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En place – Netflix – 2023

06. En place - Netflix - 2023Tout simplement bof.

   4.0   Le premier épisode donne la sensation de plonger dans un prolongement du très bon Tout simplement noir. Une version course à l’Elysée, puisque Stéphane (Jean Pascal Zadi) au préalable simple animateur de quartier se retrouve candidat présidentiel à la suite d’une vanne envoyée en direct au candidat gauchiste et maire de sa ville.

Quelques trucs m’ont fait marrer – grâce en grande partie à Zadi, sa gueule, sa diction je l’adore – notamment durant le premier épisode justement. Ou bien vers la fin en partie grâce à deux autres personnages : l’écoféministe incarnée par Marina Fois et le raciste notoire joué par Pierre Emmanuel Barré (On le voit beaucoup trop peu, c’est dommage).

Malheureusement, la série, pourtant très courte (6 x 30min) s’essouffle vite. Tout paraît bâclé, tombe à plat. Le rôle d’Eric Judor est un peu raté, aussi, on comprend pas bien son personnage. Benoit Poelvoorde est très décevant également. C’est surtout très sage, en fin de compte.

Un fou rire néanmoins, durant l’épisode 5, je crois : lorsqu’on voit la vidéo de campagne de la candidate écolo : Marina Fois se baladant en vélo dans son village et lâchant en croisant un habitant : « Eh dis-donc, ma Vhs du Sacrifice de Tarkovski, elle s’appelle revient… je suis maire, pas médiathèque » ça m’a fait la journée.

Diaboliquement vôtre – Julien Duvivier – 1967

13. Diaboliquement vôtre - Julien Duvivier - 1967Nécrose de la vie.

   3.0   Amnésique à la suite d’un accident de voiture, Georges Campo (Alain Delon) rentre chez lui. Mais rien ne lui revient. Ni le souvenir de cette femme, ni celui de cet immense château, ni son valet, ni son ami médecin, ni son chien, pas hyper chaleureux à son égard non plus. Rien. En prime il fait de drôle de rêves de guerre. Et bientôt il manque de tomber dans un trou, puis de se faire écrabouiller par un lustre. Au même titre que rien ne revient à Georges, rien ne fonctionne dans ce film. C’est une déclinaison ratée des Diaboliques, de Clouzot, on va dire. Par ailleurs, on note que Diaboliquement vôtre a l’étrange particularité d’être le dernier film de Julien Duvivier, qui meurt, deux mois avant sa sortie, dans… un accident de voiture. Une anecdote plus « intéressante et troublante » que le film lui-même.

L’attentat – Yves Boisset – 1972

08. L'attentat - Yves Boisset - 1972Casting quatre étoiles.

   5.0   Trintignant, Volonte, Seberg, Noiret, Bouquet, Scheider, Bouise, Cremer, Piccoli, Blanche, Périer, François : C’est probablement l’un des castings les plus dingues du cinéma français. Tous au service de ce film d’espionnage implacable, inspiré de l’affaire Ben Barka. C’est vraiment pas un film facile (à aimer). Hyper cadré et dialogué, trop, trop écrit, mais tellement bien incarné, pour compenser sa froideur d’ensemble. À l’image de la musique d’Ennio Morricone, faite de stridences lointaines, minimale, angoissante. Un film impressionnant autant qu’hermétique.

Lunettes noires (Occhiali Neri) – Dario Argento – 2023

03. Lunettes noires - Occhiali Neri - Dario Argento - 2023Fadeur aveugle.

   4.0   Il faut savoir que je ne connais absolument pas les films réalisés ces trente dernières années par le réalisateur de Suspiria, hormis Le sang des innocents que j’aime assez, par ailleurs. On me dit du bien notamment de son Syndrome de Stendhal, j’essaierai à l’occasion. Mais pour être honnête, Argento n’a jamais été une priorité. Donc à la fois je n’attends rien de celui-ci, mais pas un mauvais film non plus. Et je suis déçu sans l’être, sans doute car je ne suis pas surpris. J’aime beaucoup l’ouverture, qui confirme qu’Argento tire son obsession chez Antonioni mais ensuite je m’y ennuie beaucoup et en grande partie car je trouve sa mise en scène très terne, l’esprit giallo peu convaincant, l’interprétation au ras des pâquerettes. Je trouve que ça ressemble à une version ratée du formidable Terreur aveugle, de Richard Fleischer. Restent quelques jolies choses, la musique probablement, mais rien qui ne sorte de l’ordinaire. Vite oublié.

