus tard, en pleine Angleterre post victorienne. Le frère de la fillette décédée part enquêter sur des phénomènes étranges dans le sud-est de l’Angleterre. L’action se déroule quasi entièrement dans une maison élisabéthaine. Bref un film de fantômes, réalisé correctement, mais de façon la plus académique possible, par un réalisateur surtout connu pour avoir réalisé quelques opus de James Bond. Film oublié dans la seconde.

La soirée – Jean Eustache – 1963

13. La soirée - Jean Eustache - 1963L’appartement.

   4.0   Eustache s’inspire d’une nouvelle de Maupassant. La soirée est un projet inachevé, sans bande son : les bobines ont été retrouvé à la fin des années 90 par le fils de Jean Eustache. Un homme (Interprété par Paul Vecchiali) invite des amis pour leur lire un texte sur le cinéma qui vient d’être publié et écrit par ses soins. Puis s’ensuivent, on imagine, des discussions, dans cet appartement, autour de cette lecture ou non. On y reconnaît aussi André S. Labarthe. En parallèle, un couple tente d’avoir un peu d’intimité, mais l’étroitesse du duplex les en empêche. Cette ébauche de film se clôt sur un magnifique éclat de rire.

Un coup de dés – Yvan Attal – 2024

14. Un coup de dés - Yvan Attal - 2024Pour un avion.

   2.0   Les deux précédents films d’Yvan Attal m’avaient surpris en bien. Celui-ci, par son intrigue de thriller 90′s, me rendait plus curieux encore. Bon, c’est une catastrophe. C’est mal raconté, mal monté, mal joué. On ne croit à rien. Ils chialent tous au moins une fois et on a plutôt envie de se marrer / de les baffer. Ils sont tous nuls. Et quand tu crois que t’as vu le pire, t’as le petit fils Belmondo qui débarque. Alignement de planètes trop parfait pour être vrai, le film m’en voulait forcément personnellement. Pire endive que ce type y a pas ! Et bien c’est lui qui s’en sort le mieux, c’est dire. Bref c’est un calvaire de bout en bout. D’autant que tout est archi prévisible (la table basse) ou carrément improbable (la voiture). Allez, dans un grand élan d’indulgence, le twist final, anti spectaculaire au possible, est plutôt bien vu.

L’oeil du malin – Claude Chabrol – 1962

19. L'oeil du malin - Claude Chabrol - 1962Hostile.

   6.0   Le sixième film de Claude Chabrol est un objet très sec, rugueux, aussi glacé que son personnage. Plus glacé encore que La femme infidèle, qu’il réalise quelques années plus tard.

     Le journaliste Albin Mercier est envoyé dans le sud de l’Allemagne pour y faire un reportage. Il rencontre le romancier Andréas Hartmann et la femme de celui-ci, Hélène. Il envie d’abord leur bonheur, puis découvre qu’Hélène, en fait, trompe son mari. Espérant obtenir ses faveurs, il essaie de la faire chanter.

     Quasi abstrait, le déroulement se vit aux crochets d’Albin, enfermé dans un univers mental malade, renforcé par une voix off omniprésente, un démiurge tout en ressassements hostiles. Afin d’accentuer cet état vindicatif, le couple qu’Albin visite et auquel il s’attache, échange essentiellement en allemand, langue qui lui est complètement étrangère.

     On pense aussi bien à Plein Soleil qu’à Fritz Lang. Mais l’interprétation est pas au niveau. Jacques Charrier manque vraiment de charisme. Reste une découpe parfois très graphique et une superbe photo signée Jean Rabier. La séquence de la filature pendant l’Oktoberfest à Munich, est géniale, le film prend alors momentanément la roue d’Hitchcock.

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silencio


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