Mon crime – François Ozon – 2023

07. Mon crime - François Ozon - 2023Les désastreuses années 30.

   2.0   Cette veine théâtrale d’Ozon (Huit femmes, Potiche, L’amant double…) ne m’intéresse pas beaucoup. Mais celui-ci c’est high level : Aussi atroce que l’accent de Dany Boon tentant d’imiter Raimu, le dernier Ozon est un théâtre de boulevard complètement atone, véritable polar sous cloche, qui s’en remet à ses petits numéros de comédiens plongés dans leur cabotinage respectif et des clignotants metoo grossiers transposés dans les années 30. Quant au propos revendiqué féministe (la revanche judicaire des femmes) il est liquidé par l’obsession du film à créer des personnages féminins antipathiques, vénéneuses, arrivistes, superficielles. C’est tout de même un comble que le personnage pour lequel nous avons un peu d’empathie soit celui incarné par Dany Boon. La scène de procès est pire que la scène interminable au commissariat qui la précède. Les nombreuses scènes d’appartements n’en parlons pas. Et il y a le dernier tiers, avec l’arrivée d’Hupert en sosie d’Armande Altaï. L’enfer. Un film qui fait peut-être davantage théâtre que la pièce dont il s’inspire.

Désordres (Unrueh) – Cyril Schäublin – 2023

18. Désordres - Unrueh - Cyril Schäublin - 2023Eloge du décentrement.

   9.0   Le récit prend place dans les années 1870, au sein d’une horlogerie suisse, contant aussi bien le quotidien des ouvrières que l’expansion du mouvement anarchiste. C’est aussi la rencontre entre une femme, Joséphine, qui assemble des balanciers et un homme qui vient cartographier le territoire, Pierre Kropotkine.

     Ce n’est pourtant pas un biopic sur Kropotkine, malgré ce carton initial qui reprend une citation de lui ; malgré cette première scène durant laquelle ses cousines, qui sont en train de se faire photographier, parlent de lui ; malgré le fait qu’on suive son arrivée dans la vallée. Il sera in fine très peu au centre du film et peut-être davantage en tant que géologue cartographe, témoin et passeur (il envoie un moment donné un télégramme important) qu’en tant que pure figure du mouvement anarchiste. Lui aussi, comme tout le reste (narratif) sera déchu, par la mise en scène anarchiste, de son pouvoir potentiellement héroïque.

     Étant donné mon état d’épuisement au moment de la découverte du film de Cyril Schäublin, remettre les pieds en salle et voir deux films le même soir était sans doute un projet téméraire. Si j’ai facilement tenu le coup devant le distrayant et dispensable Omar la fraise, le sommeil s’est souvent manifesté devant Désordres : honnêtement je me suis assoupi à plusieurs reprises durant la seconde partie du film, qui est très posée, très lente, magnifique (pour piquer du nez).

     Mais ce que j’ai vu, avant, après et pendant m’a beaucoup plu : des choix de cadres tranchés, des vrais, passionnants à admirer, à analyser, pas si loin d’un Ozu, in fine. J’ai vu des plans et des proportions de plans que je n’avais encore jamais vus nulle part. Mais aussi des gestes, des mains, travaillant des rouages, assemblant des montres, pendules, horloges. Une volonté de mettre en corrélation le temps et l’argent dans chaque plan, la loi des cadences essentiellement, comme s’il s’agissait des prémisses de l’aliénation capitaliste de notre société actuelle. Une omniprésence du temps, dans chaque plan ou dialogue, entre tic-tac des horloges et ouvrières chronométrées, renforcé aussi par l’idée géniale de la séance photo, où chacun doit à l’époque poser pendant vingt secondes, avant de pouvoir acheter son portrait pour vingt centimes.

     Il y a aussi de nombreux plans larges, avec beaucoup de mouvement, au premier plan, au second ou dans le fond, un peu comme chez Tati. Et de façon systématiquement décentré aussi bien du point de vue des cadres (toujours singuliers) qu’au niveau de la parole : on entend parfois un dialogue qui se joue au second plan, sinon hors champ. On pourrait très bien citer ces nombreuses horloges (à la fabrique, à la gare, à la poste…) qui ne sont jamais à la même heure et accentuent ce vertige d’une temporalité disloquée, dans une société qui n’a pas encore complètement plongé dans le taylorisme moderne. Le multilinguisme utilisé dans le film participe aussi pleinement de cette dialectique : C’est un grand film politique en ce sens non pas qu’il parle de politique, mais qu’il filme politiquement. Au même titre qu’il penche vers Kropotkine plutôt que vers Bakounine, vers la périphérie plutôt que vers l’évidence, c’est le décentrement (ou la forme anarchiste) qui lui sert de mantra.

     C’est aussi un univers sonore incroyable (ce que j’ai entendu de plus beau depuis Weerasethakul) souvent hors champ, qui permet au film d’effectuer une véritable plongée dans la Vallée de Saint-Imier au XIXe siècle et d’y croire. Et un sujet, un propos : la révolution industrielle, la monétisation du travail, l’émergence de la classe ouvrière et bien entendu la pensée anarchiste, qu’il tient de bout en bout, à tel point qu’elle semble contaminer la mise en scène, les cadres, le son. C’est vraiment beau et fort.

     Et il y a cette scène finale extraordinaire, qui participe pleinement de cet état de décentrement, que le film n’aura cessé d’assumer. Des lieux d’abord : nous quittons le bourg pour la forêt. Et de la place des personnages : ce n’est pas Kropotkine qu’on écoute mais la jeune ouvrière, lui parler de son métier, d’une façon très précise et étirée. Un amour nait, hors des cadres, du temps, des cadences. Un amour politique. Je le reverrais volontiers et plus en forme la prochaine fois car c’est l’un des trucs les plus audacieux, radicaux et merveilleux vus depuis longtemps.

La montagne – Thomas Salvador – 2023

12. La montagne - Thomas Salvador - 2023Cœur de Pierre.

   8.5   Quel bonheur de retrouver Thomas Salvador, sept ans après le formidable Vincent n’a pas d’écailles, dans un film qui semble avoir été écrit et réalisé pour moi, aussi bien dans son fond que dans sa forme, dans son point de départ (l’attirance pure pour la montagne) que dans sa dimension mystico-fantastique vers laquelle il glisse, peu à peu : La roche, la glace, le feu, ces lueurs, cette nuit, ce silence. La dimension aquatique de Vincent n’a pas d’écailles se substitue à un univers plus minéral et rocheux. C’est très beau.

     « Je résiste pas » se défend d’emblée le personnage, tandis qu’il devait quitter Chamonix, reprendre le train avec ses collègues de travail. Trois mots qui semblent faire office de profession de foi, pour Salvador : Lui non plus ne résiste pas. Ni à déployer son cinéma, ni à investir les cimes et les trésors dont l’imaginaire qu’elles convoquent recèle. C’est une beauté triviale, insondable. Un glissement fin, d’un réalisme méticuleux vers un fantastique minimaliste. Mais le réel, déjà, regorge de fantastique à l’image de cette séquence magnifique de la brume qui s’élève, se déplace, remonte et semble venir étreindre Pierre autant qu’elle envahit l’écran.

     Comme Vincent dans le précédent film, Thomas Salvador campe lui-même le premier rôle, celui de Pierre, qu’on pourrait croire pris aux prises avec une force qui le dépasse, s’empare de lui, tandis que le récit développera tout l’inverse : le personnage semble, pour la première fois, se laisser guider par son instinct. Comme si soudainement, plus rien ne le retenait. Il troque le bruit de la machine à espresso (toute première scène) pour celui des craquements des pas dans la neige ; le blazer pour la softshell ; L’attaché-case pour le sac de rando Millet ; Le train pour le téléphérique ; Paris pour les sommets blancs.

     Il était ingénieur dans une entreprise de robotique, il semblait y tenir un rôle relativement important, il y était peut-être même cadre. Rien ne sera évident dès lors, tant le film nous plonge in media res dans le mystère de son attirance, tant son détachement global, de la société, du travail, de la famille, est brutal et irrémédiable. L’explication quant à cette soudaine crise existentielle n’aura pas lieu. Pierre est attiré par la montagne. Il ne résiste pas. Point. Quand il reçoit la visite de sa mère et ses deux frères, l’un d’eux lui demande s’il s’est passé quelque chose dans sa vie. Qu’a-t-il pu se passer sinon une soudaine crise d’extra-lucidité ?

     A plusieurs reprises, au début, le regard de Pierre se fige. D’abord sur cette crête montagneuse tandis qu’il présente l’instrument robotisé à un auditoire silencieux. Puis sur un chevreuil errant dans le village, le soir. Et enfin sur des photos d’expéditions accrochées à la cloison d’un resto. Et le film tentera régulièrement de capter ce regard fuyant, sur lui, sur les autres. Il y a ce moment où Pierre discute avec deux alpinistes qui lui montrent la voie par laquelle ils ont grimpé un versant. Puis ils se taisent, contemplent le lointain, leurs regards sont aspirés par l’immensité, la roche, la neige, le nuage qui s’empare du paysage puis disparait. C’est peut-être pas grand-chose, anodin en apparence, qu’importe, mais c’est le programme politique du film qui se résume dans cette fuite des regards.

     Avant de s’enliser brillamment dans le surnaturel, le film se veut le plus naturaliste possible. Il est notamment très pragmatique et technique, dans sa façon de capter le corps d’un homme au contact de ce nouvel environnement. On le voit entrer dans un magasin d’équipements sportifs, acheter son matériel, les baudriers, les chaussures à crampons. Puis installer son campement, monter une tente, se préparer des plats lyophilisés. Dans le même élan, le film capte quelque chose d’une montagne qui se meurt, on le comprend par les nombreux panneaux qui ornent le trajet notamment sur la mer de glaces. Sans que ce soit un sujet, la fonte des glaciers fait partie du récit, du paysage.

     Le film est peu bavard et l’est par ailleurs de moins en moins. Comme si la parole elle-même échappait aussi à la logique, comme si tout était au diapason de ce personnage. Qui pourtant n’est pas en rupture absolue : Il tombera amoureux d’une femme (comme Vincent tombait amoureux de Lucie, dans son précédent film). La rencontre entre Pierre et Léa n’échappe pas à ce dispositif de réalisme magique, mystérieux, silencieux. Mais c’est paradoxalement quand le film opère un glissement surnaturel que l’histoire d’amour naît. Quand Pierre est dans la roche, que Léa part à sa recherche.

     Le film est parsemé de scènes superbes comme celle avec le guide, notamment quand ils se posent, Pierre et lui, discutent sur un rocher, observent le massif de la dent du géant, puis le bivouac de Pierre au loin en contrebas. Juste après il y a aussi cette scène de la carte postale : quand Pierre offre son crayon chevreuil à la petite fille qui le regardait l’écrire, avant qu’il ne fasse la connaissance de Léa. La finesse de l’écriture se loge dans les plus infimes détails à l’image du moment où Léa, soudain, tutoie Pierre, naturellement. Ou de cette double boucle aux lacets.

     Dans Vincent n’a pas d’écailles, il y avait la scène de la bétonnière. Le pivot narratif ici c’est l’éboulement : Le rebondissement le plus réel qui soit, on en sait quelque chose ces temps-ci (et à titre personnel, mon ascension du Mont Blanc l’été dernier fut annulée in-extrémis par notre guide pour cause de chutes de pierres). Cet éboulement se produit suffisamment proche pour que Pierre le voit et assez loin pour qu’il n’y ait pas de danger direct. Toutefois, il semble prendre peur au préalable. On ne sait pas bien s’il panique. Puis on comprend que ça exacerbe chez lui ce désir de voir, de ressentir les éléments, de se confronter à la matière, ici un monceau de roches éboulé, qu’il va observer avant d’aller grimper le massif et entamer sa fusion avec la montagne.  

     C’est alors que le glissement (du réalisme au surnaturel) se produit. En pleine nuit. Mais cette dimension fantastique, aussi bien à l’œuvre dans Vincent n’a pas d’écailles, est traitée par le prisme le plus naturaliste possible et ainsi donc, de la façon la plus déstabilisante qui soit : Sous la glace, dans la roche, soudain, Pierre voit de curieuses lueurs en mouvement, des boules de braises. Créatures amicales, qui brillent et se dandinent dans le noir, qui se transforment en pierre noire et s’immobilisent dans la lumière. Plus tard, Pierre en délivrera l’une d’elles, prisonnière d’un rocher éboulé. Avant qu’il ne soit convié à pénétrer la roche, dont il en gardera un bras lumineux. Le film, aussi hybride dans son récit que dans sa forme, le devient également dans la matière qu’il charrie.

Aucun ours (Khers nist) – Jafar Panahi – 2022

02. Aucun ours - Jafar Panahi - 2022Mise en résistance.

   6.0   Jafar Panahi qui a depuis été emprisonné pour propagande contre le régime puis libéré après une grève de la faim, incarne ici un miroir de lui-même, soit un cinéaste interdit de tourner et de quitter le territoire, reclus dans un village iranien proche de la frontière turque, tournant malgré tout un film en Turquie qu’il dirige par visioconférence.

     A l’image de cette première scène dans la rue où un « cut » vient nous apprendre qu’il s’agissait d’un tournage, avant qu’un zoom arrière nous fasse comprendre qu’il s’agit d’un tournage dirigé derrière un ordinateur, Aucun ours ne sera que mise en abyme à multiples entrées.

     D’autant que très vite, les couches de récits volontiers labyrinthiques se superposent : bientôt Panahi confie une caméra à son hôte afin qu’il filme la cérémonie de fiançailles où il se rend. Non habitué avec une caméra, et croyant ne pas filmer quand il filme, l’homme en question rapporte une conversation entre villageois s’inquiétant de l’identité de cet invité qu’ils soupçonnent d’être un espion.

     Plus tard, la superposition se prolonge encore : Panahi se voit bientôt accusé d’avoir pris en photo un couple illégitime, la femme étant promise à un autre homme. Quant à cette photo, s’il l’a vraiment prise, nous ne l’avons pas vu non plus, puisque le supposé couple était hors champ (pour nous, spectateurs) quand Panahi photographiait des gamins sur un toit.

     Tout se mélange. Le documentaire et la fiction. Le film dans le film. La mise en fiction de la propre situation du cinéaste. Il y est question de voitures de contrebande, d’un couple clandestin, d’un autre couple souhaitant quitter le pays avec des faux passeports, d’un village dans la tourmente. De l’Iran, en général.

     C’est dire le niveau de vertige qui anime Aucun ours, qui paradoxalement sera son film le moins incarné, beaucoup trop politique et théorique, je crois. Difficile de faire plus métatextuel que ce film, en effet. Au sein du dispositif on pense un moment à l’image manquante de Blow up. Beau film, passionnant évidemment, mais un peu trop rugueux et littéral, peut-être. Et puis ça manque d’un visage féminin, aussi beau que dans Hors-jeu ou Trois visages.

Terrifier – Damien Leone – 2016

01. Terrifier - Damien Leone - 2016En présence d’un clown.

   6.5   Pile le slasher bis low cost que je souhaitais voir. Bricolé avec rien, Terrifier met en priorité l’accent sur son boogeyman (un clown glaçant qui torture gratuitement ses victimes. Point), ainsi que sur sa générosité en hémoglobine, ses scènes franchement gores (on y découpe à la scie un personnage par l’entrejambe jusqu’au crâne, notamment) et sur son atmosphère de hangar glauque. On pourra toujours regretter, pour certain, un manque de récit ou d’acteurs professionnels (Cela dit j’aime bien le petit côté Neve Campbell de l’actrice principale… qui ne sera pas du tout la final girl par ailleurs), pour d’autres, dont je fais partie, que l’ambiance sonore soit à ce point oubliée, remplacée par une musique (certes très réussie) lorgnant sur le Disasterpiece de It follows. Alors oui, de ne pas avoir vu un film en quinze jours m’a sans doute permis d’être indulgent, car simplement ravi d’en revoir un. Mais j’ose penser que Terrifier a réussi son coup. Et qu’il ne tente pas de me raconter grand-chose en fait partie : au secours les scénarios, au secours l’absolue cohérence, au secours l’elevated horror de manière générale. Qu’il est bon de revoir un bis old school, soigné (Si c’est du Z, il est beau) et archi simple, un truc fauché (budget de 30.000 dollars) mais un truc sale qui respire le sale (ce hangar est magnifique, déjà), avec des prothèses super bien fichues, des plans, du rythme, un vrai méchant, Art le clown, terrifiant. Et ça tombe bien car c’était annoncé dans le titre. Reste à savoir si la promesse d’antagoniste emblématique tiendra dans la suite, qui s’étire sur une heure de plus semble t-il et c’est peut-être ça le plus terrifiant.

Asterix & Obelix, L’empire du milieu – Guillaume Canet – 2023

06. Asterix & Obelix, L'empire du milieu - Guillaume Canet - 2023Mission Obelix.

   4.0   Guillaume Canet mange a tous les râteliers : il veut à la fois être dans la roue de Zidi que dans celle de Chabat et Langmann. En résulte un truc hybride avec entre autres quelques références populaires bien dispatchées : une situation calquée sur La chèvre – Pierre Richard en Panoramix s’enfonce dans les sables mouvants (et voir son fiston se délecter du clin d’œil, c’est assez chouette) – ou une réplique des Bronzés font du ski, ou une séquence en musique sur Dirty dancing. C’est gratuit, complètement infondé dans le récit mais c’est vraiment pas ce qui m’a déplu.

     Notons que le film a quelques atouts dans sa manche, à commencer par Obelix, incarné par Gilles Lellouche : ça lui va super bien, franchement. Mais pour être franc je n’ai jamais trop aimé le duo Clavier/Depardieu, même dans Mission Cléopâtre je trouve qu’ils font tâche. Lellouche lui apporte autre chose, une touche plus imposante (il vole clairement la vedette à Asterix, déjà) et romantique. Ensuite il y a Jonathan Cohen, en Graindemaïs, qui fait du Jonathan Cohen, et qui moi me fait toujours rire, sur une vanne ou une mimique. Pareil pour Ramzy en Epidemaïs. Ou Philippe Katerine en Barde. Ou l’easter egg du double rôle surprise de Marion Cotillard.

     Bien entendu on regrette qu’il y ait tant de guest qui d’ailleurs n’auront pour la plupart que dix secondes d’apparition à l’écran. C’est vraiment l’époque Tiktok que vient représenter cet opus. Bien entendu il y a des trucs consternants comme l’accent brésilien de José Garcia, la séquence Zlatan Ibrahimovic (même si le claquage m’a fait sourire, j’avoue) ou Cassel en Jules César imitant le geste de Jul. Au secours. Ou bien balancer le « Ecstasy of gold » d’Ennio Morricone, avec l’exploit de très mal l’utiliser.

     Il y a aussi beaucoup de séquences attendues, trop programmatiques pour s’intégrer dans « une nouvelle aventure ». Surtout au début : la même installation, les mêmes gags, la même voix off de Darmon, le même romain qui vole. Tout sonne Mission Cléopâtre, sans que ça fonctionne. Avec une petite volonté de s’inscrire dans l’époque : Asterix a viré écolo-vegan. Bref, les premières minutes, c’est l’enfer.

     Mais ce qui restera le plus problématique c’est qu’on ne sait pas où sont les 65 patates si ce n’est pour les stars. On ne voit rien, les décors sont très faibles, les scènes d’action pas du tout inspirées. Le film, pourtant cher sur le papier, ne procure jamais la sensation épique qu’il revendique, aussi bien par son imposant casting que par son utilisation musicale ou son récit déployé sur plusieurs continents. Parfois je me suis même demandé s’ils avaient pas directement tourné dans les allées du Parc Asterix. Il n’y a que des stars. Qui font leur petit cameo-sketch sans intérêt, dans l’espoir que leurs fans respectifs se contentent du reste : Ici c’est Angèle ou Orelsan, là Bigflo & Oli, McFly & Carlito ou Zlatan et Florent Manaudou. On est dans la lignée « arguments marketing » ridicule des Jeux olympiques.

     Suivant l’humeur on pourra trouver cela gentillet ou embarrassant j’imagine. Moi je suis assez admiratif in fine de voir Canet se lancer là-dedans. C’est suicidaire de passer après un film (celui de Chabat) qui est l’un des rois du box-office. Et un film, qui, j’en suis persuadé est plus chouette en tant que film de Chabat (de l’esprit Canal, disons) qu’en tant qu’adaptation d’Asterix : des supers sketchs mais une aventure toute pourrie. Et pourtant, Canet il fonce, tête baissée. Et il parvient à capter l’ère (merdique) du temps, avec un truc médiocre mais honnête, en rapport à la moyenne des adaptations d’Asterix : Beaucoup moins ringard que le premier et beaucoup moins cocainé que le troisième. Passées les vingt (difficiles) premières minutes, le tout s’avère même plutôt divertissant. Jamais hideux visuellement. Pas trop survolté, non plus. Je m’attendais à bien pire.

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